Qu'il soit réussi ou
non, qu'il surpasse son illustre source d'inspiration ou qu'il ne lui
arrive pas même à la cheville, s'il y a bien un point qu'il sera
difficile de contredire, c'est le culot avec lequel le cinéaste Rob
Zombie se sera approprié le mythe de Michael Myers pour en proposer
une relecture faisant table rase sur l'iconographie de l'un des plus
célèbres tueurs masqués du septième art, et même s'il aura dû
pour cela, lâcher un peu de leste. Trente ans... Il aura fallut trente
ans pour que quelqu'un se décide enfin à revenir aux sources. A ne
plus simplement continuer à nourrir une légende qui avait finit
(paraît-il) par s'étioler à force de vouloir l'exploiter. Né le
12 janvier 1965, chanteur et musicien du groupe de métal White
Zombie, Rob se lance dans le
septième art en 2003 avec The House of 1000 Corpses,
œuvre remarquée, mais sans doute pas autant que le second
long-métrage d'un artiste qui aura, au moins, su se reconvertir de
la plus belle des manières. The Devil's Rejects,
deuxième film et premier véritable choc. Un road-trip d'une
violence inouïe qui renoue avec un certain cinéma transgressif des
années soixante-dix. On pense notamment au Texas
Chainsaw Massacre
de Tobe Hooper, ou à The Hills Have Eyes
de Wes Craven. Après avoir réalisé une fausse bande-annonce
(Werewolf Women of the SS)
pour le diptyque Grindhouse,
Rob Zombie s'attèle donc à la réalisation de son troisième
long-métrage sobrement intitulé Halloween.
Ça
n'est plus un secret pour les rares badauds qui ont osé franchir les
portes de Cinémart
ces dernier jours mais je n'ai que très moyennement apprécié
l’œuvre séminale du pourtant génial John Carpenter. Presque
aussi chiant que de rester planté devant une pendule pendant
quatre-vingt dix minutes à voir s'égrainer les secondes, puis les
minutes, Halloween
cuvée 1978 fut une énorme déception (d'ailleurs, à ce propos,
n'ayant pas envie de me faire taper sur les doigts, je ne ferai pas
la critique de Suspiria
version Dario Argento que j'ai, « grave »
détestée). Aussi creux qu'improbable, le film usurpe totalement son
statut d’œuvre culte (pour les coups de fouet, je suis dispo ce
soir de 22h à 3h du matin) , ce qui ne m'a pourtant pas empêché de
vouloir persévérer afin de trouver, peut-être, la perle rare. Sur
laquelle il me semble par ailleurs avoir déjà mis la main il y a
quelques années à travers l'excellent Halloween
3.
Mais celui-ci n'ayant aucun rapport avec l’œuvre de John
Carpenter, et ne voulant surtout pas subir les suites consécutives,
j'ai donc porté mon choix sur la vision toute personnelle de Rob
Zombie.
La
phase narcissique étant arrivée à son terme, entrons désormais
dans le vif du sujet. Première différence entre l’œuvre
originale et son remake, le choix appliqué par Rob Zombie de revenir
en profondeur sur l'enfance de Michael Myers et ne pas se contenter
simplement de le montrer en train de tuer sa grande sœur. Le
cinéaste décrit l'univers néfaste dans lequel baigne l'enfant. Une
histoire personnelle qui fait écho aux faits-divers macabres qui
parfois ressurgissent dans les médias lorsque l'on apprend qu'un
gamin a pénétré l'enceinte de l’établissement scolaire où il
étudie afin d'y dessouder un maximum de ses camarades. Le petit
Michael est le souffre-douleur de son beau-père, un alcoolique
notoire passant son temps calé dans un fauteuil à regarder des
émissions débiles et à boire la bière. Aimante, la mère de
l'enfant danse nue dans une boite de strip-tease afin de subvenir aux
besoins de sa petite famille également constituée d'une fille plus
âgée que Michael et d'une seconde beaucoup plus jeune. Harcelé par
deux de ses camarades, le futur tueur en série d'Haddonfield (dont
l'un des passes-temps favoris et de torturer les animaux), passe à l'acte
sur l'un deux et sur plusieurs membres de sa famille avant d'être
jugé et interné dans un hôpital psychiatrique. Rob Zombie dresse
un vrai portrait de psychopathe et clôt ainsi une première partie
passionnante et idéalement incarnée par l'acteur Daeg Faerch qui
dans la peau de Michael Myers enfant est assez stupéfiant.
Cette
première partie est également l'occasion de faire connaissance avec
le fameux Docteur Sam Loomis de l’œuvre originale, cette fois-ci
incarné par le génial Malcom McDowell dont le look tranche avec sa
profession. Un individu pas vraiment net qui pourtant laisse
envisager sa volonté d'aider le jeune adolescent en perdition. C'est
également l'occasion d'assister à la lente séparation entre le
corps et l'esprit d'un Michael Myers plongeant dans le mutisme le
plus total durant les quinze années précédent sa fuite de
l'établissement. Rob Zombie convoque une armada de « guests »
mémorables.
Au hasard : Danny Trejo dans le rôle du gardien Ismael Cruz, ou
Richard Lynch dans celui de Chambers, le principal de l'établissement
scolaire. Plus tard, d'autres rejoindront les festivités :
Brad Dourif dans le rôle du Shérif Leight Bracket, Dee Wallace
Stone dans celui de Cynthia Strode, la mère de l'héroïne Laurie
incarnée par Scout Taylor-Compton après Jamie Lee-Curtis, ou encore
Ken Foree, le « black »
du Zombie
de George Romero, Sybil Danning, Bill Moseley, ou enfin Udo Kier. Une
belle brochette d'acteurs pour un film qui contrairement à l'oeuvre
de John Carpenter ne fait jamais dans l'attentisme et accumule les
cadavres. Des meurtres violents, mais pas forcément outranciers en
matière d'horreur. Si Scout Taylor-Compton assure son emploi
d'héroïne, elle a cependant bien du mal à nous faire oublier
l'interprétation de Jamie Lee-Curtis dans la version de 1978.
La
partition musicale a quant à elle été confiée à Tyler Bates, ce
qui n'empêche pas Rob Zombie de réemployer les plus fameux thèmes
composés à l'époque par John Carpenter lui-même. Accompagné par
le souffle inquiétant du boogeyman Halloween
version 2007 est beaucoup plus nerveux que son ancêtre. Incarné par
Tyler Mane, le Michael Myers de cette cuvée est un colosse de plus
de deux mètres qui en impose à l'écran. L’œuvre de Rob Zombie
s'inscrit également dans un contexte beaucoup plus réaliste en
apportant à l’esthétique générale un grain particulier grâce à
l'emploi du format 16mm. Le film n'évite pas les sempiternelles
scènes de cul, beaucoup plus explicites dans l'acte et dans le verbe
que par le passé. Rob Zombie a gagné le pari de dépoussiérer une
légende en l'améliorant sous tous ses aspects. Il part ainsi
rejoindre les quelques remakes de classiques de l'épouvante ayant eu
avant lui l'occasion de faire mieux que les œuvres originales (La
Colline a des Yeux
de Alexandre Aja l'année précédente). Un excellent slasher...
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