Démarrage d'un court
cycle consacré au réalisateur espagnol Jesús Franco Manera plus
connu sous le nom de Jess Franco. Nous allons débuter avec Les
Démons
datant de 1973. Réalisateur frénétique, amateur d'horreur et
d'érotisme, grand pourvoyeur de séries Z, Jess Franco signe cette
année là l'un de ses meilleurs longs-métrages. Du moins, l'un de
ceux qui paraissent visuellement les plus maîtrisés et donc, les
plus intéressants d'un point de vue technique. Surtout, le film
s'inscrit au cœur d'une trilogie consacrée à l'inquisition.
Effectivement, trois ans auparavant il aura signé Le
trône de feu et
reviendra sur le sujet en 1977 avec
Lettres d’amour d’une nonne portugaise.
Nous retrouverons d'ailleurs dans le premier l'un des charismatiques
antagonistes des Démons
en la personne du juge George Jeffreys. Un authentique personnage
historique ayant vécu au dix-septième siècle où il fut membre du
Conseil privé avant de devenir Lors Chancelier sous le règne de
Jacques II. Surnommé le ''Juge
qui pend'',
c'est bien de lui dont il s'agit ici et non pas de son homonyme qui
vécut entre la fin du dix-neuvième siècle et le milieu du
vingtième et qui lui fut un célèbre évangéliste, leader du
mouvement de Pentecôte. Incarné dans Les démons
par l'acteur sud-azerbaïdjanais Cihangir Gaffari (qui apparaîtra
notamment dans la série télévisée britannique Dick
Turpin
restée célèbre chez nous sous le titre Dick le
rebelle),
il fut à l'origine incarné par Christopher Lee dans Le
trône de feu.
S'inscrivant
dans toute une série de films basant leur thématique sur
l'inquisition, donc, et malgré le soin apporté à la mise en scène,
le long-métrage de Jess Franco a bien du mal à s'aligner face aux
mastodontes du genre que représentent Le grand
inquisiteur
de Michael Reeves réalisé en 1968, La marque du
Diable
que tourna Michael Armstrong en 1970 ou le chef-d’œuvre absolu du
genre que s'avère être Les diables auquel
donna naissance le réalisateur Ken Russell en 1971. Pourtant, on ne
se plaindra pas trop du résultat qui s'affiche à l'écran puisque
si Les démons
n'est très clairement pas un grand film, on sent bien que Jess
Franco y a mis tout son potentiel créatif . Les décors se situent
au sein d'un monastère où vivent enfermées des nonnes et où sont
pratiquées dans l'indifférence presque générale, des tortures sur
celles qui sont soupçonnées d'être des sorcières. En effet, le
film s'ouvre sur le procès d'une vieille femme. Reconnue comme
faisant partie de l'une d'elles, elle est brûlée sur le bûcher
mais a le temps de prononcer une malédiction à l'attention des
trois personnalités qui l'ont condamnée : Lord Justice
Jeffries (Cihangir Gaffari, donc, qui à cette occasion usa de l'un
de ses pseudonymes, John Foster), Thomas Renfield qu'incarne Alberto
Dalbés, mais aussi et surtout Lady de Winter qu'interprète
l'actrice Karin Field. Un visage angélique mêlé de perversité
dont le personnage fait preuve d'une moralité plus que douteuse.
Excitée par les tortures infligées, s'offrant à son amant Thomas
Renfield et s'adonnant tout autant au saphisme, la jeune femme se
rend au couvent de Blackmoor où sont supposées être Kathleen et
Margaret, les filles de la sorcière brûlée récemment et dont le
destin sera de tuer les trois bourreaux de leur mère...
D'une
durée avoisinant les deux heures, Les démons
est une co-production franco-portugaise qui sans doute aurait mérité
d'être quelque peu élaguée. Trop long et donc parfois très
ennuyeux, le film bénéficie cependant d'un budget relativement
confortable qui se voit à l'écran. Les paysages extérieurs bien
que rarement exploités sont souvent magnifiques. Quant au village et
surtout le couvent dans lequel le film situe la plupart des
séquences, ils n'ont absolument pas à rougir face à la
concurrence. Les décors parviennent à rendre crédible cette chasse
aux sorcières perverse à la tête de laquelle trône l'actrice
Karin Field, véritable garce, sadique, licencieuse, se complaisant
comme pas mal des personnages d'ailleurs, dans la luxure. D'où un
certain nombre de séquences érotiques justifiant la présence
d'actrices plutôt remarquables parmi lesquelles nous retrouvons la
belge Anne Libert et la portugaise Britt Nichols, deux fidèles
interprètes du réalisateur espagnol. Tout ou presque n'est que
prétexte à foutre à poil telle ou telle actrice. Qu'il s'agisse de
lui demander de faire l'amour avec l'une de ses ''camarades'' ou lors
de tortures dont on aurait sans doute aimé que ces dernières se
montrent beaucoup plus cruelles et sanglantes, les interprètes
féminines passent davantage de temps dénudées qu'habillées de
l'une des tenues d'époque. On s'amusera par contre cependant de la
musique signée de Jean-Bernard Raiteux qui parfois s'éloigne de la
thématique pour nous offrir des plages de rock psychédélique qui
n'ont rien à voir avec le contexte mais créent un climat délirant
que l'on ne reprochera malgré tout pas au film de Jess Franco. Au
final Les démons
doit s'envisager comme une sympathique alternative aux classiques
évoqués plus haut. Une œuvre qui souffre d'une lenteur
relativement importante, bénéficiant de nombreuses séquences
érotiques qui satisferont les amateurs du genre mais qui manque par
contre d'hémoglobine...
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