Premier
d'une série de films s'attaquant de manière féroce à l'Amérique
puritaine et conservatrice, " Bienvenue dans l'âge ingrat"
débute sur un sublime air de Frédéric Chopin avant d'interrompre
sa mélodie et de nous plonger ou plutôt Replonger dans le monde
implacable et brutal de l'adolescence. Celle de ceux qui ont vécu
cette inévitable période de la vie comme un véritable calvaire.
La
toute jeune Dawn alors âgée de onze ans, au physique ingrat et aux
robes d'un goût douteux nous est présentée en toute simplicité
lors de la sempiternelle heure du repas du midi dans la cantine de
son collège. Une certaine vision de l'idéal vestimentaire et du bon
goût instauré très certainement dans toutes "bonnes"
familles américaines semblent avoir une place prépondérante. On
constate assez vite que cette jeune fille est là pour en baver
puisqu'elle se fait malmener par ses camarades qui chantent à
tue-tête "gouine, gouine, gouine" dans sa direction ou
lorsqu'au dessus de son casier se rejoignent d'immenses flèches
dessinées à coup de bombes au dessus desquelles sont écrits les
mots "gouine" ou encore "saucisse sèche" qu'elle
ne peut véritablement pas ignorer. Et même lorsqu'elle tente
vainement de venir en aide à un jeune garçon malmené par trois
autres, celui-ci ne trouve d'autre manière de la remercier que de
l'insulter.
Sa
jeune sœur Missy, qui n'a aucune ressemblance physique avec Dawn,
est la petite princesse de la famille et joue de son jeune âge et de
sa beauté pour obtenir grâce aux yeux de ses parents. Ce qui a
tendance à exaspérer Dawn. On sent poindre chez cette jeune fille
désœuvrée un désir profond de révolte. Lorsqu'elle demande à
une jeune fille de son âge les raisons pour lesquelles elle la
déteste, cette dernière lui réponds que c'est parce qu'elle est
laide. Alors, pour se consoler, elle retrouve son unique ami dans une
petite cabane installée dans le jardin du pavillon familial et avec
lequel elle a créé le "club des gens spéciaux".Elle y
raconte ses rêves de popularité. Mais au collège ce sont toujours
les mêmes humiliations, les mêmes brimades auxquelles Dawn doit
faire face dignement et courageusement. Même lorsqu'elle trouve le
courage de se révolter contre trois jeune garçons écervelés, le
sort s'acharne à être contre elle.
Plus
tard la jeune fille tombe amoureuse de l'un des musiciens du groupe
dont fait partie son frère. Un homme bien plus âgé qu'elle et à
la réputation sulfureuse. Un homme qui ne pense qu'aux filles et aux
éventuelles relations sexuelles qu'il pourrait entretenir avec
elles. La nuit, Dawn répète des incantations amoureuses, persuadée
que son jeune et beau prince charmant tombera amoureux d'elle.
Malheureusement pour Dawn, une dispute entre son frère et son
"amoureux" lors d'une répétition musicale voit ce dernier
quitter le groupe et semble ruiner ainsi tous les espoirs de la jeune
fille.
Un
jour, alors qu'un jeune voyou prénommé Brandon se joue de la
naïveté de Dawn en lui promettant de la violer à 15h l'après-midi
(sic!), une étrange relation débute entre les deux adolescents. Ils
commencent à se fréquenter, puis s'aimer. jusqu'à ce que Dawn et
Brandon se retrouvent séparés. A bout, la jeune fille sera malgré
elle responsable de la disparition de sa jeune sœur Missy...
Le
film de Todd Solondz est un pur régal à voir même s'il aborde un
sujet qui chez certains réveillera de douloureux souvenirs liés à
une époque difficile de leur existence. Le film a le charme des
réalisations indépendantes dont il fait partie d'ailleurs puisqu'il
fut présenté à Sundance lors de son célèbre festival consacré à
ce cinéma un peu en marge des grosses productions américaines. Les
jeunes acteurs sont brillants et touchants à la fois. La jeune fille
qui interprète le rôle principal a dans le visage un brin de
ressemblance avec le réalisateur et ce choix n'est sans doute pas
une coïncidence. Comme si Todd Solondz avait à travers ce film
tenté d'exorciser une partie de sa vie.
Le
film n'est pas exempt d'un certain humour, mais acide, ce qui le
rapproche de certaines productions du grand John Waters. On notera
toutefois l'absence totale de compassion du cinéaste pour son
personnage principal et auquel il n'offre même pas l'espoir d'une
fin heureuse...
"Bienvenue
Dans L'âge Ingrat" a reçu divers prix, confirmant et récompensant ainsi ses merveilleuses qualités.
Un
vrai bijou, une perle rare...
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