Soirée un peu
particulière hier à partir de 21h00 puisqu'uniquement consacrée au
format court. Douze courts-métrages plus ou moins réussis, avec
quelques courts-métrages anecdotiques et d'autres, au contraire,
carrément réjouissant. La soirée à débuté avec Pièce
Rapportée de
Carine May et Hakim Zouhani, ou comment assurer la cohésion
familiale lorsque l'un de ses membres est enfermé en prison depuis
de nombreuses années. Nous sommes en 2050 et Kamel sort enfin de
prison après avoir purgé une peine de vingt-six ans. Le monde
autour de lui a bien changé et chez son fils, sa belle-fille et leur
gamine qui l'accueillent à bras ouverts s'est imposé un nouveau
membre : un androïde, parfaite réplique de Kamel. Pièce
Rapportée est
une dystopie dans laquelle la vie de chacun est régie selon des
codes (une voix annonce à tous les mesures à prendre dans la
journée) dans un milieu qui rappelle des quartiers sensibles remis
au goût du jour (les tours HLM version 2050 arborent d’étranges
silhouettes). Si le sujet est intéressant, il manque cependant de
profondeur et malgré sa durée d'un quart-d'heure se révèle au
final assez ennuyeux. Tout comme La Peur du Vide
de Thomas Soulignac qui s'offre tout de même les services de
l'actrice espagnole Carmen Maura (La Communidad),
enfermée dans un appartement dominé par un impressionnant tas de
détritus qui semble mu par une existence propre. Pas vraiment clair,
le récit nous mène sur un chemin qu'il est difficile d'identifier.
Tout au plus verrons-nous dans ce récit finalement assez plat, le
portrait sinistre d'une vieille dame obsédée par le vide (le tas de
détritus semble en effet volontairement boucher la seule vue en
hauteur de l'appartement de la propriétaire), mais surtout, une
courte chronique sur la solitude et la vieillesse menant à une
certaine forme de psychose.
Les
onze minutes de Welcome Home Allen
proposent quant à elles un contenu totalement différent, du moins,
beaucoup plus ouvert puisqu'il met en scène quatre homme (des
vikings?) de retour chez eux après avoir accompli une mission durant
laquelle ils ont perdu l'un des leurs. L'un des principaux atouts du
court-métrage de Andrew Kavanagh demeure dans le contraste entre ces
individus provenant d'une époque qui semble n'avoir rien de commun
avec le monde qui les entoure. J'en veux pour preuve la petite
embarcation à moteur, ou plus encore le minuscule village constitué
de mobile-homes. Un voyage dans le temps intriguant et non dénué
d'intérêt, entre Le Guerrier Silencieux
de Nicolas Winding Refn et Coin Coin et les
Z'Inhumains
de Bruno Dumont. Étonnant. La soirée se poursuit donc dans de
meilleures conditions. Ce que tente à prouver Le
Prix à Payer
du sud-coréen Lee Chung-Hyun. La rencontre entre une gamine de
dix-huit ans qui accepte d'offrir sa virginité à un type
exclusivement attiré par les jeune fille mineures, contre la somme
de mille dollars. Assez cru, ce court de quatorze minutes réserve
une surprise aussi dérangeante qu'inattendue servant de morale à un
sujet plutôt délicat et osé à aborder.
L'une des excellentes
surprises de cette soirée nous venait de Belgique. Rappelant l'un
des fameux épisodes de la série de science-fiction The
Twilight Zone
sans forcément en reprendre l'élément fantastique, Le
Monde à l'Envers
évoque un monde dans lequel la normalité est conçue de manière
différente de la notre. Peter Ghesquière imagine en effet un
univers dans lequel la trisomie est la norme et l'homme tel qu'il est
idéalement représenté chez nous est une tare. Poétique, Le
Monde à l'Envers
est également assez touchant, presque exclusivement interprété par
des acteurs atteints de trisomie 21 (l'auteur jouant avec humour sur
l'absence d'un chromosome chez le fils du couple pour expliquer sa
déficience).
