Premier long-métrage
écrit et réalisé par le cinéaste français Arthur Môlard après
les courts-métrages Jiminy
en 2013 etScaramouche Scaramouche
en 2018, 37 : l'ombre et la proie
est un thriller en huis-clos en grande partie tourné à l'intérieur
d'une cabine de semi-remorque conduit par Vincent. Un chauffeur marié
et père de deux filles qui à la frontière accepte d'accueillir à
son bord ''Trente-sept'',
une migrante enceinte malgré l'interdiction de prendre des
passagers. La jeune femme était jusque là montée dans le camion de
Fredo (Arnaud Churin), un autre conducteur et ami de Vincent dont on
apprendra très rapidement qu'il a été abattu d'une balle dans la
tête. Très vite, Vincent comprend que ''Trente-sept''
est probablement coupable du meurtre. Évoquer ce dernier n'étant en
soit une révélation qui n'a rien de vraiment capital puisqu'un
détail (du sang coule de la portière passager de la victime) ainsi
que l'affiche ne laissent la place à aucune autre hypothèse.
D'autant plus que la passagère de notre héros se comporte de
manière plutôt inadéquate. En effet, on peut supposer qu'en tant
que migrante, la jeune femme aurait dû avoir tendance à se faire
discrète. Concernant la mort de Fredo, 37 :
l'ombre et la proie
ne fait donc pas du cas un mystère et l'intérêt du long-métrage
reposera sur un tout autre objet. Et même sur plusieurs qu'il serait
majoritairement criminel de révéler ici. À l'origine du projet
l'on trouve la société Parasomnia
Production dont
la structure repose sur le financement de films de genre français.
Collaboration entre Moana
Films
et Sony Pictures
Entertainment France,
le long-métrage d'Arthur Môlard est l'un des premiers projets de
la société qui produit ainsi une œuvre sinon budgété à hauteur
d'un blockbuster d'action à la française, du moins aussi ambitieux
que put l'être un certain The Hitcher
signé en 1986 par le réalisateur américain Robert Harmon.
Véritable film culte dans lequel le protagoniste Jim Halsey (C.
Thomas Howell) prenait à bord de son véhicule John Ryder
(diabolique Rutger Hauer) dans un film sous tension dans lequel ce
dernier semait la mort tout en étant particulièrement menaçant vis
à vis du jeune conducteur. En cela, 37 :
l'ombre et la proie
s'en rapproche très clairement. Mais plutôt que de s'inscrire
exclusivement dans les genres Thriller, Road-Movie et film d'horreur,
Arthur Môlard convoque une thématique très en vogue actuellement :
celui du sort des migrants et de leur transport illégal à bord de
camions afin de les faire traverser le pays jusqu'en Angleterre.
Si
la première partie du film ne brille pas par son originalité, la
suite des événements prouvera que le réalisateur et la scénariste
Claire Patronik qui est venue le soutenir dans l'élaboration du
scénario ont quelque chose de véritablement tangible à proposer au
public. Un script pervers et inattendu soutenu par plusieurs twists
qui relanceront la machinerie jusqu'au terme du récit. Dans le rôle
de Vincent, l'acteur Guillaume Pottier qui dernièrement est apparu
dans L'amour ouf
de Gilles Lellouche et Bastion 36
d'Olivier Marchal incarne un personnage attachant mais réservé,
soucieux de préserver les siens au point d'avoir contracté une
assurance vie à son nom si jamais sa famille devait rencontrer des
soucis financiers. Bien que le film tourne autour de son personnage
et de celui interprété par l'actrice suisse Melodie Simina (dont
''Trente-sept''
est le premier vrai rôle principal sur un grand écran), 37 :
l'ombre et la proie
n'en met pas moins en scène quelques personnages secondaires. Tels
Patti, Carlos et Pepito, respectivement incarnés à l'écran par
Agnès Sourdillon, Christophe Vandevelde et Ary Gabison. Le
long-métrage d'Arthur Môlard réserve quelques jolis instants de
tension, comme lorsque nos deux principaux protagonistes rejoignent
les collègues de Fredo dans un bar afin de lui rendre un dernier
hommage. Le film n'en est pas moins réduit parfois à quelques
facilités qui rendent certaines scènes improbables. Comme lors de
cette séquence justement, surtout lorsque Vincent danse avec la
jeune migrante. Une situation qui aurait probablement laissé espérer
pour le personnage une porte de sortie lui permettant de se saisir du
sac de la jeune femme renfermant l'arme à feu de Fredo. Mais non, en
Saint-Vincent
(comme le décrira notamment Patti), on ne saura sans doute jamais
s'il agit avec prudence en raison des conditions physiques de
''Trente-sept''
(je rappelle qu'elle est enceinte) ou pour préserver ses amis qui
risqueraient pour le coup de prendre une balle perdue. Toujours
est-il que le film ménage une jolie tension, laquelle prend de
l'ampleur au fil du récit, jusqu'à cette révélation qui remet
tout en question et que je vous pousse à découvrir par vous-même.
Au final, aussi exiguë que puisse être la structure du projet,
37 : l'ombre et la proie fonctionne
parfaitement. On ne s'ennuie jamais grâce à une relance
scénaristique permanente qui permet en outre de mettre de côté les
quelques invraisemblances qui émaillent le récit. À voir, donc...
Oui, le migrant doit faire partie du "générateur de scénario aléatoire" de Luc Besson dans le cinéma français... :-)
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