J'en attendais peut-être
trop de la part de La Región Salvaje,
le dernier long-métrage du cinéaste mexicain Amat Escalante qui
m'avait fait forte impression il y a dix ans tout rond avec Los
Batardos,
son deux long-métrage. Son dernier né souffre d'une contrainte
tellement pesante que celle-ci plane très rapidement sur une œuvre
qui manque singulièrement de folie comparée au terrifiant
Possession
du réalisateur polonais Andrzej Zulawski. Ce dont le film d'Amat
Escalante ne manque pas en revanche, c'est de sexe. Ici, il prend la
forme la plus classique mais se prolonge sous un aspect qui convoque
le fantastique avec cette étrange créature vivant dans une cabane
au fond des bois et scrupuleusement veillée par Maria Vega et son
époux scientifique. Une bête faisant furieusement penser à celle
de Zulawski, tentaculaire, dont les protubérances sont autant de
bras pénétrant les diverses zones érogènes de celles qui la
rencontrent. Drame fantastique, La Región
Salvaje mêle
cet élément d'épouvante au cadre classique d'un couple explosant
après la rencontre d'un homme confronté à une créature qui, si
tant est qu'il soit possible de l'imaginer faire partie de l'espèce
humaine, semble être hétérosexuelle.
Cet
homme, c'est Fabian, frère d'Alejandra, beau-frère et amant
d'Angel. C'est après avoir fait la connaissance de Veronica à
l’hôpital où il travaille que le jeune homme croise la route de
la créature enfouie dans ce temple du plaisir miteux au cœur d'une
région sauvage. Il en reviendra le crâne défoncé, nu, et dans le
coma. Veillé par sa sœur, celle-ci fait à son tour la connaissance
de Veronica. Ancienne « amante »
de la bête, Veronica s'insinue discrètement dans la vie d'Alejandra
et de ses deux enfants après que Fabian ait été accusé à tort
d'avoir battu son beau-frère et invite sa nouvelle amie à faire la
connaissance avec les Vega ainsi qu'avec la créature. Au contact de
celle-ci, Alejandra va devenir plus forte tout en ne pouvant plus
résister au plaisir sexuel que lui apporte la créature,
bouleversant ainsi son existence...
Si
dans le fond La Región Salvaje
promettait un spectacle inattendu et radical, dans la forme, certains
éléments se révèlent au final plutôt décevants. Le dernier film
d'Amat Escalante, est une œuvre éminemment sexuée. L'acte y est
des plus primitif, filmé froidement. Un homme et une femme. Puis
deux hommes entre eux. Et pour finir, une femme et la bête. Une
créature immonde, crainte, tout en provoquant chez celles qui
entrent en contact physique avec elle, une addiction extraordinaire.
Pulsion rime ici avec fascination. La Región
Salvaje
connaît un déroulement relativement classique. On y croise en effet
un trio de personnages dans leurs activités quotidiennes. Un récit
presque trop simple connaissant des ruptures de ton « fantastiques »
à l'arrivée de cette créature qui tout en offrant un plaisir
sexuel démultiplié par autant de tentacules ornés de bouches
avides à leur extrémités, parvient à arracher à Veronica
d'abord, puis à Alejandra ensuite, un peu de leur humanité. On
découvre cette dernière effectivement capable d'abandonner ses
enfants, de trahir son époux. Et pourtant, dans la chronologie des
événements, ces faits étant relatés avant sa première rencontre
avec la créature, on peut alors supposer que celle-ci permet à ses
proies d'exprimer leur nature profonde.
La Región Salvaje
est une bonne surprise même si l'on pouvait en attendre davantage.
Dans l'ombre de Possession,
l’œuvre d'Amat Escalante ne fait malheureusement pas le poids.
Malgré l'excellente interprétation de Ruth Jazmin Ramos
(Alejandra), Simone Bucio (Veronica), Jesus Meza (Angel) et Eden
Villacencio (Fabian), le film est parfois pesant, mais pas forcément
dans le bon sens. Le mexicain y décrit le pouvoir du sexe tout en
livrant un message un peu lourd sur le péché qu'il représente à
certains égards. L'aspect parfois réaliste au demeurant convaincant
ne fait pas le poids dès lors que certaines séquences plombent le
rythme déjà peu soutenu du long-métrage. La fascination s'exerce
en fait surtout en présence de la créature et de son environnement.
La Región Salvaje
souffre d'une partition musicale parfois inquiétante mais en général
trop discrète pour créer un climat anxiogène suffisamment riche
pour que l'on ressorte de l'expérience tout à fait convaincus. Une
semi-déception...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire