Ahhhhhhhhhhh, la magie du
cinéma. Ces instants de liberté si précieux qui permettent aux
cinéastes du monde entier de laisser libre cours à leurs fantasmes
de la manière la plus débridée qu'elle puisse être et ce, quelque
soit l'argent qu'ils aient en leur possession. Artisan du cinéma
d'exploitation français devenu grâce au bouche à oreille l'un de
ces réalisateurs cultes de l'hexagone, Jean Rollin, allez savoir
pourquoi, réalisa ce cultissimo-nanardesque Lac des
morts-vivants sous
l'étrange pseudonyme de J.A. Lazer et non pas sous son propre nom.
Pourquoi ? Parce qu'une ribambelle s'y désape avec autant de
faciliter que pour se brosser les dents ? Étonnant de la part
d'un réalisateur qui a jonglé durant une grande partie de sa
carrière entre l'horreur et le porno (Lèvres
entrouvertes pour sexes chauds
ou Pénétrations vicieuses sous
le pseudonyme de Michel Gentil et Gamines en
chaleur
ou Sodomanie
sous celui de Robert Xavier). La raison doit venir d'ailleurs.
Peut-être plus simplement parce que Le Lac des
morts-vivants
se démarque quelque peu de l'éternelle fascination du réalisateur
français pour le thème des vampires. Car ici, et comme l'indique
très précisément le titre, il s'agit de morts-vivants. De zombies
plus verdâtres encore que ceux d'un certain George Romero qui trois
ans plus tôt allait définitivement asseoir sa suprématie dans le
genre avec le chef-d’œuvre absolu de la catégorie, Dawn
of the Dead
en 1978...
Concernant
Jean Rollin, les choses sont infiniment plus compliquées. Les moyens
mis en œuvre n'étant pas tout à fait les mêmes, le résultat se
voit très clairement à l'écran. Quatre ans après le réalisateur
américain Ken Wiederhorn et son Commando des
morts-vivants (Shock
Waves
en 1977), le français reprend le concept (lui pique l'idée, ouais!)
des morts-vivants en uniformes nazis végétant sous l'eau. Couplés
à des visages entièrement peints dans un vert qui laisse davantage
transparaître un certain talent pour le maquillage façon ''œuvre
d'art picturale simplifiée à l'extrême'' que le réalisme de
soldats allemands revenus à la vie et semant terreur et mort aux
abords d'un lac, le long-métrage de Jean Rollin mérite son titre de
Nanar tant le film s'avère aussi drôle que dramatiquement loupé !
Il faut savoir qu'à l'origine le film devait être l’œuvre de
l'espagnol Jesús Franco (autre sacré personnage du septième art.
L'alter ego hispanique de Jean Rollin!). Le réalisateur quitte le
film au beau milieu du tournage et la relève est ainsi assurée par
le français qui signe l'un des pires mais aussi des plus mémorables
films d'horreur toutes thématiques confondues...
Le
bonhomme venant du X, on n'aura pourtant pas droit au moindre
gros-plan explicite (n'est pas Joe D'Amato qui veut!). Mais
connaissant Jean Rollin, on ne s'étonnera pas en revanche de voir
d'entrée de jeu une superbe naïade toute bronzée se foutre à poil
pour le bonheur des libidineux. Une séquence d'une durée de cinq
minutes environs servant de prétexte à l'apparition du premier
mort-vivant du titre. À noter la soupe musicale proposée par le
compositeur français Daniel White, celui-là même qui participa
tout de même à l'élaboration de dizaines de bandes-originales dont
celles des Maîtresses du docteur Jekyll de
Jesús Franco en 1964 (auquel Daniel White restera très fidèle
durant de nombreuses années), Les Gardiennes du
pénitencier
d'Alain Deruelle en 1979 et même celle du Don
Quichotte
de 1992, un étonnant projet en collaboration entre Jesús Franco et
Orson Welles (!?!) qui malheureusement ne verra jamais le jour.
Tourné dans la campagne oisienne, sans doute pas très loin du
château de la Reine Blanche à Coye-la-Forêt dans la région
Hauts-de-France qui sert de décor à la demeure du maire interprété
par l'acteur suisse Howard Vernon, Le Lac des
morts-vivants
est, faut-il l'admettre, souvent très ennuyeux. La plupart des
seconds rôles sont ''incarnés''
par des amateurs.
Les
''ploucs'' du coin qui n'y bitent rien en matière d'interprétation
mais demeurent finalement assez touchants dans le naturel qu'ils
dégagent. Il faut dire que Jean Rollin n'était sans doute pas le
genre de cinéaste à refaire la même scène des dizaines de fois
jusqu'à l'obtention de la séquence parfaite. Question
effets-spéciaux, comme d'habitude chez le réalisateur, c'est le
minimum syndical. La palme d'or revenant donc aux morts-vivants
peints en vert. Si la post-synchronisation s'avère déplorable,
impossible de ne pas éprouver beaucoup de plaisir à entendre parler
les nazis dans notre langue avec un fort accent du coin !
Question décors, c'est la ruralité qui parle. Pour les costumes,
rien de mieux que des figurants qui viennent sapés comme dans leur
quotidien. Quant à l'histoire, elle mêle une journaliste venue
enquêter sur le ''lac maudit'' (et non pas ''DES maudits'' comme le
maire croit nécessaire de le préciser........!), l'évocation de
plusieurs meurtres de jeunes femmes (toutes évidemment
consciencieusement dénudées, olé, olé!) par des nazis zombifiés
anthropophages surgis des eaux du lac en question. Tout ceci se
déroulant dans une campagne bien de chez nous sur un rythme
terriblement soporifique. Une œuvre ponctuée par les compositions
de Daniel White, tantôt du style ''petite musique de supermarché'',
tantôt genre ''musique concrète et avant-gardiste''. De quoi
semble-t-il, passer un bon moment, hein ? Ben non, pas vraiment
en fait. À vous de juger...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire