Hasard malheureux du
calendrier, c'est après avoir découvert Control Freak
de Shal Ngo que je suis tombé sur La damnée du
réalisateur français Abel Danan dont le premier long-métrage Don't
Watch! a vu le jour sur la plateforme de streaming
UniversCiné en décembre dernier et dont le second film
partage avec celui du cinéaste américain quelques similitudes
(légende taoïste d'un côté et marocaine de l'autre). Conçu bien
en amont mais diffusé dans les salles de cinéma en octobre 2024
sans doute en raison du Covid-19, La damnée
apparaît déjà aujourd'hui comme étant fortement anachronique.
Alors que le virus qui enferma la population française durant de
longs mois bénéficia à de nombreux longs-métrages tous genres
confondus, La damnée arrive avec un train de retard
(un '' détail '' qui amusera plus ou moins les fréquents usagers de
la Sncf). Incarné par une héroïne d'origine marocaine, l'on aurait
pu et dû se prêter au fantasme de découvrir une œuvre exotique
provenant du Maghreb mais bien qu'étant née d'une famille
originaire dOudja, l'actrice Lina El Arabia, l'évocation et les
rarissimes représentations géographiques du Maroc ainsi que
certaines compositions dues au musicien français Benjamin Grossmann
n'empêchent pourtant pas La damnée de n'être qu'un
petit film d'horreur qui reste ancré dans un esprit très
occidental. N'en déplaise aux quelques séquences tournées au Maroc
revenant sur les origines du Mal qui semble s'être invité dans le
petit appartement de l'héroïne prénommée Yara, Abel Danan ne
parvient malheureusement pas à se distinguer de la concurrence.
Le réalisateur tente de
semer le doute entre les troubles psychiatriques d'une jeune femme
atteinte d'agoraphobie, les symptômes présumés du Covid-19 et la
présence d'une créature originaire d'un petit village marocain bien
décidée à se venger sur la descendance de celles et ceux qui s'en
prirent à elle au temps de son vivant. Après, évidemment, le film
emprunte son concept à toute une vague de longs-métrages portant
sur le thème des esprits et des malédictions sans pour autant
parvenir à apporter sa pierre à l'édifice. La damnée
manque ainsi cruellement d'originalité et bien que portant son sujet
autour d'une légende géographiquement exotique, le résultat est
d'une platitude quasi exemplaire. On sent pourtant qu'Abel Danan et
son interprète principale tentent des choses. Si certains visuels ne
sont pas inintéressants et si Lina El Arabia fait tout pour rendre
crédible la situation dans laquelle est plongé son personnage, au
final, le film demeure plutôt fade. N'est pas Roman Polanski ou
Catherine Deneuve qui veut. Nous sommes donc très loin du génial
Répulsion auquel, parfois, le film semble se référer
(le meurtre au couteau) ou des productions asiatiques façon J-Horror
qui demeurent avant tout parmi les meilleures références en matière
d'agressions surnaturelles et domestiques. Concernant le sous-texte
très contemporain du patriarcat, là encore, le réalisateur se
montre relativement timide. La damnée reste
essentiellement une sorte de vade-mecum du cinéma
fantastico-horrifique qui permet surtout à son auteur de régurgiter
toutes ses connaissances en la matière sans pour autant y ajouter sa
touche personnelle. En conclusion, l'on réservera tout d'abord le
film aux néophytes puisque les habitués risquent de s'ennuyer
devant cet étalage de poncifs...
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