Doucement, sûrement,
mais aussi de manière très certainement laborieuse, je continue à
me pencher sur la vaste franchise consacrée au Shogun aveugle
Zatoïchi. Un personnage Ô combien attachant qui fut au centre d'un
nombre impressionnant d’œuvres cinématographiques. En effet, à
ce jour, vingt-sept longs-métrages ont été réalisés entre 1962
et 2003 et la plupart d'entre eux ont été principalement
interprétés par l'acteur japonais Shintarō Katsu. Et comme si cela
ne suffisait pas, une série vit le jour dès 1974 pour s'interrompre
cinq ans plus tard. Au total : quatre saisons pour cent
épisodes ! Le dernier article était consacré à La
lettre,
le neuvième film de la franchise. Il est donc logique qu'aujourd'hui
j'aborde La revanche
qui dans son pays est connu sous le titre Zatōichi
Nidan-Kiri.
Nous y retrouvons donc le protecteur de la veuve et de l'orphelin(e)
pour une dixième aventure qui désormais, on le sait, s'offre sous
la nouvelle esthétique de la couleur et qui s'inspire une fois
encore de la nouvelle originelle du romancier japonais Kan Shimozawa.
Après Kenji Misumi, Kazuo Mori, Tokuzō Tanaka, Kimiyoshi Yasuda
ainsi que Kazuo Ikehiro, c'est au tour du réalisateur Akira Inoue,
mort l'année dernière à l'âge de quatre-vingt quinze ans de se
saisir du personnage de Zatoïchi pour en faire sien. Ce sera
d'ailleurs pour lui l'unique occasion de pénétrer dans l'univers de
ce personnage de l'ère Edo couvrant une période s'étalant entre le
dix-septième siècle et le dix-neuvième. Dans cette nouvelle
aventure, Zatoïchi remet les pieds dans un petit village de campagne
qu'il n'a pas revu depuis dix ans. Sa tête étant toujours mise à
prix, il est attaqué par deux hommes sur lesquels il parvient à
garder le dessus. L'un meurt tandis que l'autre prend la fuite après
avoir fait les poches de son ''regretté'' compagnon. Une fois arrivé
au village, Zatoïchi apprend que son ancien chef, Maître
Hikonoichi, est mort voilà deux semaines. Assassiné par un homme
dont on ignore encore l'identité, sa fille prénommée Sayo est
désormais enfermée dans une maison close du nom de Chojiro
dont le propriétaire est l'intendant Tatsugoro. Un personnage
vaniteux qui traite les femmes du village en esclaves sexuelles et
vole les hommes quand il ne les tue pas purement et simplement.
Zatoïchi
connaît bien Sayo à laquelle il chantait une berceuse lorsqu'elle
n'était qu'une toute jeune enfant. Après avoir fait un bon repas et
avoir bu du saké, Zatoïchi se met en route vers la maison close où
il a l'intention de revoir Sayo afin de la faire libérer. La
revanche
débute par un magnifique plan plongé dans la brume et perpétue
l'esprit même de la saga. Shintarō Katsu continue à interpréter
ce personnage d'homme valeureux dont l'instinct n'a jamais été
aussi proche d'un sixième sens que dans ce dixième long-métrage. Akira Inoue et le scénariste Minoru Inuzuka nous concoctent à
leur tour un savant mélange entre humour, combats au sabre et drame.
Dans ce récit cruel où les femmes sont contraintes d'offrir leurs
corps à de libidineux clients à défaut de quoi elles sont durement
battues à coups de planches de bois, surgit le fameux humour de
notre principal protagoniste. La franchise s'éternise et rien ne
change vraiment. Zatoïchi se montre toujours aussi friand de
boulettes de riz tandis qu'il use de son sabre avec la même
parcimonie qu'un scorpion économisant son venin. On rit donc parfois
(le repas à son arrivée au village) mais surtout, l'on craint pour
la vie de notre héros même s'il nous a habitué à se sortir de
situations théoriquement inextricables. Aveugle mais capable de
détecter la moindre présence, Zatoïchi, l'ancien samouraï déchu
use de son arme comme s'il s'agissait de l'extension directe de son
bras. Le grand méchant du film est personnifié par l'acteur Jun
Katsumura qui se fond dans le rôle d'un individu perfide et
fabulateur. Le plaisir de voir notre héros atteint de cécité s'en
prendre à des êtres veules demeure intact. Comme de le retrouver
une fois encore lors d'une partie de dés, entouré de tricheurs. Le
cadre lui-même demeure authentique. Entre les costumes, les geishas
et ces vieilles Minkas
faites
de planches de bois et de portes coulissantes, la reconstitution
conserve tout son charme et participe de la fascination que l'on
éprouve devant les mésaventures du plus célèbre masseur aveugle.
La franchise a beau en être déjà à son dixième opus, on ne s'en
lasse toujours pas. D'autant plus que le film nous offre
d'authentiques moments de bravoures...
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