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mardi 7 décembre 2021

Saint Maud de Rose Glass (2019) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Il me semble parfois que le cinéma horrifique est en bout de course. Que l'on s'illusionne un peu trop systématiquement sur son devenir en espérant que remakes et Reboot suffiront à relancer éternellement la machine. Qu'en proposant dix fois, cent fois, mille fois le même programme, les spectateurs continueront de se déplacer dans les salles obscures pour payer le prix d'une place pour un film qu'ils auront déjà vu à de nombreuses reprises. Fantômes, tueurs en séries, créatures extraterrestres, monstres marins, maladies nous ont presque tout raconté sur l'état de panique dans lequel ils savent nous mettre nous, humains, dénués que nous sommes parfois de toute carapace émotionnelle ou physique. Mais alors, où chercher le terreau fertile de nos angoisses sinon dans une horreur concrète qui ne fait plus appel à un quelconque bestiaire fantastique ? Terminés depuis longtemps les Jumpscares. Ou ces hectolitres de sang qui remplacent en réalité la peur par le dégoût. Aujourd'hui, c'est à la psychologie que certains s'attaquent et gagnent le pari de rendre inconfortables certaines expériences de cinéma. David Cronenberg l'aura compris bien avant les autres. De la Body Horror, il glissa lentement vers quelque chose de plus pernicieux auquel on pourrait imaginer coller, pourquoi pas, l'étiquette de Brain Horror (Faux-semblants en 1988 ou bien Spider en 2002). La descendance aura pris la liberté de prendre plus ou moins son temps mais lorsqu'elle s'impose à nous, souvent c'est pour mieux nous dévorer le cerveau. Si en vérité, d'autres ont choisi et réussi à briser notre résistance psychologique face aux actes d'individus dont ils nous contèrent un petit bout d'existence (Schizophrenia de Gerald Kargl, 1983), il en est certains dont on a que trop peu parlé en dehors des cercles d'amateurs...


Qui entendra causer au sujet de The Girl Next Door de Gregory M. Wilson évoquera sans doute la comédie éponyme de Luke Greenfield sortie trois ans auparavant. Qui lira le synopsis de Dans ma peau de Marina de Van avant de l'avoir vu prendra ses jambes à son cou afin de fuir et n'aura sans doute pas davantage envie de découvrir Trouble Every Day de Claire Denis après être tombé accidentellement sur une séquence anthropophage particulièrement dérangeante. On parle actuellement beaucoup de la réalisatrice française Julia Ducournau, auteur de l'excellent Grave en 2016 et de Titane cette année. Peut-être la version féminine du belge Fabrice du Welz qui au cours de sa carrière n'a cessé (et ne cesse) d'affiner son approche de l'horreur psychologique même lorsqu'elle s'inscrit dans des genres aussi divers et théoriquement lointains que le drame ou le thriller (Alleluia en 2014 ou Adoration en 2019). Alors qu'elle n'a même pas atteint la trentaine, la réalisatrice britannique Rose Glass signait en 2019 avec Saint Maud une œuvre percutante, que l'on rangerait facilement du côté du Locataire de Roman Polanski (réalisé et 1976) ou du récent Knackningar de Frida Kempff pour leurs allures de longs-métrages dramatiques ''accentués'' par une approche faussement fantastique. La réalisatrice nous y raconte l'histoire d'une rencontre. Entre Maud (époustouflante Morfydd Clark), jeune aide à domicile à l'indescriptible foi en Dieu et Amanda (Jennifer Ehle), une ancienne danseuse atteinte d'un cancer condamnée à mourir prochainement. Lumières tamisées, décors sombres, ambiance emprunte de religiosité (d'un côté) et de perversité (de l'autre), Saint Maud déroule son scénario sans avoir l'air d'être autre chose qu'une histoire d'amitié entre une femme qui meure et une autre qui la soutien, la soigne, l'apaise. Une impression trompeuse comme semblent l'indiquer les premières images, malheureusement inutiles...


Loin de cette mode qui voudrait lister les choses à intégrer dans tout bon film qui honore la diversité et le respect de l'autre et de ses différences, Rose Glass oppose une jeune fille bien sous tous rapports, croyant avec ferveur en un Dieu qui la ''visite'' parfois et semble même lui faire l'amour, à une ancienne danseuse dont la ''perversité'' s'exprime à travers sa ''passion'' pour l'alcool et ses penchants sexuels ! On comprend tout d'abord où se situent le Bien et le Mal avant que la britannique ne vienne tout remettre en question, explosant les codes qu'elle a établi jusqu'à maintenant. Ajoutant au portrait glaçant et déroutant de Maud, celui, perverti, d'une femme qui n'a plus rien à attendre de la vie et se conduit alors de manière parfois odieuse, Rose Glass y ajoute un soupçon de fantastique. Un élément qui se justifie sans pour autant être la preuve que ce que nous montrent les images est bien réel. Saint Maud est une démonstration de force qui tenterait à prouver que l'horreur, la vraie, moderne et dérangeante ne se situe plus là où elle tente de nous mener de manière trop fréquente mais dans le visage de cette jeune femme vouant un culte à Dieu au point de s'y confondre déraisonnablement. D'ailleurs, est-il question de Dieu ? De Diable ? De simple croyance ? Ou tout simplement de folie ? Il y a des œuvres empruntes de mythologie qui vous marquent. L'exorciste de William Friedkin fut peut-être dans le genre, le premier en 1973. Puis vint quarante-trois ans plus tard, l'époustouflant The Strangers du sud-coréen Na Hong-Jin. Et enfin, sans doute, Saint Maud de Rose Glass, il y a deux ans. Une œuvre qui retourne les conventions (et notre cerveau) comme un gant...

 

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