Une fois encore, Gérard
Oury nous refait le coup de la comédie d'aventures. Si le
réalisateur et scénariste s'était montré particulièrement
efficace en 1965 avec Le corniaud,
c'était déjà beaucoup moins évident avec La
vengeance du serpent à plumes dix-neuf
ans plus tard. Mais alors, avec Vanille Fraise,
nous touchons véritablement le fond. Catherine Deneuve, à ce sujet,
eu le nez fin en refusant d'interpréter le rôle que s'est empressée
ensuite d'accepter à sa place Sabine Azéma. L'avantage avec des
films tels que Vanille Fraise
est que l'on peut vaquer à d'autres occupations sans avoir vraiment
à se concentrer sur l'intrigue vu que son intérêt se situe entre 1
et 2 sur une échelle de 20 ! Monter le son pour s'en servir de toile
de fond, voilà qui devrait suffire ! Auquel cas, profitons-en pour
faire un peu de ménage, dresser la liste des courses à faire le
jour même, vérifier notre solde bancaire ou, dans le meilleur des
cas, nous endormir pour n'être réveillés qu'une fois le générique
de fin achevé. À une époque pas si lointaine puisque ne remontant
qu'à trois ou quatre heures, je n'aurais pas parié un kopeck sur le
fait que Gérard Oury pouvait tomber encore plus bas qu'avec La
vengeance du serpent à plumes
ou La soif de l'or.
Et pourtant, tel est le cas avec cette comédie aussi peu innovante
que pourrait l'être le retour de la cassette audio sur le marché de
la musique. Avec ses violons synthétiques dignes de figurer parmi
les chutes de la bande-originale de Bad Taste, sa tribu d'acteurs
secondaires qu'on imaginerait plutôt découvrir dans de minables
sitcoms (le couple de touristes attablé devant une glace) ou ses
principaux interprètes venus prendre ici le risque de mettre leur
carrière en péril, on tient sans doute avec Vanille
Fraise
le plus mauvais film de son auteur. Le long-métrage révèle au
moins une chose fondamentale : qu'il ne faut surtout pas confier à
Pierre Arditi la lourde tâche d'incarner à l'écran un homme pris
de boisson. En effet, il suffit de le voir se faire passer pour un
époux ivre pour comprendre que quelque chose ici ne va pas. Comment
même un authentique interprète comme lui peut-il être mauvais à
ce point ?
Aux
côtés des époux Boulanger qu'il forme avec Sabine Azéma l'on
retrouve l'acteur ivoirien Isaach de Bankolé qui dans les années eu
son heure de gloire auprès du public français avec Black
Mic-Mac
de Thomas Gilou et Les keufs
de Josiane Balasko. Bien qu'il se soit apparemment fait rare au
cinéma, il suffit d'aller consulter sa filmographie pour constater
qu'il n'en est rien. Bien au contraire puisqu'il fut notamment au
générique du formidable Ghost Dog : la
voie du samouraï
de Jim Jarmusch en 1999, de Miami Vice : Deux
flics à Miami de
Michael Mann en 2006 ou dans les deux films de ''Blaxploitation''
américains
signés de Ryan Coogler, Black Panther
et Black Panther: Wakanda Forever signés
en 2018 et en 2022 ! Ou comment avoir réussi à se refaire une santé
dans le cinéma, le vrai, après s'être fourvoyé dans la comédie
la plus niaise que le cinéma français soit capable de charrier.
Inspiré d'un fait-divers authentique ayant eu lieu le 10 juillet
1985 et lors duquel le navire amiral de Greenpeace connu sous le nom
de Rainbow Warrior
finissait sa carrière sous les eaux du port d’Auckland à la suite
d'une explosion criminelle, Vanille fraise
ressemble davantage à une autre comédie française sortie sur les
écrans deux ans plus tard. La totale ! de
Claude Zidi qui, sans être un classique, demeure malgré tout très
au dessus de l’œuvre de Gérard Oury. Vingt-quatre ans après Le
corniaud,
Gérard Oury reprend la route pour l'Italie mais signe cette fois-ci
une triste comédie, très anachronique et donc largement dépassée.
Un ersatz plus proche du théâtre de boulevard où les interprètes
(surtout Pierre Arditi, encore lui) en font des caisses, tentant
ainsi vainement d'amuser la galerie. Bourré de clichés
qu'aujourd'hui personne n'oserait mettre en avant de peur d'être
''décoré'' de tout un tas de pompeux substantifs (pour exemple, le
personnage de Hippolyte N'Go qu'incarne Isaach de Bankolé est,
EVIDEMMENT, polygame). Deux ou trois ans en arrière, nous pouvions
encore nous poser des questions quant aux capacités réelles de
Gérard Oury à se renouveler. Mais cette fois-ci, c'est certain :
le bonhomme, à l'orée des années quatre-vingt dix semble bloqué
dans le passé. Navrant...
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