Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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dimanche 31 octobre 2021

Ants de Robert Scheerer (1977) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Plus proche de Quand la Marabunta gronde de Byron Haskin que de Them ! de Gordon Douglas ou de Empire of the Ants de Bert I. Gordon tout en étant bien moins profond que Phase IV de Saul Bass, il sera avisé de ranger le téléfilm Ants de Robert Scheerer dans la même section que L'horrible Invasion de John ''Bud'' Cardos qui lui, aura eu les honneurs d'une sortie sur grand écran dans son pays d'origine en août 1977 et en mai de l'année suivante dans l'hexagone. L'approche est sensiblement la même. Les deux films situent leur action dans de petites villes américaines habituellement bien tranquilles mais qui vont être chacune le théâtre d'une invasion perpétrée par deux types de créatures différentes. S'il est plus facilement envisageable d'imaginer des araignées capables d'être à l'origine de morsures mortelles, il n'est pas moins vraisemblable de penser que des fourmis, par dizaines ou centaines de milliers de spécimens, puissent être capables de provoquer des décès parmi la population humaine. Dans le cas présent, il semble s'agir d'une espèce particulièrement redoutable puisque seules quelques morsures sont capables de tuer un homme de corpulence moyenne. L'intrigue se déroule autour et à l’intérieur d'un hôtel de luxe que la propriétaire (Myrna Loy dans le rôle d'Ethel Adams) s'apprête à vendre à un certain Tony Fleming (le con de service incarné par l'acteur Gerald Gordon). Le héros, lui, est interprété par Robert Foxworth.


Il s'agit de Mike Carr, patron d'une entreprise de construction dont un homme décède dans d'étranges circonstances tandis qu'un second se retrouve à l’hôpital dans un piteux état. Peu de temps après, c'est un jeune garçon qui est pris d'intenses douleurs et qui après s'être jeté dans la piscine de l'hôtel perd connaissance... Et parce que les cons, parfois, ça va par deux, arrive sur place un inspecteur du département de la Santé nommé White (l'acteur Steve Franken). Le genre orgueilleux, imbu de sa personne, lequel défend ici avec acharnement l'idée selon laquelle les victimes ont toutes été atteintes par un virus. Résultat, Ethel Adams est contrainte de fermer son établissement et de jeter ses clients à la rue. Sans être tout à fait indispensable, Ants est un sympathique téléfilm d'une durée avoisinant les quatre-vingt dix minutes. Connu tout d'abord chez nous sous le titre Les Fourmis, l’œuvre de Robert Scheerer ne ressemble à rien d'autre que ce qu'elle est : un téléfilm. Rien de miraculeux ne s'y déroule donc en matière d'effets-spéciaux. Si de vraies fourmis sont effectivement présentes à l'écran, il va se révéler très rapidement difficile d'éprouver le moindre sentiment d'effroi.


Le scénario de Guerdon Trueblood a l'ingéniosité d'exposer des créatures certes minuscules, mais en nombre tellement important et nanties d'un acide si puissant que Ants parvient quelque peu à faire passer certaines pilules. Comme ce qui pourrait apparaître aussi logique que de prendre ses jambes à son cou afin de fuir l'invasion mais que les personnages semblent vouloir systématiquement refouler. Malheureusement, si Ants n'est pas l'affreux téléfilm qu'il aurait pu être, le scénario a tendance à tourner en rond. Signe que le réalisateur a du mal à se renouveler, Mike Carr prend les commandes d'un tractopelle et tente durant d'interminables minutes de détruire la fourmilière. Une scène bien trop longue et surtout parfaitement inutile, d'autant plus qu'elle n'aura aucun effet sur l'avancée des fourmis. On n'aura jamais vu autant de blondes actrices tenir la chandelle aux acteurs masculins : Lynda Day George dans le rôle de Valerie (fille d'Ethel et petite amie de Mike), Karen Lamm dans celui de Linda Howard ou encore Suzanne Sommers dans celui de Gloria, la copine du beau gosse de service Richard Cyril interprété par Barry Van Dyke (l'un des deux fils de l'acteur Dick Van Dyke que l'on a pu notamment voir en tueur dans l'excellent épisode de la série Columbo, Réaction négative). Sans oublier non plus le toujours génial Brian Dennehy dans le rôle du chef des pompiers...

 

The Corpse Grinders de Ted V. Mikels (1971) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Drôle de film que The Corpse Grinders de Ted V. Mikels qui signifie littéralement Les broyeurs de cadavres. Tout un programme pour une œuvre crapoteuse, sorte de mixture hybridant Uninvited de Greydon Clark et son chat meurtrier avec le Motel Hell de Kevin Connor et son couple de fermiers produisant une viande fumée d'origine disons... plus que douteuse. Visiblement fauché comme les blés, le film revêt une esthétique générale vraiment spéciale. Des décors sordides, et des interprètes piochés on ne sait où (maisons de retraite ? Asiles de fous ? Campagne profonde?) incarnant des individus tous plus louches les uns que les autres. Autant dire que la joie et la bonne humeur ne sont pas les premières sensations qui se dégagent de The Corpse Grinders. Le genre de pellicule qui dérange, met mal à l'aise. Décors crasseux, polos tâchés, œil glauque et regard de poisson mort. L'univers dépeint est désespérant de tristesse mais offre immédiatement au long-métrage son cachet d’œuvre culte ! Le genre de film que l'on rangera dans la même catégorie que le Buio Omega de Joe D'Amato, le Blood Feast ou le 2000 Maniac de Herschell Gordon Lewis, La dernière maison sur la gauche de Wes Craven, I Drink Your Blood de David E. Durston, le Bloodsucking Freaks de Joel M. Reed ou encore l'un des plus mythiques d'entre tous (bien que beaucoup trop surestimé), The Last House on Dead End Street de Roger Watkins...


L'histoire met en scène Caleb (l'acteur Warren Ball qui après deux comédies, puis The Corpse Grinders et enfin un court-métrage, ''pfuiiit'', disparaîtra des radars) et son épouse Cleo (Ann Noble dont la carrière ne fera pas non plus de vagues avec cinq films seulement entre 1970 et 1973), deux redneck parmi les plus étranges auxquels ait donné naissance le septième art. Lui, récupère des cadavres récemment enterrés afin de les vendre au boss de l'entreprise Lotus Cat Food Company. Elle, passe son temps à prendre soin de sa poupée qu'elle traite comme sa propre fille. Autant dire que ces deux là sont complètement en marge de la société. Habités jusque dans les vêtements qu'ils portent, les deux interprètes incarnent un couple sinon terrifiant, du moins dérangeant. Le boss de la Lotus Cat Food Company s'appelle Landau et est quant à lui interprété par l'acteur Sandorf Mitchell. Inutile de préciser que comme les deux précédents et comme le reste du casting d'ailleurs, ce dernier n'a pas fait de grande carrière au cinéma puisque celle-ci s'est subitement arrêtée en 1973. On se dit qu'après avoir fait la connaissance du couple Caleb/Cleo on va pouvoir respirer un peu d'air frais. Mais c'est mal connaître le réalisateur et ses scénaristes Arch Hall Sr. et Joe Cranston qui persévèrent dans la description d'une Amérique malade. Les employés de la Cat Food Company n'ont absolument pas besoin d'ouvrir les lèvres pour s'avérer eux-mêmes très malaisants. Drucilla Hoy et Charles Fox (lesquels auraient mérité une place de choix parmi les figurants de Vol au dessus d'un nid de coucou de Milos Forman) incarnent respectivement un vieillard physiquement repoussant ainsi qu'une drôle d'employée muette et unijambiste !


