Si l'on pouvait graver
sur l'une des façades de la tour Montparnasse, de bas en haut, en
partant de la base, et à l'aide d'une taille de police de caractère de douze la
totalité des œuvres consacrées aux morts-vivants, la surface
contiendrait sans doute TOUT JUSTE la place suffisante à les
référencer toutes. C'est vrai, le film de zombies et devenu le sujet
de tellement de longs-métrages que l'on ne sait plus vraiment où
donner de la tête. Entre les chefs-d’œuvre du genre (La
Nuit des Morts-Vivants et Zombie en tête) et
l'effrayante quantité de nanars (trop nombreux à lister), beaucoup
ont choisi de s'engouffrer dans la brèche. Avec plus ou moins de
bonheur. Et notamment un cinéaste bien connu des amateurs de films
d'horreur et de fantastique. L'américain Bob Clark, qui perdit la
vie lors d'un accident de voiture en compagnie de son fils en avril
2007, a signé durant sa carrière, quelques films devenus avec le
temps, des classiques. Considéré comme le père du Slasher avec son
Black Christmas signé en 1974, il a confronté
Sherlock Holmes à Jack L’éventreur dans Meurtre par Décret
en 1979. Mais si le cinéaste nous intéresse aujourd'hui, c'est pour
deux de ses premiers films. Dans l'ordre chronologique, le troisième
et le quatrième. Deux films de zombies donc. Mais surtout deux
œuvres totalement en marge du genre. Pour commencer, Children
Shouldn't Play with Dead Things daté de 1972 (chouette!
L'année de ma naissance).
Bob Clark s'inspire du
classique en noir et blanc de George Romero cité plus haut. Une
œuvre indémodable, inattaquable, intemporelle. J'avoue que sans le
générique égrainant le nom des interprètes, de l'équipe
technique et du réalisateur (ici BenJAMIN Clark), j'aurai pu croire
à une œuvre du cinéaste José Mojica Marins, l'auteur du
cultissime À minuit, je possèderai ton âme. Un
cimetière, de nuit, plongé dans la brume, et surtout une
silhouette, vêtue d'un haut de forme et d'une cape.
Alors,
Children Shouldn't Play with Dead Things,
film culte ou pas film culte ? Oui... et non. Mais non... et
oui. En fait, on peut distinguer deux étapes dans cette bande qui
fleure bon l'amateurisme. La première, et malheureusement la plus
longue, n'apporte absolument rien en terme d'intrigue. Pourtant, si
on se réfère au synopsis, Children Shouldn't
Play with Dead Things a
l'air plutôt sympa. Une troupe de théâtre (en fait, une bande
d'allumés apparemment sous acide) débarque sur une île afin d'y
répéter une pièce dont l'un des moments clés est la résurrection
de cadavres enterrés non loin de là dans un cimetière.
Incantations et dialogue stériles sont au menu. Ces derniers étant
proprement chiants et déblatérés par la plupart des acteurs
(amateurs) sur un rythme terriblement lent. Seule l'une des actrices
semble habitée par son personnage (une descente d'acide?). Dans la
peau d'une comédienne jouant dans un registre shakespearien, elle en
fait des tonnes, exprimant physiquement la douleur psychologique
éprouvée par son personnage. Si dans ce contexte amateur elle
n'avait pas l'air si navrante, elle serait demeurée touchante.
Durant une heure, Children Shouldn't Play with
Dead Things n'est
que dialogues roboratifs MAIS aussi et surtout, redondants. Ça sent
l'improvisation. Le jeu des interprètes est vraiment poussif et l'on
n'est pas loin d'avoir envie de mettre un terme à cette mascarade.
Une
heure que cela dure jusqu'au moment où le miracle agit enfin. C'est
ainsi que la seconde partie du film de Ben Clark débute. Ceux que
l'on attendait arrivent enfin. Et l'on se dit que le calvaire que
l'on vient de vivre valait vraiment le coup. Le cinéaste transforme
un long-métrage inintéressant en un monument gothique, d'une
stupéfiante noirceur. Mais ne vous affolez pas, cela ne va pas durer
très longtemps. Alors profitons de ces quelques moments de grâce
durant lesquels, travelling après travelling, tous entrecoupés de
scènes toujours aussi démesurément chiantes, Ben Clark filme dans
une brume inquiétante ses morts sortant de terre. C'est beau,
sombre, morbide et filmé avec une telle efficacité, qu'on en
oublierait PRESQUE tout ce qui a précédé et ce qui va suivre. En
réalité, Children Shouldn't Play with Dead
Things n'est
culte que pour ces quelques trop courtes séquences. L’œuvre de Bob Clark
n'aurait dû voir le jour que sous la forme d'un court-métrage.
Alors culte ou pas ? Le film étant parasité par tellement de
scènes inutiles et par si peu de réussies que je dirais...non, pas
culte. Juste étonnant...
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