Que peuvent avoir en commun un catcheur qui se prépare à monter sur le ring et un homme affligé d'un quotient intellectuel terriblement bas? Qui ou quoi peut relier ces deux êtres dont les intérêts n'ont apparemment eux non plus aucun rapport? D'un côté, le Mexique. Le catcheur va bientôt rejoindre le ring sur lequel il parviendra ou non à prouver ce que, désespérément, son fils tente de prouver à ses camarades de classe. Que la véritable force est celle de l'esprit. De l'autre, un lieu dont la situation reste floue. Une pièce d'une blancheur immaculée, gardée par une armée d'anges dont seul leur petit sexe dépasse du sol et des murs. Et puis un homme. Vêtu d'un accoutrement aux couleurs aussi chatoyantes que celles d'une tenue d'enfant. Un esprit faible, pur, et encore protégé de la perversion du monde moderne. Après s'être assurés de son éveil, la myriade d'anges s'évapore derrière les murs et ne laissent à cet homme que leur sexe en guise de "buzzer" organique. Des excroissances qui, lorsque l'homme appuie au hasard sur l'une d'elles, donne naissance à des objets aussi divers qu'un banzaï, une jarre, un guerrier massaï ou encore une assiette de tofu. L'une d'elles promet même une issue à cette salle de jeu faussement chaleureuse. Mais l'homme n'est pas encore prêt. Il va lui falloir s'éduquer. Tout seul, il va apprendre à combiner ces drôles de boutons péniens afin de parvenir jusqu'au moment de liberté tant désiré. Pendant ce temps là, notre ami catcheur part vers son destin. Accompagné par sa fille, une bonne sœur qui n'hésite pas à continuellement engueuler les personnes qu'elle croise sur sa route, il arrive au vestiaire, se change, et attend que son retentisse dans la grande salle où les spectateurs s'entassent. Son fils est là. Il est inquiet pour son père. Il espère que le combat se passera bien pour lui.
Mais pour cela, faudra-t-il encore que le doux dingue enfermé dans la grande pièce blanche parvienne à apprendre assez pour comprendre pleinement la mécanique des lieux. Car c'est là que se joue véritablement le destin de notre catcheur. Le sien, et peut-être même celui de l'humanité toute entière...
Symbol de Hitoshi Matsumoto n'est définitivement pas un film comme les autres. Affublé d'une esthétique minimaliste et séduisante, il porte effectivement en lui toute une série de symboles qu'il serait sans doute vain de capter dès la première projection. Si l’œuvre est différente de tout ce que nous avons pu voir jusqu'à maintenant, il ne faut pas avoir peur de se lancer dans l'aventure. Car même s'il peut arriver que l'on craigne un éventuel ennui devant des scènes dont la paresse peut redouter, c'est au fil de ce jeu de réflexion dont est le principal (et le seul) joueur cet homme que l'on finira par découvrir ce qui se trame véritablement derrière une histoire quelque peu alambiquée. Les plus réticents devront sans doute passer le cap du quart d'heure (voire de la demi-heure) pour saisir enfin le sens de cette fable poétique. L'apprentissage et l'entraînement sont les bases de l'enseignement que devra acquérir cet homme pour que les espoirs mis en lui aient une chance d'aboutir.
Symbol n'est pas qu'une œuvre philosophique. C'est aussi une comédie diablement amusante. Alors qu'il apprend l'obéissance et la patience durant la scène de repas de tofu, on devine assez nettement le but de ceux qui le guettent d'en haut. Le voir réclamer comme un enfant de la sauce-soja pour accompagner ses tofus et être exaucé seulement après les avoir tous englouti est drôle, assurément. Et que dire de cette scène à rallonge terriblement ludique durant laquelle l'homme fait preuve d'une jugeote acquise durant son apprentissage , et qui le voit réfléchir sur un moyen de passer la porte de sortie avant qu'elle ne se referme sur lui ? Un vrai jeu de réflexion s'engage entre ces vicieux petits anges qui "pètent" devant certains échecs et cet homme convaincu de devoir trouver une issue lui permettant de quitter cette cage dorée dans laquelle il est enfermé depuis bien trop de temps. On aime ou pas le décor épuré des passages qui le mettent en scène et qui tranche avec le quotidien presque banal du catcheur et de sa famille.
On apprécie également la folle montée en puissance de la fin du film (que l'on gardera secrète pour n'en dévoiler aucun secret), d'un point de vue visuel, et qui rappellera (vaguement) l'extraordinaire beauté de la fin de l'excellent The Fountain de David Aronovski.
Symbol est donc un film stupéfiant (dans tous les sens du terme), visuellement irréprochable (effets-spéciaux numériques minimalistes mais néanmoins remarquables) et doté d'idées fameuses. A voir pour découvrir. A revoir pour en saisir toutes les subtilités.
Tu vends très bien le film en tout cas : j'ai bien envie de me le visionner... :D
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