On l'aura compris, l'intrigue tourne autour d'une entreprise alimentaire spécialisée dans la nourriture pour chats. Une usine qui pour pallier à ses difficultés financières passe par un réseau très particulier, celui qui permet justement à Caleb et son épouse de gagner leur vie. Des boites de conserve préparées à base de viande humaine. Bon appétit ! The Corpse Grinders prend alors une tournure étonnante. En effet, après l'absorption de la dite nourriture, les chats deviennent agressifs et commencent à s'en prendre à leurs maîtres. Le docteur Howard Glass (Sean Kennedy, seul acteur ayant poursuivi une véritable carrière dans le cinéma) et l'infirmière Angie Robinson (Monika Kelly) décident d'enquêter après qu'une attaque féline ait fait une nouvelle victime. Pas le temps de s'ennuyer devant ce petit film horrifico-policier dont la durée n'excède pas les soixante-treize minutes, génériques de début et de fin compris. Dans le numéro 32 du magazine américain Psychotronic Video, Ted V. Mikels révélait que le scénario lui plaisait tant qu'il en négocia le tarif auprès d'Arch Hall immédiatement après l'avoir lu. Depuis sa sortie, The Corpse Grinders semble avoir attiré nombre de ''fanatiques'' puisque partout dans le monde, certains continuent à évoquer le film lorsqu'ils rencontrent son réalisateur. Reconnaissons tout de même qu'en matière d'horreur le film s'avère relativement ingrat envers les amateurs. Peu de sang et encore moins de gore, le film trouve surtout son intérêt dans son étrange casting et son scénario original...

 

samedi 30 octobre 2021

Gappa le descendant de Godzilla de Hiroshi Noguchi (大巨獣ガッパ) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Dans la série des films, nombreux, mettant en scène le plus célèbre des Kaijū du cinéma japonais, voici Gappa le descendant de Godzilla. Un Kaijū eiga (film de monstres) SANS Godzilla, mais AVEC Gappa, qui n'est ni physiologiquement, ni génétiquement le descendant du plus menaçant des Kaijū (lorsqu'il ne décide pas au contraire de venir en aide à l'humanité lorsqu'une autre créature que lui se réveille d'un long sommeil pour tout détruire autour d'elle) mais celui d'un couple de dinosaures apparemment de type reptilien endormis dans les profondeurs d'une grotte située sur l'île (imaginaire) de l'obélisque. Un sommeil qui va très vite laisser la place à une fureur sans nom. Pourquoi ça ? Parce qu'un homme, le directeur d'un journal populaire avide, croit pouvoir se faire un maximum de pognon en exploitant les créatures vivant sur l'île qu'il imagine déjà sortir de l'ordinaire. Mais plus que sa faune animale, ce qui sort de l'ordinaire, c'est ce peuple indigène qui vit sur place depuis des générations et n'a pas l'intention de déménager. Le directeur du journal a bien l'intention de s'accaparer les lieux afin d'en faire un parc d'attraction nommé Playmate Land dans lequel les touristes du monde entier pourront côtoyer crocodiles, oiseaux exotiques et autres animaux sauvages en liberté. Cela ne vous rappelle rien ? Si je vous dis, dinosaures... Ou Steven Spielberg... Cela ne vous évoque rien ? C'est amusant mais ni lui, ni l'auteur du roman original Jurassic Parc Michael Crichton n'évoquent le réalisateur japonais Hiroshi Noguchi. Pas plus que Gappa le descendant de Godzilla qu'il réalisa en 1967. Bon, après, c'est vrai que le Kaijū eiga prend par la suite une direction différente, mais tout de même...


Pour revenir aux indigènes installés sur l'île depuis des lustres, l'homme noir n'étant apparemment qu'en petite minorité dans ce pays de l'Asie de l'est, la production fait un choix au pire étonnant, au mieux, très rigolo. Car en effet, l'homme de couleur, le sauvage tel qu'il est décrit dans le récit, a les yeux bridés. Un détail morphologique qui s'explique par le fait qu'aucun noir n'apparaisse à l'écran. Et pour pallier à ce manque, vingt ou trente figurants seront peints histoire de donner le change. D'où l'apparition à l'image de sauvages que l'on pourrait éventuellement décrire comme étant afro-asiatiques. Je me poile, me bidonne, me marre... Pas très original puisque démarrant à la manière d'un certain King Kong dans lequel un peuple d'indigènes vouait un culte à un énorme gorille, la simple évocation de Gappa fait trembler le peuple de l'île. Une immense statue protège l'entrée de la grotte jusqu'à ce que, ô mystère de la déesse ''Coïncidence'' qui s'immisce dans le récit, une éruption volcanique (et non pas une Irruption dont le sens est tout autre) survient au moment même où des scientifiques à la solde de George Inoue (le boss du journal qu'interprète l'acteur Tatsuya Fuji) débarquent sur l’île... Humpf ! Alors, on n'assume pas ses actes et on prend un prénom européen... ? La séquence se déroulant sur l'île est on ne peut plus kitsch avec ses cases constituées majoritairement de paille ou les vêtements des autochtones aux riches couleurs. Ces dernières étant totalement anachroniques, au demeurant...


