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lundi 3 février 2020

La Residencia de Narciso Ibáñez Serrador (1969) - ★★★★★★★★★☆



À l'évocation du nom du cinéaste espagnol Narciso Ibáñez Serrador, c'est toute la fibre cinéphile des amateurs de cinéma ibérique en général et d’œuvres post-apocalyptico-dystopiques en particulier qui s'éveille. Auteur en 1976 du film culte ¿Quién puede Matar a un Niño? (traduit chez nous sous le titre Les Révoltés de l'An 2000) Narciso Ibáñez Serrador, mort l'année dernière à l'âge de quatre-vingt trois ans aura surtout œuvré pour le petit écran (il aura notamment créé et participé à la série de téléfilms horrifiques Historias para no Dormir aux côtés de Álex de la Iglesia, Jaume Balagueró ou encore Paco Plaza) tout en apparaissant très rarement dans l'agenda cinématographique espagnol. Une toute petite poignée de longs-métrages cinéma seulement et ce, en un peu plus d'un demi-siècle de carrière en tant que réalisateur. Son premier méfait sur grand écran sera La Residencia en 1969. Une œuvre dont les répercussions psychologiques semblent pour son époque, presque anachroniques. On aura sans doute jamais ressenti un tel malaise depuis l'extraordinaire Suddenly, Last Summer de Joseph L. Mankiewicz dix ans en arrière ou depuis le tout aussi fabuleux Shock Corridor de Samuel Fuller en 1963 (on pourrait également citer le terrible Répulsion de Roman Polanski de 1965). De ces poisons qui s'insinuent dans nos veines pour monter jusqu'au cerveau et ne plus nous lâcher jusqu'au générique de fin...

Alors bien entendu, cinquante et un ans après sa sortie sur les écrans, La Residencia pourra paraître bien mièvre pour ces nouvelles générations de cinéPHAGES ne se nourrissant que d’œuvres crapoteuses très largement surestimées (en réalité, combien de The Girl Next Door signé Gregory Wilson peuvent se targuer d'être authentiquement dérangeants?). Pourtant, à bien y regarder, l’œuvre de Narciso Ibáñez Serrador a bel et bien conservé toute sa puissance évocatrice. Du charme désuet d'une institution pour jeunes filles conservant l'éclat, le maintien et la rigueur de l'époque victorienne, le cinéaste espagnol impose un climat délétère dans ce qui constitue un melting pot des genres entre œuvre d'atmosphère tirant vers l'épouvante, Giallo ibérique et drame. Porté par des décors magnifiques mais étouffants, un éclairage très largement atténué, une bande-son et des musiques déviantes signées du compositeur argentin Waldo de los Ríos, mais surtout par une irréprochable interprétation, La Residencia est un chef-d’œuvre qui porte en lui toute la tension sexuelle d'une ribambelle d'adolescentes frustrées de n'avoir jamais l'occasion de fréquenter le moindre garçon de leur âge.

Derrière l'apparente pureté de chacune s'exprime le désir. Une appétence pour le sexe révélée lorsque notamment, l'une d'entre elles s'échappe d'un cours donné par la tyrannique Madame Fourneau pour retrouver son amant dans la serre de la propriété, ses camarades ressentant alors par procuration le plaisir qui lui est donné. L'extraordinaire actrice allemande Lilli Palmer incarne la directrice de l'établissement. Glaciale et rigide, son interprétation fait froid dans le dos et son attitude ouvre des perspectives qui n'aboutiront cependant pas forcément dans le sens que leur donnera le spectateur. À ses côtés, l'actrice Mary Maude dans ce qui constitue l'un des portraits d'adolescentes perverties par le mal parmi les plus marquants. Face à elle, la fragile Cristina Gaibo n'y fera pas long feu. À travers son premier long-métrage, Narciso Ibáñez Serrador fait une description de la gente masculine peu ou pas du tout élogieuse, même lorsqu'elle paraît incarner la pureté la plus inaltérable qui soit. L'espagnol joue également sur l’ambiguïté révélée par des scènes évoquant désir saphique et inceste. La Residencia trouvera un écho aussi retentissant qu'admirable deux ans plus tard outre-atlantique avec The Beguiled de Don Siegel, autre chef-d’œuvre distillant un très important malaise...

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