Le court-métrage de Peter Ghesquière est surtout l'occasion de
contempler une œuvre à l’esthétisme irréprochable rappelant
fortement les œuvres (d'art) de Roy Andersson (Sånger
Från Andra Våningen).
A
la suite de ce joli moment de tendresse, passage vers la caisse d'un
supermarché où le cent-millième client se voit offrir
l'opportunité de remplir gratuitement un caddy. Il a pour cela,
droit à une minute seulement. Son épouse, qui a pour habitude de
collecter tous les bons de réduction possible décide la veille
d'entraîner son époux afin qu'il puisse optimiser la minute qu'il
lui permettra dès le lendemain de remplir un caddy de marchandises
gratuites. Mais rien ne va se passer comme prévu. Gratis
de
Merijn Scholte-Albers et Tobias Smeets est un pur moment de détente
opposant une femme au caractère vénal à un époux subordonné.
D'une duré de huit minutes seulement, ce court est l'occasion de
mettre en avant certains des dysfonctionnements du couple bien que
les auteurs aient choisi d'apporter une conclusion optimiste. La
Tête des Autres
de l'américain Stephen Winterhalter joue, lui, dans un registre
plutôt macabre avec son assemblée de nantis assistant à des
exécutions sommaires et sans procès. Un enchaînement de
décapitations sans autre motivation que les joies du spectacle.
Esthétiquement irréprochable, ce court de douze minutes pâtit
surtout de son manque de profondeur en matière d'écriture. Si
Stephen Winterhalter a su capter le visage de ses interprètes et
l'incroyable décor qui les entoure, on est cependant déçu de n'y
voir rien d'autre qu'une recherche esthétisante...
Direction
la Suisse avec l'excellent Martien
de
Maxime Pillonel où le braquage d'une station-service ne va, bien
entendu, pas se dérouler comme prévu. Entre spectacle déjanté à
la Alex de la Iglesia et surréalisme, le spectateur navigue dans un
univers abracadabrantesque dans lequel surnagent un sourd, un cul de
jatte, un mongolien, et deux braqueurs amateurs. Simple, mais
jouissif ! Totalement anecdotique mais heureusement, d'une très
courte durée (2 minutes), Le Mariage
de Ben et Chris Blaine oppose un couple à marier à plusieurs
opposants au mariage lors de la cérémonie. De quoi souffler durant
cent-vingt secondes avant l'excellent Kleptomaman
de l'allemande Pola Beck où la mère d'un tout jeune enfant est
surprise par le vigile d'un supermarché en train de voler dans les
rayons. Pour se sortir de cette situation délicate, la jeune femme
raconte au vigile médusé sa condition de mère, de la conception de
son enfant, jusqu'à son accouchement. Enormissime court-métrage de
huit minutes, Kleptomaman est
sans aucun doute le meilleur court auquel nous avons assisté hier
soir. Bourré d'humour, parfois osé, Pola Beck dresse le portrait
d'une mère de famille qui pour s'en sortir ose énumérer tous les
aspects négatifs que peut connaître une future maman. Inventif,
délirant, superbement monté, Kleptomaman
est un pur moment de bonheur cinéphilique. A voir absolument !!!
C'est
autour de deux courts-métrages dont la thématique est sensiblement
la même que nous avons terminé notre soirée. D'un côté, Le
Syndrome de la Serrure
de Jean-Baptiste Durand, de l'autre Goutte à
Goutte
d'Alexandre Gillet et Benjamin Pallier. Deux courts français qui se
révéleront au final assez anecdotiques et tournant autour des
toilettes. Dans le premier, une jeune femme pressée d'aller aux
toilettes est dérangée par l'arrivée inopinée d'un étranger,
dans le second, deux hommes que tout oppose se croisent dans un
urinoir. Le premier est relativement classique, mais le second, lui,
propose une conclusion originale mais absconse du fait que les
interprètes soient assez mauvais. Une fin de soirée consacrée aux
courts-métrages assez décevante mais qui ne nous fera pas oublier
les quelques pépites que nous avons découvertes durant ces deux
heures de programme. A réitérer le plus rapidement possible...
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