Promenade en forêt, découverte d'une grotte renfermant un œuf immense (celui de la créature qui nous intéresse), tremblement de terre et au final, naissance impromptue de Gappa... ou de sa progéniture d'ailleurs puisque tout ceci n'est pas très clair. Après avoir rapidement proposé aux villageois de les accompagner sur leur bateau, les scientifiques pressent le pas pour repartir. Il faut dire que le volcan s'avère de plus en plus menaçant et que les parents du bébé reptilien (qui s'avérera en fait être de type dinosaure à plumes ou dinosaure avien) sont bien décidés à reprendre possession de leur enfant. De retour à la civilisation, les scientifiques et leur hargneux commanditaire enferment le ''rejeton'' dans une cage tandis que ses parents, lentement mais sûrement, remontent jusqu'au Japon afin de retrouver leur bébé... quitte à tout détruire sur leur passage. Ce qui donne lieu à des séquences de destruction de masse qui pour l'époque, avouons-le, ne sont pas si mal fichues que ça. Un tout petit peu moins carton-pâte qu'à l'habitude, les villes sont d'ampleur et la miniaturisation parfois convaincante. Il faudra attendre pour cela, presque quarante minutes mais alors, la séquence suivante durera bien sept ou ou huit minutes avant que le calme ne revienne, amenant ainsi un peu de tranquillité et une certaine morale à l'ensemble. Pas de véritable amourette même si les sentiments se rejoignent parfois par le toucher, une happy end convenue, des effets-spéciaux parfois maladroits mais qui démontrent l'ambition du projet, mais aussi, malheureusement, des créatures visuellement grotesques. Demeure alors un Kaijū eiga honnête mais pas très original. À noter que l'invraisemblance du titre qui fait référence à une créature en réalité absente du film est due à la responsabilité des distributeurs français puisque dans sa version originale, 大巨獣ガッパ signifie en réalité Gappa la bête géante...

 

Finale de Soren Juul Petersen (2018) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆

 


 

Une rousse et une blonde (une pouffe et une étudiante en psychologie pour ceux qui préfèrent voir les choses telles qu'elles sont réellement) tiennent une station-service de nuit pendant que le pays ''presque'' tout entier est devant sa télévision à regarder la finale d'un match quelconque (Football, Rugby, Tennis, Basket ? On s'en tape !). Un film danois, réalisé par Soren Juul Petersen (son premier en tant que réalisateur) et principalement interprété par les actrices Anne Bergfeld et Karin Michelsen dont on ne peut pas dire que les carrières respectives au cinéma aient vraiment décollées puisque avant et après ce Finale pâlichon, elles ne sont toutes les deux apparues que dans une toute petite poignées de courts-métrages et d'épisodes de séries télévisées. Vue l'affiche, on peut éventuellement tout d'abord penser à une sorte d'alternative au Joker réalisé en 2019 par Todd Phillips. Mais non, rien à voir, de près, ou alors de très, très loin. Ce que l'on peut prendre par erreur pour le fameux anti-héros des comic books DC Comics est un clown, il est vrai. Il faut dire que les films mettant en scène ces sinistres individus censés faire rire les enfants se multiplient comme des petits pains depuis que sont sortis les deux volets de Ça. Si le Danemark a prouvé qu'en matière de comédies ou de thriller ses auteurs étaient souvent capables du meilleur, Soren Juul Petersen, lui, démontre qu'en ce qui concerne l'horreur et l'épouvante, il n'est pas toujours de bon ton de confier à un réalisateur débutant, la responsabilité d'un projet cinématographique. Lui-même à l'origine du scénario qu'il a écrit en compagnie de Carsten Juul Bladt d'après la nouvelle de Steen Langstrup, on se demande à quoi Soren Juul Petersen et le scénariste ont passé leur temps consacré à son écriture tant le film paraît du point de vue de l'écriture, dénué de tout intérêt...


Inutile de préciser que la caractérisation des deux héroïnes Agnes Berger et Belinda Andersen est aux fraises. On se fiche totalement de ce qui peut survenir durant les cent minutes qui vont suivre. Que l'une continue à étudier pendant son travail tandis que l'autre passe son temps à envoyer des textos sur son téléphone portable ou que les deux meurent dans d'atroces souffrances, qu'est-ce que ça peut bien faire ? Ça n'est pourtant pas faute que d'avouer que j'ai passé mon temps à regarder l'heure. Des séquences m'auraient-elles alors échappées ? Les films d'horreur situant leur action aux alentours d'une station-service ne sont pas légion. Splinter de Toby Wilkins et son très agressif parasite était plutôt sympa (même si dénué, lui aussi, de véritable histoire). Finale, lui, passe de son duo d'employées à un clown torturant des individus. Un spectacle auquel assistent, on le suppose, des types financièrement blindés. Sur un ton faussement humoristique, le film est d'un insondable ennui. Totalement creux, se voulant festif mais passant totalement à côté de son sujet, Finale est sans doute plus pénible encore pour celui qui assiste à sa projection que les tortures qu'endurent les proies du clown en question. Soren Juul Petersen repousse les limites du grotesque, faisant de Finale l'une des expériences cinématographiques les plus pathétiques qu'il soit donné de voir sur un écran. Son incapacité à susciter l'effroi tout en parvenant involontairement à faire sourire devant la vacuité de son entreprise est assez rare pour que cela soit signalé. Le réalisateur devrait finalement retourner à ce qu'il sait visiblement faire le mieux : produire pour les autres et ne surtout plus se placer dans la position du réalisateur...

 

Si j'étais un espion de Bertrand Blier (1967) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Bien avant Les Valseuses, Calmos, Préparez vos mouchoirs, Buffet Froid ou Tenue de soirée, le réalisateur, scénariste et écrivain français Bertrand Blier tournait en 1967 son tout premier long-métrage de fiction. Quatre ans après avoir mis en scène le documentaire Hitler, connais pas, ce jeune homme alors âgé de vingt-huit ans seulement (il en a quatre-vingt deux aujourd'hui) réalisait un long-métrage qui ne se situait pas encore dans la veine satirique de ses futures œuvres même si l'on sentait déjà pointer la verve corrosive de ce dialoguiste de génie, digne fils spirituel de Michel Audiard. Tourné en noir et blanc et déjà interprété par son père Bernard Blier avec lequel il tournera à deux autres occasions en 1976 dans Calmos, chef-d’œuvre absolu de l'antiféminisme ainsi que trois ans plus tard en 1979 dans Buffet Froid qui reste sans doute, le meilleur film de Bertrand Blier. Mais revenons en 1967. Bernard Blier incarne dans Si j'étais un espion, le docteur Lefèvre. Un médecin généraliste comme il en existe des milliers dans notre pays. Parmi ses patients se trouve un certain Guérin. Et c'est justement à lui que Lefèvre doit rendre visite ce jour là. Mais alors que le médecin se trouve devant sa porte, il a beau sonner mais personne ne vient lui ouvrir. Après avoir croisé le chemin de Geneviève Laurent (l'actrice Suzanne Flon) qui elle aussi aimerait savoir où se trouve Guérin, le docteur Lefèvre tourne les talon et repart à son cabinet pour recevoir bientôt la visite de Kruger (l'acteur Pierre Le Rumeur), le chef d'une bande qui tente de lui soutirer des informations concernant Guérin. Mais le médecin n'étant pas du genre à délivrer des renseignements au premier venu, et surtout pas lorsqu'il s'agit de l'un de ses patients, celui-ci refuse. Kruger met alors entre les pattes de Lefèvre l'un de ses hommes de main, Matras (Bruno Cremer) et le menace de s'en prendre à sa fille Sylvie (Patricia Scott) s'il ne fait pas exactement tout ce qu'il lui dit...


