Le temps... passionnant
sujet... Surtout lorsque certains se penchent dessus pour le
triturer, l'étirer, lui prêtant un attention toute particulière.
Dans ce domaine, les cinéastes ne sont pas les derniers à s'y
employer. Qu'il s'agisse de révéler des faits historiques faisant
éternellement partie du passé ou bien en imaginant un futur très
lointain et idyllique (Star Trek) ou proche et
dystopique (Soleil Vert, Brazil, Les
Fils de l'Homme, Never let Me Go, The
Lobster, pour ne citer que quelques exemples), beaucoup s'y
sont attelé avec plus ou moins de bonheur. Mais s'il y a un aspect
du sujet qui demeure aussi passionnant qu'imaginer à quoi pourrait
ressembler notre futur, c'est le voyage dans le temps. Lui, et ses
ersatzs que son les boucles et les paradoxes temporels. Before
I Fall, Happy Birthdead et The
Cloverfield Paradox abordent chacun à leur manière un thème
qui forcément, attisent l'appétit des amateurs de science-fiction
et de voyages dans le temps. Le premier s'inscrit dans le registre du
teen movie. Autrement dit, le film d'adolescent, qui dans une
grande majorité est adressé à un public dont l'âge oscille en
douze et dix-sept ans. Pas très sérieux, donc, d'infliger à un
sujet aussi prenant, un cadre aussi puéril. D'autant plus que le
film de la réalisatrice américaine Ry Russo-Young véhicule des
messages d'une mièvrerie confondante. Du style : c'est pas beau
d'être méchant et ne pas dire ce que l'on ressent pour ses proches
également ! L'exercice de style étant délicat et Un
Jour sans Fin de de Harold Ramis avec l'excellentissime Bill
Murray demeurant la référence ultime, Before I Fall se
révèle largement en dessous de la référence en matière de boucle
temporelle.
Pire, le principe de journée se répétant indéfiniment aurait dû
servir à la cinéaste mais l'utilisation mal abordée de points de
vue et d'événements différents occulte toute forme de
divertissement. Alors que l'on aurait aimé assister à la mise en
place de situations ponctuelles rappelant que l'héroïne se situe
dans un contexte de boucle temporelle, la cinéaste préfère
bousculer les conventions en offrant à son héroïne la possibilité
de bouleverser totalement le déroulement de sa journée. A vrai
dire, cette boucle temporelle se terminant invariablement par un
accident de voiture ressemble davantage à une succession de journées
n'ayant scénaristiquement parlant, que peu de rapports entre elles.
Happy Birthdead
part,
lui, d'un même principe. La boucle temporelle étant l'axe autour
duquel tourne l'intrigue de ce long-métrage signé par le cinéaste
américain Christopher B. Landon (qui n'est autre que le fils de
Michael « Charles
Ingals »
London), et les personnages étant à peu de chose près les mêmes
que ceux évoqués dans Before I Fall,
il y a de quoi s'inquiéter. Surtout si le visionnage des deux
longs-métrages est effectué consécutivement.
Pourtant, là où pêche le film de Ry Russo-Young, Christopher B.
Landon s'en sort, lui, plutôt brillamment. Point, ou si peu de
morale, mais un récit s'inscrivant dans un thriller en mode
« slasher »
avec pour héroïne, une jeune étudiante traquée par un tueur
masqué qui, le soir, la tue de plusieurs coups de couteau. Mais
alors que l'histoire aurait pu s'arrêter là, la blonde Tree Gelbman
se réveille systématiquement dans le lit d'un garçon rencontré la
veille au soir durant une fête alcoolisée. Alors qu'elle croit
avoir rêvé la journée de ses dix-huit ans se terminant par sa
mort, Tree constate très vite que ce jour très particulier ne fait
que se répéter. L'occasion s'offre à la jeune étudiante de
rechercher l'auteur de son propre assassinat afin que le temps
reprenne normalement son cours...
Autant
le dire tout de suite, les meurtres, principal intérêt des slashers
du type Vendredi 13,
Halloween
et consorts, ne sont pas ici l'objet principal du récit. Christopher
B. Landon s'attarde surtout sur le phénomène de boucle temporelle
en intégrant à l'intrigue toute une série d'événements qui vont
se répéter chaque fois que la même journée se répétera pour
l'héroïne. Et ce, dans des conditions sensiblement différentes,
permettant ainsi de faire évoluer le récit jusqu'au dénouement. Si
les plus attentifs remarqueront qu'en terme de timing, il demeure
quelque défauts dans la mise en place de certaines situations
(lorsqu'un matin Tree quitte la chambre de Carter plus tôt que la
veille, sa rencontre avec les événements déjà rencontrés les
jours passés devraient s'en trouver décalés), Christopher B.
Landon nous offre cependant un spectacle fort réjouissant, mélange
d'épouvante, de fantastique et de comédie. Happy
Birthdead
est une relecture du classique de Harold Ramis à la sauce épouvante.
Une réussite.
The Cloverfield
Paradox,
quant à lui, explore le thème passionnant du paradoxe temporel mais
sous un jour radicalement différent. Ici, il n'est plus question
d'un événement se répétant indéfiniment mais d'un voyage dans un
univers parallèle proche de celui de ses héros. C'est un accident
survenu à bord de la station spatiale internationale Cloverfield qui
provoque cette faille spatio-temporelle dont les répercussions aussi
bien désastreuses qu'incroyables vont avoir des conséquences
inattendues sur les membres de l'équipage. Le cinéaste Julius Onah
évoque l'effondrement d'un univers sur un autre, les deux se mêlant
et provoquant ainsi des événements spectaculaires.
Si
le lien avec les deux précédents volets de la saga Cloverfield
est ténu (Cloverfield
en 2008, et 10 Cloverfield Lane
en 2016), quelques éléments viendront pourtant corroborer la
paternité des uns et des autres, le tout semblant alors former une
trilogie finalement assez peu homogène. Les personnages constituant
l'équipage de Cloverfield étant d'origines diverses, on a
logiquement droit à quelques dératés comportementaux. Et comme si
cela ne suffisait pas, le film se transforme en un ersatz d'Alien,
sans alien, mais avec des course-poursuites dans les coursives de la
station saupoudrées de quelques scènes d'horreur plutôt
originales.
En
fait, on a surtout l'impression que le cinéaste profite du succès
et de la renommée de la franchise pour lancer son propre projet. Si
dans le fond The Cloverfield Paradox se
laisse plaisamment suivre, on ne peut pas dire qu'il demeure pour
autant exemplaire dans la forme. Parfois bavard et bien moins
ambitieux que ne le laissait présager son sujet, le film de Julius
Onah est peut-être le plus faible de la saga...
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