Pauvre Juliette Danielle. Cette toute jeune actrice américaine
originaire de Fort Smith dans l'Arkansas ne se doutait sans doute pas
qu'elle débuterait sa carrière d'actrice dans l'un des plus grands
fleurons du nanar aux côtés de l'intriguant acteur, scénariste,
producteur et réalisateur Tommy Wiseau. Un type
étrange que ce bonhomme qui a toujours refusé de donner la date
précise de sa naissance. Un individu foncièrement louche qui aurait
d'abord grandit « quelque part »
dans le bloc de l'Est avant de venir s'installer en France à
Strasbourg. Il aurait quitté le pays après avoir été impliqué
dans une histoire de drogue et serait finalement venu s'échouer aux
États-Unis où il débuta donc une carrière de cinéaste après
avoir accumulé un certain nombre de petits emplois.
The
Room, car il s'agit ici du sujet,
est considéré dans son pays comme une œuvre culte. Mais
certainement pas pour ses qualités (on en cherche encore les traces)
mais pour son incommensurable médiocrité. Comme vous pourrez le
constater sur les photos qui suivent, Tommy Wiseau accumule les
professions d'acteur, scénariste, producteur et réalisateur.
Enfin... comme cela était signifié un peu plus haut... !
Pauvre Juliette Danielle qui, outre cet accident de parcours
professionnel à vu sa toute première scène (ou presque) se
terminer dans le lit de Johnny, le personnage incarné par Tommy
Wiseau lui-même. A croire que l'acteur-réalisateur avait très
envie de coucher avec la belle. Cette première scène d'amour,
avouons-le, demeure assez triste. Pour ne pas dire, sinistre. Depuis
les quelques minutes que le film a commencé, on a la désagréable
impression d'assister aux ébats d'une jeune et jolie jeune blonde,
clone légèrement bouffi de la chanteuse Britney Spears, et de son
compagnon, un individu très étrange. Un homme à la chevelure
sombre et bouclée (apparat généralement hautement persuasif) mais
au masque mortuaire tétanisant. En effet, Tommy Wiseau semble
totalement incapable d'exprimer la moindre émotion. Qu'il s'agisse
pour son personnage de manifester des humeurs telles que la joie, le
plaisir ou le bien-être, Tommy Wiseau ressemble davantage au gardien
de nuit d'une morgue qu'au romantique auquel il prétend appartenir.
Juliette Danielle dans les bras de l'acteur-réalisateur, c'est un
peu comme de jeter un chat dans une fosse remplie de milliers de rats
affamés (inspiration provenant du traumatisant Camp
731).
Concernant
les autres personnages, on a droit à la mère vieillissante de Lisa
(Juliette), peroxydée, brushing... « dictatorial »,
et morale douteuse. Des leçons, elle en donne à sa fille, et pas
des plus ragoutantes. Tu n'aime plus ton homme ? Et bien
épouse-le. N'oublie pas qu'il est blindé et que sans son argent, tu
ne peux survivre par toi-même. Les conseils de Claudette (Carolyn
Minnott) ressemblent à peu de chose près à ça. Pas de quoi
ressentir de la sympathie pour ce personnage. Ensuite, il y a Mark,
le meilleur ami de Johnny (l'acteur et producteur exécutif Greg
Sestero, meilleur ami de Tommy Wiseau dans la vie). S'il possède
davantage de charme que son concurrent direct, son interprétation
montre des failles en matière de calibrage : en clair, Sestero
joue comme un pied.
Vous
allez sans doute penser que je suis dur, mais lorsque vous aurez
compris à quel point j'attendais de pouvoir découvrir The
Room et
à dans quelles mesures je rêvais d'en extraire un article, et ce
tout en ayant parfaitement conscience qu'il s'agit d'un pur navet,
sans doute me pardonnerez-vous alors. The
Room,
c'est un rêve qui prend forme après plusieurs années d'attente. La
légende entourant ce long-métrage et son auteur étaient telles que
j'étais impatient de pouvoir me faire ma propre opinion tout en
espérant honteusement ressentir les mêmes sentiments que ceux que
le film continue à faire rire bien des années après qu'ils l'aient
découvert. Une œuvre bouleversante de médiocrité que son auteur
eut le toupet de tenter de sauver du naufrage en osant affirmer que
les grossières erreurs de réalisation faisaient elles-même partie
du script. Faut-il s'appeler Wiseau pour croire à tel mensonge ?