L'avantage avec Bernard Blier, c'est que quel que soit le film dans lequel il apparaît l'on est sûr de passer un agréable moment. Le genre d'acteur qui vous transforme un bousin sinon en lingot d'or, du moins en un produit beaucoup moins malodorant. Ce qui n'est heureusement pas le cas ici puisque pour un premier long-métrage, Si j'étais un espion révèle déjà un talent certain pour la mise en scène chez Bertrand Blier que l'on compare alors plus ou moins justement au célèbre Alfred Hitchcock. Mais à dire vrai, une grosse dizaine d'années plus tard, les critiques auraient surtout pu comparer ce premier long-métrage avec non pas l’œuvre du cinéaste britannique naturalisé américain, mais avec un film. Signé de Jacques Deray et sorti dans les salles françaises le 3 mai 1978. Car en effet, rien ne semble vouloir diriger son personnage principal dans une même impasse que celui de Roland Fériaux qu'interprétera alors Lino Ventura dans Un papillon sur l'épaule. Le docteur Lefèvre qu'incarne admirablement le père du réalisateur se retrouve dans une situation pas tout à fait ubuesque, mais presque. Disons, kafkaïenne. Surtout que Bertrand Blier cultive le mystère autour de ces individus passablement noctambules. Le docteur Lefèvre n'échappe d'ailleurs pas lui non plus à cette approche trouble de son personnage. Majoritairement tourné de nuit, l'aspect ''obscurantiste'' du scénario et cette volonté étroite de n'en point révéler davantage que nécessaire sème un certain désordre et pourra faire naître dans l'esprit du spectateur un sentiment d'angoisse.


Comme le voyage d'un individu en terrain méconnu, site privilégié pour une certaine forme d'appréhension. Car oui, Si j'étais un espion est traversé par une vague de suspicion qui mène directement à la paranoïa. Aidé non seulement par la présence à l'image de son père mais également par celles de Bruno Cremer qui incarne un ''gardien'' inquiétant bien qu'étant parfois... ''réconfortant'' (surtout si on le compare à celui qui donne les ordres), de Claude Piéplu dans le rôle de Monteil, ami du docteur Lefèvre ou de Suzanne Flon qui n'apparaît malheureusement que sporadiquement à l'écran, Bertrand Blier réalise avec Si j'étais un espion, un très bon premier film, déjà riche de promesses quant à la future carrière du réalisateur. Notons que le scénario reposa sur l'écriture à six mains de Jean-Pierre Simonot, Jacques Cousseau et Philippe Adrien. Que l'histoire originale est l’œuvre de Bertrand Blier lui-même ainsi que du dramaturge Antoine Tudal. Que la musique est signée de l'immense Serge Gainsbourg (certains passages évoquent même très vaguement son Requiem pour un con) et qu'elle fut orchestrée par l'arrangeur et compositeur français Michel Colombier. Ah, j'allais oublier. Notons également que Bertrand Blier fut tout de même aidé par l'assistant-réalisateur Gérard Guérin qui œuvre notamment sur les tournages du Corniaud ou de La grande Vadrouille de Gérard Oury. Deux solides références tout de même... Si j'étais un espion mérite donc d'être (re)découvert d'urgence, et notamment par les fans de celui qui demeure l'un des plus grands cinéastes hexagonaux même si depuis quelques années Bertrand Blier semble avoir malheureusement quelque peu perdu de sa verve (Convoi exceptionnel)...

 

vendredi 29 octobre 2021

Blaxploitation : Car Wash de Michael Schultz (1976) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Ceux qui me connaissent savent que je n'aime pas les comédies musicales. Ou si peu. West Side Story, Grease, Moulin Rouge, Les demoiselles de Rochefort ou Chantons sous la pluie ? Très peu pour moi... J'avoue avoir malgré tout une faiblesse pour quatre d'entre elles. Le Phantom of the Paradise de Brian De Palma, The Blues Brothers de John Landis, Cry-Baby de John Waters et... Car Wash de Michael Schultz. En réalité, le format de ce dernier est un peu particulier puisque les interprètes ne s'arrêtent que très sporadiquement pour interpréter les chansons qui passent à la radio durant une très grande partie du long-métrage. Film de Blaxploitation datant de 1976, Car Wash est une œuvre culte dont l'essentiel repose davantage sur sa bande musicale que sur le récit puisque de ce point de vue là, le scénario est d'une confondante simplicité. Un scénario écrit par Joel Schumacher, futur réalisateur de Génération Perdue, Le Droit de tuer ou encore 8 millimètres. Culte parce qu'à l'époque, ou du moins c'est le sentiment que laisse transparaître le film de Michael Schulz, il était encore possible d'autoriser un certain vent de liberté quel que soit le sujet abordé. Ici, tout ne semble être que question d'improvisation. Alors qu'aujourd'hui des codes de bien-pensance empêchent d'entendre ou de voir tout et son contraire, à l'époque, personne n'aurait pensé s’offusquer en voyant déambuler à l'image, un Antonio Fargas (Huggy les bons tuyaux de la série policière Starsy et Hutch) dans le rôle d'un homosexuel ultra caricatural. Une ''folle'' comme il était de coutume chez les hétéros bas du front de nommer les homosexuels.



Personne ne serait sans doute monté sur ses grands chevaux lorsque les employés d'une station de lavage automatique s'amusent de la reconversion de l'un d'entre eux à la religion musulmane (Bill Duke dans le rôle de Abdullah Mohamed Akbar)... ''Il n'y a pas de superman noir...'' comme l'évoque à l'époque très justement le personnage de TC aka La Mouche qu'interprète l'acteur Franklyn Ajaye. Une pensée visionnaire et une injustice qui sera longtemps plus tard réparée puisque les fans de l'univers DC devraient logiquement bientôt découvrir le premier Superman noir sur grand écran. Sous couvert d'être une comédie (musicale), Car Wash laisse tranquillement ses messages infuser. Mais avec bien moins de violence et d'arrogance qu'aujourd'hui. C'était d'ailleurs un peu le principe de la Blaxploitation dont le but principal était de mettre l'homme noir sur un même d'égalité que le blanc tout en se moquant gentiment de celui-ci. Rien de méchant, donc. Le récit prend place dans une station de lavage de voitures dans laquelle une dizaine d'employés passent visiblement plus de temps à chanter, à faire les idiots, à danser ou à draguer les quelques rares représentantes féminines qui passent à l'image (Lauren Jones dans le rôle de Marleen ou Tracy Reed dans celui de Mona) qu'à travailler.


