Jusqu'à ce que débarque
en salle le 28 septembre dernier le premier long-métrage du
réalisateur, scénariste et dialoguiste français Brieuc Carnaille,
celui-ci n'avait œuvré que dans l'écriture, et ce, à une seule
occasion. Auteur en 2010 du scénario de L'étranger
de Franck Llopis, Brieuc Carnaille n'avait plus fait parler de lui
jusqu'à son retour douze ans plus tard. Et lorsque l'on découvre
son véritable premier projet en tant que scénariste (aux côtés de
Clément Roussier) et de réalisateur intitulé Le
Soleil de trop près,
on ne peut que regretter qu'il ait tardé à se lancer dans une
carrière de cinéaste. Si le thème de la schizophrénie revient
régulièrement sur le devant de la scène, rares auront été les
réalisateurs capables d'aller aussi loin dans le réalisme de cette
terrible maladie. Le Soleil de trop près
s'intéresse au personnage de Basile, jeune homme qui vient de passer
un long séjour en hôpital psychiatrique et qui à sa sortie part
s'installer chez sa sœur Sarah (l'actrice et mannequin Marine
Vacth). Contraint de suivre un traitement médicamenteux relativement
lourd et d'assumer de se rendre régulièrement auprès du
spécialiste qui le suit, Brieuc Carnaille fait tout d'abord
apparaître Basile comme un simple affabulateur, un original qui
pour draguer les filles s'invente une vie qui ne lui appartient pas.
Mais alors que le traitement qu'il prend ne semble pas avoir beaucoup
d'effets sur sa maladie, le caractère étonnant de celui qui
s'apparente au premier abord à un innocent mythomane révèle en
réalité un mal beaucoup plus inquiétant. Si quelques séquences
permettent de mieux cerner la maladie dont est atteint le personnage
central du récit, le réalisateur octroie une place importante au
sein de l'étrange duo que forment Basile (Clément Roussier) et sa
sœur Sarah. Une ambiguïté qui s'explique naturellement puisque
leurs parents ne sont plus là même si le trouble s'installe parfois
au sein de ce couple qui n'en est pas vraiment un puisque la jeune
femme vit également sous le même toit que son compagnon Nassim
(Hakim Faris)...
La
comparaison avec l'inconfortable Préjudice
d'Antoine
Cuypers, autre cinéaste relativement rare, est inévitable puisque
le long-métrages traitait déjà sept ans en arrière des
implications de vivre auprès d'un malade atteint de schizophrénie.
Nathalie Baye dans le rôle de la mère sacrifiait sa propre
existence au profit de son fils Cédric (Thomas Blanchard). Un
cauchemar authentiquement bouleversant qui trouve désormais son
pendant à travers l’œuvre de Brieuc Carnaille et surtout,
l'interprétation de Clément Roussier qui en pseudo Albert Dupontel
incarne un Basile tour à tour attachant et inquiétant. Le film
annonce les crises à venir à travers une image épileptique et un
Basile dont les propos deviennent violents et incohérents. On
n'oubliera pas de si peu la performance du jeune acteur dont la
carrière vieille de douze ans n'est pour l'instant constituée que
d'une dizaine de téléfilms, épisode de séries télévisées,
courts et longs-métrage. Sobre mais parfois glaçant, Clément
Roussier explore toutes les étapes de la maladie. Entre les passages
d'accalmie lors desquels l'homme est capable de tenir une
conversation téléphonique au sein de l'entreprise qui l'emploie, la
relation nouvelle qu'il va entretenir auprès d'Élodie (Diane
Rouxel) et de son fils Léo (le tout jeune Léon Durieux), et ces
séquences effroyables et pesantes qui décrivent cette maladie qui
fait si peur. Le spectateur tangue alors sur son siège, entre son
aptitude à accepter de suivre les aventures peu ''reluisantes'' d'un
être ''différent'' atteint d'un grave trouble psychiatrique et le
malaise qu'instaure parfois la vision clinique du cinéaste. Dans le
rôle de Basile, l'acteur Clément Roussier se montre tout à fait
apte à interpréter le personnage de Basile et permet non seulement
de comprendre le poids que peut représenter la vie auprès d'un
schizophrène. Marine Vacth est de son côté particulièrement
convaincante dans le rôle de la sœur. Une Sarah enceinte, épuisée,
physiquement au bout du rouleau mais qui toujours, continue à
observer Basile comme le frère qu'elle doit secourir. Le
Soleil de trop près est
une œuvre brillante et essentielle qui permet d'ouvrir les yeux sur
une maladie psychiatrique grave qui généralement effraie tant que
l'on n'a pas pris les bonnes dispositions pour en connaître les
fondements. À voir, absolument...
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