A telle tentative désespérée pour sauver un film condamné à
finir sa vie dans les catégories les moins reluisantes pour un
auteur qui espérait probablement finir au panthéon du septième
art ?
La première scène...
d'amour (c'est bête, mais j'ai du mal à y croire, et même à
l'écrire) passée, on comprend qu'après cinq années de vie
commune, Lisa n'aime plus son compagnon. Dans le monde concret qui
est le notre, il demeure impensable qu'une idylle puisse être
possible entre cette jeune et jolie femme, douce et sensible, qui a
tout juste atteint la majorité quatre ans plus tôt, et ce type
flippant, dont la quête de séduction est vaine. Je veux parler du
charme qu'il tente, par personnage interposé, de transmettre aux
spectateurs. Je vous jure, Tommy Wiseau est SU-PER FLI-PPANT !!!
Le plus grave, c'est qu'à travers même son interprétation, on sent
tout l'orgueil et la prétention du bonhomme. Et là, on ne parle
même plus de Johnny le compagnon bafoué, mais de Tommy, l'auteur
chaussant un costume bien trop large pour ses épaules.
Et hop, après seulement
quinze minutes de long-métrage, deuxième scène de sexe entre Lisa
et... Mark, son amant. Tommy Wiseau, l'artiste, le chorégraphe, le
styliste apporte toute sa sensibilité et fait de cet acte un
exercice de style digne des softcores diffusés sur M6 le dimanche
soir. A propos d'acte sexuel, j'oubliais de préciser le ridicule de
celle qui ouvrait The Room. Selon toutes
vraisemblances, Tommy Wiseau a un sérieux soucis avec l'anatomie
féminine. Et cela peut s'expliquer de deux manières différentes.
Soit il n'a pas la moindre connaissance sur le sujet et pour lui, le
nombril représente l'ancrage naturel par excellence en matière de
plaisir. Soit il ne supporte tout simplement pas l'idée d'un contact
direct entre le pubis de sa partenaire et le sien. En conséquence de
quoi, on assiste à un coït à mourir de rire. Si l'on ne
sentait pas Tommy Wiseau aussi préoccupé par sa seule prestation
(faut le voir tirer la gueule lorsque l’œil de l'objectif ne se
concentre plus sur lui mais sur ses partenaires), l'acteur,
scénariste, producteur et réalisateur nous arracherait presque des
larmes de pitié.
En mon âme et
conscience, je ne peux décemment pas aborder The Room
sans évoquer Denny, le personnage interprété par Philip Haldiman.
Un jeune handicapé mental, ami du couple formé par Lisa et Johnny.
Handicapé ? C'est à dire ? Trisomique ?
Maniaco-dépressif ? Autiste ? Schizophrène ? Ou bien
est-il simplement atteint d'un léger retard mental ? Rien ne
laisse présager d'aucune forme d'atteinte mentale. Surtout pas
l'apparence de l'acteur. Tout au plus son personnage aime grimper les
marches de l'escalier menant à la chambre où Lisa et Johnny ont
proféré le désir de faire l'amour. Toujours est-il que certaines
de ses apparitions n'ont aucun rapport avec l'intrigue (?) du film et
n'ont, surtout, pas le moindre intérêt. Sa présence servant à
rallonger artificiellement la durée de l’œuvre de quelques
minutes seulement, on le voit par exemple venir sonner à la porte du
couple, être reçu par Lisa, et repartir aussitôt après s'être
rendu compte de l'absence de Johnny... ?!?!?!
Des situations comme
celle-ci, The Room en compte des dizaines. Le scénario
tenant sur la fine tranche d'une feuille de cigarette, on passe plus
de temps à regarder sa montre qu'à prendre un réel plaisir à voir
déambuler un Tommy Wiseau borderline. Je ne sais absolument pas
quelle drogue il emploie, mais il a chaque fois l'air défoncé, le regard
ailleurs, totalement perdu dans des pensées connues de lui seul. The
Room est terriblement répétitif et le récit n'est situé
que dans deux seuls et pauvres décors. Le salon de l'appartement des
deux principaux protagonistes et le toit de l'immeuble qui les
abrite. On notera également la curieuse attitude des personnages
passant d'un caractère très violent à une douceur subite et
incompréhensible. The Room a
en tout cas largement gagné ses gallons de nanar culte. A regarder
avec modération cependant...
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