Les véritables moments de profondeur sont rares, voire seulement survolés, Michael Schultz semblant avoir abandonné toute idée de contrôle sur ses interprètes. Ponctuellement drôle, Car Wash pêche malheureusement par sa pauvreté scénaristique. Un minimalisme qui, sans provoquer de désastre, suscite au bout de trois-quart d'heure un certain ennui malgré ses très nombreuses mises en situation. À dire vrai, l'un des principaux intérêts du long-métrage provient du charme suranné typique des années soixante-dix qui s'en dégage. À commencer par sa bande musicale composée par Norman Jesse Whitfield et interprétée par le groupe de R&B, de soul et de disco Rose Royce, ou dans une moindre mesure par les Pointer Sisters qui apparaissent ici à l'écran sous le nom de The Wilson Sisters. Parmi les autres interprètes nous retrouvons l'acteur Jason Bernard dans un rôle secondaire (il fut notamment l'interprète de Caleb Taylor, le père d'Elias dans la série télévisée de science-fiction culte V) ou encore Richard Pryor dans le rôle de Papa Riche quatre ans avant celui qu'il interpréta dans Faut s'faire la malle de Sidney Poitier ou neuf avant celui qu'il incarna dans Comment claquer un million de dollars par jour de Walter Hill. Au final, Car Wash a vieilli et n'aura sans doute pas le même impact que celui, persistant, du géniallissime Blues Brothers de John Landis...

 

Cyst de Tyler Russel (2020) - ★★★★☆☆☆☆☆☆

 


 

''This is comedic Cronenberg'' nous promet le teaser américain. Voilà un programme des plus alléchant. En attendant que le maître absolu du Body Horror David Cronenberg ne revienne à ses premières amours sur grand écran, il n'est d'autre choix que de farfouiller ça et là à la recherche du long-métrage même le plus ingrat qui nous permettra de patienter jusque là. À lui tout seul, le titre du nouveau long-métrage de Tyler Russel est tout un programme : Cyst, qui chez nous signifie kyste. Amateurs de furoncles, bubons, fistules et autres pustules, bonjour. Après un générique à la typographie élégante, le film s'ouvre sur une intervention chirurgicale qui risque de donner des boutons aux hypocondriaques. Une jolie jeune femme portant à l'arrière du cou un kyste sébacé dont la capsule s'avère impressionnante, laquelle renferme pas moins d'un litre de sébum et dont le diamètre va être considérablement réduit grâce au doigté assez peu délicat du docteur Guy (l'acteur George Hardy). Une opération chirurgicale pratiquée sans anesthésie et qui s'apparente à l'écran à un orgasme masculin. Voici donc le type de programme que nous propose le réalisateur, malgré tout sur un ton volontairement humoristique puisque le sujet n'est ici très clairement pas d'offrir aux spectateurs leur comptant de frayeurs mais plutôt de les faire sourire ou de les révulser face à des pratiques opératoires d'un goût plus que douteux...


Le réalisateur canadien peut dormir sur ses deux oreilles car ça n'est certes pas avec Cyst que Tyler Russel lui fera de l'ombre. Alors que le premier aborde le Body Horror avec tout le sérieux du monde, le second convoque un parterre de pitres dans une comédie horrifique qui laissera pourtant en sommeil nos zygomatiques. Rire devient ici un exercice des plus délicat, enfermant le spectateur dans une certaine forme de circonspection. Rien n'étant plus subjectif que la capacité d'un individu à accepter ce que lui impose un tel spectacle, il deviendra difficile dans le cas de Cyst de juger de la qualité des répliques ou des situations que l'on soit adepte ou non de la méthode employée. Dans les années soixante, un médecin dermatologue concepteur d'une machine qu'il envisage comme étant révolutionnaire en perd le contrôle lorsque vient l'instant fatidique de la présenter afin d'en obtenir le brevet. Vient alors à la vie un énorme bubon qui autour de lui va faire des ravages. Si l'on ne connaît pas encore les univers de Peter Jackson (Bad Taste, The Feebles ou Braindead), de Jim Muro (Street Trash), de Stuart Gordon (Re-Animator, From Beyond), de Frank Henenlotter (Basket Case, Brain Damage) ou de Brian Yuzna (Society, Le dentiste), la chose peut encore s'envisager comme une alternative se rangeant dans la case du gore rigolo. À l'inverse, Cyst s'impose comme un ersatz relativement piteux qui malgré ses intentions, l'engouement de ses interprètes, sa bande-son signée de Sam Lipman ou ses séquences d'horreur médicales, s'avère navrant...


Un long-métrage qui sans doute aurait connu le succès auprès du public s'il avait débarqué ne serait-ce que trente ou quarante ans plus tôt. Si les dialogues manquent cruellement de génie comique, la créature prénommée Kyste est à l'aune de ce que l'on pouvait voir chez nos lointains voisins japonais lorsque leur imagination donnait naissance aux formidables minis-boss de la série San Ku Kaï à la toute fin des années soixante-dix. La bestiole en question est non seulement la jumelle de ces extraterrestres en latex qui firent notre bonheur d'anciens adolescents, mais elle est même parfois comparable à ces créatures ridicules des années cinquante ou soixante vues dans tout un tas d’œuvres de science-fiction auxquelles rendit notamment hommage un certain Jean-Pierre Putters dans sa série d'ouvrages The Craignos Monsters. Sans être tout à fait ennuyeux, Cyst a cependant cette fâcheuse tendance à laisser derrière lui un champ de ruines émotionnelles figuré par l'état dans lequel le film abandonne le théâtre des événements. Ou lorsque David Cronenberg rencontre le John Carpenter de The Thing en milieu médical sans qu'à aucun moment Tyler Russel n'aie le dixième du génie de ces deux grands cinéastes... À oublier... très rapidement...

 

jeudi 28 octobre 2021

The Nesting (Retour vers le cauchemar) d'Armand Weston (1981) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Du milieu des années soixante-dix jusqu'à la moitié des années quatre-vingt, toute une série de longs-métrages ayant pour vocation de mettre en scène des demeures plus ou moins hantées furent tournés pour le bonheur des fans de fantastique et d'épouvante qui pour le coup, bénéficièrent de films de très grande qualité. Burnt Offerings de Dan Curtis et sa demeure qui dévorait littéralement l'âme de ses locataires, Amityville, la maison du Diable de Stuart Rosenberg qui se réappropriait un effroyable et véridique fait-divers, The Changeling de Peter Medak, véritable monument de l'effroi avec George C. Scott, Shining de Stanley Kubrick et son hôtel hanté, adaptation plus ou moins fidèle du roman éponyme écrit par l'écrivain américain Stephen King, L'au-delà et La maison près du cimetière de Lucio Fulci, leurs séquences gore et leur ambiance morbide, ou encore les très divertissants Poltergeist de Tobe Hooper et House de Steve Miner... Tout ceci inclus dans une plage de dix ans seulement. Mais si le film The Nesting d'Armand Weston dont il est question ici aborde lui aussi le même thème de la maison hantée, on le rapprochera parfois sans doute davantage de l'excellent La sentinelle des maudits que réalisa Michael Winner en 1977. Si en comparaison des exemples cités ci-dessus le film d'Armand Weston peut paraître bien inférieur d'un point de vue qualitatif, les amateurs de sensations fortes pas trop exigeants en la matière, les explorateurs urbains (ou Urbex) ou les chasseurs de fantômes lui trouveront malgré tout un certain charme, aussi désuet soit-il...


The Nesting met en scène l'écrivain de romans gothiques Lauren Cochran (l'actrice Robin Groves), jeune agoraphobe qui afin d'être dans les meilleures conditions possibles pour entamer l'écriture de son nouvel ouvrage déménage temporairement et vient s'installer dans une vieille demeure laissée à l'abandon, propriété d'un certain colonel LeBrun qu'interprète l'acteur John Carradine (père de David ''Petit Scarabée'' Carradine, le personnage central de la série Kung-fu). Un vieillard qui a la vue de la future locataire est victime d'une crise cardiaque. [ellipse] Lauren dispose ses quelques affaires dans les deux seules pièce de l'immense bâtisse qu'elle a l'intention d'investir mais très rapidement, des événements étranges et même tragiques se produisent. La jeune femme fait des cauchemars criants de vérité (c'est d'ailleurs à l'image des visions que fait l'héroïne que The Nesting se rapproche très sensiblement de La sentinelle des maudits puisque la top modèle Alison Parker interprétée par l'actrice Cristina Raines qui elle aussi s'était installée tout récemment dans un vieil immeuble y côtoyait déjà des locataires qui allaient se révéler être en réalité des fantômes) et décide d'investir le reste de la demeure afin de comprendre d'où remonte l'origine des événements dont elle est le témoin ''privilégié''. L'une des originalités de The Nesting est d'installer son intrigue dans une demeure qui fut le théâtre de la prostitution. En effet, celle-ci ayant servi de maison close, l'héroïne est directement confrontée aux fantômes du passé...


À vrai dire, au delà des simples similitudes qui font converger The Nesting vers le récit de La sentinelle des maudits, le film d'Armand Weston (auteur de quelques longs-métrages seulement dont le porno The Defiance of Good, œuvre relativement violente qui situe son action dans un institut psychiatrique) reprend des éléments de quelques-uns des longs-métrages évoqués plus haut. La lecture d'une page répétant inlassablement la même phrase renvoyant à Jack Nicholson devant sa machine à écrire dans Shining ou les sons étranges et la demeure (pourtant ici plus que jamais décatie) qui eux ramènent quelque peu à The Changeling. Toutes proportions gardées bien évidemment puisqu'en comparaison, The Nesting est largement inférieur à ces quelques références. Il n'en demeure pas moins que certaines séquences demeurent efficaces. Quelques morts dont celle du psychiatre de l'héroïne empalé, l’œil exorbité. Quelques agressions physiques dont celle d'un ouvrier particulièrement antipathique. Et des apparitions fantomatiques pourtant loin d'être angoissantes... Le film fut tourné dans l'impressionnante demeure octogonale de Armour-Stiner près du fleuve Hudson dans la région de New York. Il film bénéficie en outre d'une partition musicale riche et diverse signée des compositeurs Jack Malken et George Kim Scholes. Aussi curieux que cela puisse paraître, The Nesting mélange également le sujet de la maison hantée au film de rednecks avec l'un des spécimens les plus remarquables jamais vus sur un écran ! À savoir qu'il existe deux versions du long-métrage puisque la première dure quatre-vingt dix-neuf minutes tandis que la seconde est plus longue de quatre minutes. Une œuvre moyenne mais qui se regarde avec un certain plaisir...

 

The Giant Spider Invasion de Bill Rebane (1975) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

''C'était une étoile filante...''. Ben, non, un simple feu de Bengale. Mais bon, gardez-le pour vous et n'en dites rien aux spectateurs de ce The Giant Spider Invasion signé de Bill Rebane en 1975. Soit deux ans tout juste avant Kingdom of the Spiders de John ''Bud'' Cardos dans lequel le Commandant James TEEEE Kirk.... enfin, le Docteur Robert ''Rack'' Hansen, combattait des araignées plus grosses que le poing d'un homme. Une rigolade à côté de celle que vont devoir affronter les Docteurs Vance, Jenny Langer ou le shérif d'une petite bourgade américaine. Deux ans avant de voir débouler de vraies araignées à l'écran, Bill Rebane nous balance après une bonne grosse demi-heure une araignée haute comme un immeuble de plusieurs étages beaucoup moins vraisemblable (quel euphémisme) que celle du classique de Jack Arnold, Tarantula !. Un comble si l'on tient compte du fait que ce dernier fut antérieur de vingt ans et que par conséquent, les effets-spéciaux en 1975 devraient logiquement être plus réalistes. Bon, pour être tout à fait honnête, The Giant Spider Invasion contient lui aussi de véritables araignées. Pas de celles que l'on a l'habitude de trouver sur notre territoire mais plutôt dans des contrées exotiques. Si ces premières sont typiques de celles que l'on s'attendrait à voir débouler en cas d'invasion, c'est leur façon d'apparaître à l'écran pour la première fois qui s'avère elle originale. En effet, après qu'une météorite se soit écrasée près de la maison d'un bouseux et de son épouse alcoolique (une réplique presque parfaite de la future Sue Ellen Ewing de la série télévisée Dallas), d'étrange petites formes sphériques ressemblant aux bouses en pelotes que fabriquent les scarabées bousiers s'y retrouvent disséminées. Sauf que celles-ci s'avèrent d'une solidité à toute épreuve et enferment chacune en son sein, une araignée ainsi qu'un certain nombre de diamants (!?!).


Si The Giant Spider Invasion semble bien moins connu que Kingdom of the Spiders, il n'en demeure pas moins un cas intéressant dans son domaine puisque malgré des moyens financiers s'avérant peu importants, Bill Rebane parvient à réaliser une honnête petite série B aux effets-spéciaux, certes, parfois mal fagotés, mais qui a tout de même le mérite d'exister. L'une des bonnes idées du scénario qui mène le montage à passer d'une situation à une autre, amenant ainsi le long-métrage à bénéficier d'un rythme plutôt soutenu, est d'avoir imaginé mettre dans un même film des scientifiques cherchant les causes d'un phénomène inédit et des rednecks vaquant à leurs occupations avant que tout ne dégénère. Au titre de ces derniers, Bill Rebane expose quelques personnages particulièrement gratinés parmi lesquels l'acteur Robert Easton se situe en bonne position. Avec sa barbe à la ZZ Top mal brossée et son comportement de fermier misogyne méprisant envers sa femme devenue alcoolique à la suite de la perte de leur enfant, il incarne un Kester aux valeurs ambiguës et ma foi, parfaitement détestables qui lui seront, on s'en doute, fatales. Bill Rebane n'est pas tendre avec ses ploucs qu'il dépeint comme des individus avides et crétins, remontant même jusqu'à son shérif, facétieux plaisantin (l'acteur Alan Hale Jr.) que les habitants du patelin où se déroule l'action ignoreront lorsqu'il s'agira de prendre les armes pour aller tuer l'ignoble créature qui accumule derrière elle les victimes humaines...


Une araignée de quinze mètres (c'est le Docteur Vance interprété par l'acteur Steve Brodie qui nous le confirme) qui déambule sur des roulettes qui contrairement à celle de Tarantula ! n'est pas l'objet de l'incrustation d'une araignée dans l'image mais bien d'une authentique ''marionnette'' semblant être mue par des fils invisibles. La présence à l'écran des docteurs Vance et Jenny Langer (Barbara Hale) est le prétexte à des hypothèse scientifiques relativement tordues. Car si en ayant l'esprit quelque peu ouvert le spectateur pourra s'accorder avec l'idée d'une mutation liée aux effets de la radioactivité émise par la chute d'une météorite, l'évocation d'un trou noir est elle par contre contestable. Se traînant une réputation peu élogieuse (le site Nanarland lui a notamment offert une place de choix entre ses pages), The Giant Spider Invasion est en fait une assez bonne surprise. Alors que sa traduction française (L'Invasion des araignées géantes) nous ment quelque peu en omettant le fait qu'il n'y a pas DES araignées géantes mais une seule, les vraies mygales, elles, sont en nombre important et généreront peut-être quelques frissons parmi les arachnophobes. Bien que son araignée surdimensionnée fasse davantage penser aux innocents opilions avec lesquels on les confond parfois, Bill Rebane parvient grâce à certain cadrages à rendre sa créature menaçante. The Giant Spider Invasion s'en trouve grandit en multipliant les attaques d'arachnides même si tout ceci est fait dans des conditions parfois plus que sommaires. Avec ses idées tordues (l'évocation d'un trou noir ou ces ''cocons'' renfermant des araignées et des diamants, idée parfaitement farfelue qui ne joue d'ailleurs absolument pas sur l'évolution des événements), sa définition du redneck, son shérif jovial et ses scientifiques qui traitent le phénomène avec le plus grand sérieux, The Giant Spider Invasion est au final un sympathique divertissement...

 

mercredi 27 octobre 2021

Samurai Cop d'Amir Shervan (1991) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

On m'avait dit que Samurai Cop était un grand, très grand nanar mais alors, je ne m'attendais certainement pas à assister à un tel spectacle. Entre l'infirmière qui drague le héros et lui tâte l'entrejambe avant de lui refuser le moindre rendez-vous pour cause de petite bit[censuré]. Le serveur costaricien homosexuel au doux petit nom de Alfonso de Rigeria Enrico Sebastiano qui fait des moulinets avec les bras histoires de bien marquer ses préférences sexuelles. Des anti-héros affublés d'improbables coiffures (qui restent encore très raisonnables en comparaison du brushing que se trimballe le flic samouraï du titre). Des faux raccords en veux-tu en voilà. Des bruitages ultra caricaturaux (on sait maintenant où sont allés pécher leur sources d'inspiration les nuls et les Inconnus lors de leurs diverses parodies). L'attitude des uns et des autres au moment de mourir. La musique atrocement cheap, et un casting qui ressemble davantage à une cours des miracles qu'autre chose, on tient là une perle. L'histoire est basique, mais on s'en fiche puisque le principal intérêt de Samurai Cop tient tout d'abord dans sa mise en scène et son interprétation. Auteur de trente longs-métrages dont celui-ci est le dernier, le réalisateur iranien Amir Shervan signe un authentique classique du Nanar. Également auteur du scénario, on remarquera d'emblée le nom forcément original des principaux protagonistes. De vieux relents de racisme qui transpirent lors d'un dîner organisé autour d'un chef mafieux d'origine japonaise connu sous le nom de Fujiyama. Le héros, lui, s'appelle Joe Marshall. Et quant à son coéquipier d'origine afro-américaine, il se nomme Frank Washington. Quand je vous disais que le film en la matière faisait preuve d'originalité...


Comme je le disais un peu plus haut, le synopsis n'est pas ce que retiendra tout d'abord la légende. Mais sachez que le long-métrage met en scène le Clan Katana que dirige Fujiyama (l'acteur Cranston Komuro, portant ici moustache et ''coupe mulet'' du plus ringard effet). Ce chef mafieux s'est emparé à l'aide de ses hommes (dont un Yamashita incarné par un Robert Z'dar à la mâchoire toujours aussi impressionnante) du contrôle de la cocaïne à Los Angeles. Pour affronter le clan Katana, le service de police de San Diego a dépêché sur place l'inspecteur Joe Marshall qui intègre auprès de son nouveau coéquipier Frank Washington (affublé d'une sobre coiffure afro, cela va sans dire), le service de police de Los Angeles. Formé par les plus grands maîtres en arts martiaux japonais (non, non, ne riez pas!), ce séducteur invétéré est bien décidé à faire tomber le nouveau parrain de la drogue. Wouaw ! Ça donne envie, hein ? Et puis, ça a l'air vachement original, non ? Bon, plus sérieusement, et une fois n'est pas coutume, il est très fortement conseillé de découvrir Samurai Cop doublé dans notre langue. En effet, si les interprètes sont mauvais, la palme d'or revenant bien sûr à Mathew ''Samurai Cop'' Karedas (z'avez cerné le jeu de mots ? Karedas= carré d'as!), les voix françaises sont un modèle que devraient retenir tout ceux qui à l'avenir décideraient de se lancer dans le doublage d'un nanar ! Sans rien avoir demandé à personne (contrairement à ces dizaines, voire ces centaines de films qui désormais voient le jour avec l'espoir de devenir culte en la matière), Amir Shervan signe l'une des bandes Z les plus importantes de sa catégorie. Une fois que vous aurez découvert Mathew Karredas dans le rôle du flic samouraï, l'idée de découvrir ses autres... ''performances artistiques'' vous titillera sans doute les méninges (une toute petite poignée de longs-métrages à vrai dire).


Gratifié d'un charisme aussi peu marquant que celui de notre ancien président de la république François Hollande, l'acteur joue de surcroît comme un pied pour notre plus grand bonheur. Sa coiffure dit tout. Un brushing comme jamais aucun coiffeur digne de ce nom n'oserait en proposer dans son salon. Portant sur ses ennemis et sur la gente féminine un regard de poisson mort, Mathew Karredas a l'attitude du type qui à sa banque fait la queue en attendant d'encaisser ses allocations chômage ! Ouais, Samurai Cop, c'est du grand, très grand cinéma. Du Kung fu, des gunfight de très haute volée (des balles qui parfois ne brisent pas le pare-brise des voitures), des courses-poursuites endiablées (on accélère l'image histoire de faire croire que les bagnoles roulent en ville à toute berzingue), des dialogues d'une très grande profondeur (l'infirmière : Vous voulez sortir avec moi ? Joe : Heu, ouais, ça m'déplairait pas. L'infirmière : Vous voulez coucher avec moi ? Joe : hum.... Bingo ! L'infirmière (tripotant l'entrejambe du flic) : Voyons ce que ça vaut.... désolée, ça ne m'intéresse pas. Rien d'intéressant. Joe : Rien d'intéressant ? Et l'intérêt pour vous commence à quelle taille ? le... jumbo-jet ? Et je vous épargne le pire et donc, le meilleur...), bref, que du bon à partager entre potes. Pour ceux qui hésiteraient encore, sachez que malgré sa foule de défauts, le film bénéficie de la présence de jolies plantes à l'image de Janis Farley ou de Melissa Moore. Alors, il y en a encore qui font la fine bouche... ?

 

Friday the 13th (Vendredi 13) de Sean S. Cunningham (1980) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Et la légende est née... un soir de pleine Lune, au coin d'un feu de camp. Celle de Jason Voorhees, ce petit garçon qui se noya dans le lac de Crystal Lake pendant que ses moniteurs faisaient, selon l'expression d'un certain Alexander « Alex » DeLarge, ''in-out'' dans la réserve du camp portant le même nom que le fameux lac. Réalisé et produit par Sean S. Cunningham, lequel avait déjà notamment œuvré en tant que producteur sur le film culte de Wes Craven La dernière maison sur la gauche en 1972, Friday the 13th (ou Vendredi 13 chez nous) fut le premier volet d'une longue (trop longue?) saga de slashers, concurrente directe d'une autre fameuse franchise intitulée Halloween initiée en 1978 par le génial John Carpenter. L'occasion alors pour Sean S. Cunningham de se lancer dans ce même type d'aventure horrifique sans pour autant avoir la moindre idée d'un quelconque scénario ! Pourtant, n'en déplaise aux fans de Michael Myers, celui écrit par Victor Miller peut se targuer de proposer un contenu légèrement supérieur. Car en dehors du fait que Halloween soit aussi passionnant qu'un documentaire montrant un type promener son chien durant plus de quatre-vingt dix minutes, sa poignée de meurtres ne se comptant que sur les doigts d'une seule main manquent cruellement d'originalité :cinq meurtres dont au moins deux au couteau et deux commis par étranglement (il y en a même un qui mixe les deux) ! Question originalité, ce fut le désert... contrairement au tueur du premier Vendredi 13 dont les meurtres le portèrent immédiatement (du moins dans mon cœur) au panthéon des boogeymen au même titre que le grand brûlé Cropsy de The Burning (Tony Maylam, 1981) ou le soldat dément de The Prowler (Joseph Zito, 1981). D'ailleurs, savez-vous quel rapport entretiennent ces trois slashers ? Non ? Et bien tous les trois bénéficièrent des talents du plus reconnu des maquilleurs et spécialistes des effets-spéciaux gore de l'époque, Tom Savini...


Bien que tout comme ses adversaires, Vendredi 13 ne repose en très grande partie que sur son bodycount et le degré d'horreur étalée à l'écran, le long-métrage de Sean S. Cunningham bénéficie de surcroît du concept de ''twist'' souvent absent de la concurrence. Et deux parmi ceux restés les plus célèbres du genre s'y trouvent justement. Celles et ceux qui n'ont toujours pas découvert le premier volet de la franchise sont priés de sauter directement jusqu'au prochain paragraphe...

En général, lorsque l'on demande aux néophytes qui est Frankenstein, ceux-ci répondent qu'il s'agit du monstre déambulant dans le roman de Mary Shelley ou les divers longs-métrages éponymes. Concernant Vendredi 13 premier du nom, c'est un peu la même chose lorsque l'on demande au gens qui est le tueur qui dissémine des cadavres ça et là. Car contrairement à ce que laisse supposer le film et surtout ses différentes séquelles, le tueur est ici une tueuse. Une jolie surprise qui nous attend en fin de métrage en la personne de Betsy Palmer (ici, relativement flippante) qui interprète donc Pamela Voorhees, la mère de Jason. Autre twist qui lui s'avère quelque peu traumatisant, se situe à la toute fin du long-métrage lorsque au lendemain du massacre, l'unique survivante Alice (l'actrice Adrienne Taylor) se réveille à bord d'un canot au milieu du Crystal Lake lorsque surgit des eaux un Jason Voorhees en piteux état. Un concept qui sera d'ailleurs repris à plusieurs occasions [Fin du spoil!].


Ventre perforé à l'aide d'un couteau, égorgements, coup de hache dans le crâne, gorge transpercée par la pointe d'une flèche en métal et j'en passe... Le travail de Tom Savini est une fois de plus remarquable et fait ici honneur à son tueur. Le maquilleur s'en donne à cœur joie et si le film est moins gore qu'un Maniac (William Lustig, 1980), Vendredi 13 premier du nom, il propose par contre nettement plus de meurtres. Le principe du slasher reposant davantage sur son Bodycount que sur la finesse de son scénario ou sur celle de son interprétation, les moniteurs adolescents tombent les uns après les autres avec la régularité d'un métronome. Si l'on compte le meurtre du tueur lui-même, on atteint l'honnête (et très rond) chiffre de dix victimes. Ce qui demeure un très bon score pour l'époque... Bon après, on ne va tout de même pas se mentir. En dehors des meurtres, Vendredi 13 demeure très basique. Sean S. Cunningham ne s'intéresse absolument pas à la psychologie de ses personnages qui pour la plupart n'ont qu'une vue d'ensemble des rapports humains. Une vue qui se situe d'ailleurs généralement en dessous de la ceinture. Pas de quoi se pâmer d'admiration devant les uns et les autres, ni ressentir le moindre sentiment de consternation ou d'abattement devant tel ou tel passage de vie à trépas. Le long-métrage de Sean S. Cunningham n'en demeure pas moins l'un des classiques du slasher comme en témoignent en outre les onze longs-métrages qui lui ont succédé (neuf séquelles, un crossover aux côtés de Freddy Krugger et un remake) et dont le douzième devrait arriver dès l'année prochaine, une série télévisée composée de soixante-douze épisodes diffusée chez nous pour la première fois dès le 13 novembre 1989 dans l'émission culte Les accords du Diable sur La Cinq, ou encore deux jeux vidéos sortis sur différentes plate-formes et respectivement en 1989 et 2017. Sans parler des chansons dédiées à Jason ou les milliers de goodies qui furent produits jusqu'à maintenant...

 

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