William
Lustig, le clandestin
Né le 1er février 1955
dans le quartier du Bronx à New York, qui aurait pu penser que
William Lustig, futur réalisateur du cultissime Maniac
allait d'abord se spécialiser dans le X en tournant coup sur coup,
les pornos The Violation of Claudia (en
1977) et Hot Honey (en
1978) ? Certainement pas ses parents comme on l'imagine. Ces
deux longs-métrages expliquent cependant peut-être pourquoi Maniac
sera aussi cru, réaliste, et surtout, terriblement malsain. Car si
les exactions de son tueur demeurent fort heureusement du domaine de
la fiction, et si certains effets dépassent parfois le cadre du
portrait froid et méticuleux (la séquence de l'amant se faisant
exploser la tête dans sa voiture est impressionnante mais relève de
la pure fiction dans son traitement), après le cauchemar
'slashérien'
qui éveille dans la moiteur de son sordide et minuscule appartement,
le tueur dont on suivra les péripéties durant plus d'une
heure-trente, la séquence suivante pourrait tout aussi bien ouvrir
les hostilités d'une scène purement érotique si William Lustig
n'avait pas choisi d'en faire une séwuence gore réaliste et
particulièrement éprouvante.
L'agonie de l'enfance
Les méthodes de l'assassin
Henry
Lee Lucas aurait pu glisser à l'oreille de Frank Zito que la
meilleure méthode pour ne jamais éveiller les soupçons de la
police est d'utiliser à chaque fois, une arme
différente (Henry, Portrait of a Serial Killer de
John McNaughton, 1986). Meurtre au fusil, au couteau, étranglement, Frank Zito
use de ce qu'il a sous la main. Mais invariablement, il
choisit de conclure la chasse en prélevant sur ses proies, un
trophée à l'aide d'un cutter. Toujours identique : le scalp de
ses victimes féminines. Car Frank Zito, que parfois, l'on prendrait presque
pour un individu normal (sa voisine ne soupçonne pas la bête qui se cache en lui) n'est jamais véritablement libéré de ses
obsessions. Sortir la nuit et prendre une vie n'est pas qu'un
exutoire qui lui permet, de retour dans son appartement, de passer à
autre chose. Car chez lui, dans cette étouffante atmosphère, on
comprend que le meurtre n'est que la première étape d'un processus
qui mène le personnage au plaisir œdipien qui l'étreint. Plus que
les crimes particulièrement sanglants dont Frank se rend coupable,
la fascination qu'exerce Maniac
se situe sans doute davantage dans ce portrait saisissant d'un homme
incarnant le fils ET la mère. Parallèlement à ces tueurs qui
prélèvent un 'souvenir'
de leurs victimes afin de retrouver l'excitation du meurtre exécuté
bien après les faits, Frank emporte le scalp de ses victimes pour
une raison qui sera rapidement évoquée. Se procurant, lorsque le
tueur en a besoin, des mannequins de vitrine, il y cloue les trophées
des femmes dont il a ôté la vie.
Frank
Zito est sans doute l'un des tueurs les plus étranges auquel le
septième art ait donné vie. Plus que le désir de faire de Maniac
un simple film de tueur bête et méchant à l'allure de slasher,
William Lustig dépasse son simple statut de
'serial killer film' et
plonge littéralement le spectateur dans la tête de son assassin.
Comme le fera d'ailleurs trois ans plus tard le cinéaste autrichien
Gerald Kargl avec son traumatisant Schizophrenia
(Angst).
Frank Zito s'adresse à sa mère disparue. Mais pas seulement puisque
c'est à travers ces mêmes lèvres qu'elle aussi s'exprime. Mais on
s'éloigne ici du pur produit fantastique puisque l'on a bien compris
que c'est Frank et personne d'autre qui persévère à la faire
revivre au delà de la mort et à lui dicter son attitude. Amour
immodéré pour sa génitrice ou 'syndrome
de Stockholm' ?
L'incarnation
de Joe Spinell
Né
le 28 octobre 1936 et décédé le 13 janvier 1989, l'acteur Joe
Spinell (de son vrai nom Joseph J. Spagnuolo) aura marqué de son incroyable faciès différents genres
cinématographiques. De ses débuts dans Le
Parrain de Francis Ford
Coppola pour lequel il ne sera pas crédité, jusqu'à son ultime
interprétation dans l'épisode pilote de la courte série Dream
Street (une
saison, six épisodes), en passant par Starcrash
de Luigi Cozzi dans lequel il côtoyait pour la première fois deux
ans avant Maniac,
l'actrice britannique Caroline Munro, Rocky 2
de Sylvester Stallone, Les Frénétiques (encore
aux côtés de Caroline Munro), Vigilante
(une autre bande culte signée William Lustig), ou Rapid
Fire
de David A. Prior, sa dernière incarnation sur grand écran. Joe
Spinell aura également été l'auteur de deux scénarii. Celui du
film qui nous intéresse ici, mais également de ce qui aurait dû
devenir la suite des aventures du maniaque, Maniac
2 : Mr Robbie.
Un projet que devait réaliser Buddy Giovinazzo, auteur du
traumatisant Combat Shock (produit
par Troma
Entertainment)
mais qui demeurera à l'état de court-métrages, quelques séquences
ayant tout de même été tournées. De ces deux films, l'acteur et
scénariste en est également le producteur. Co-produit par Andrew W.
Garroni et co-scénarisé par C.A.Rosenberg, Maniac
est donc en partie le bébé de Joe Spinell. Au moins autant que
celui de William Lustig.
La
mort de Joe Spinell a non seulement laissé la place à sa légendaire
interprétation, mais également à plusieurs hypothèses concernant
sa disparition. Si officiellement, l'acteur est mort d'une crise
cardiaque en raison de sa très grande consommation de drogue et
d'alcool consécutive au traumatisme engendré par le décès de sa
mère deux ans auparavant, certains cultivent une autre théorie qui
veut que le personnage de Frank Zito qu'il incarna neuf ans plus tôt
le hanta au point qu'il se mit à prendre des drogues et à boire de
l'alcool plus que de raison. Hémophile, Joe Spinell serait rentré
ivre, la veille de la découverte de son corps, se serait blessé,
aurait fini par s'endormir et se serait lentement, mais inexorablement, vidé de son sang.
Légende ou pas, ce détail plutôt sordide renvoie évidemment au
délirant et très sanglant final de Maniac.
Vrai ou faux, toujours est-il que l'acteur est devenue depuis, l'une
des icônes du cinéma d'épouvante les plus reconnues dans le monde.
Depuis, l'homme repose au cimetière de 'Calvary
Cemetary' (littéralement,
le Cimetière du Calvaire) dans le Queens.
La
bande originale, Les Meurtres et les effets-spéciaux
La
fameuse séquence durant laquelle, Frank parcourt les rues sombres de
New York à la recherche d'une nouvelle proie avant de trouver celle
qui lui convient : une infirmière qui plutôt que de patienter
jusqu'à ce qu'on vienne la récupérer, choisit la mauvaise option
en parcourant la distance qui la sépare de la rame de métro qu'elle
a finalement décidé de prendre. Une poursuite infernale entre rues
désertes et métro qui prend des allures de lieu désaffecté. La
dernière rame venant d'abandonner la jeune femme à son triste sort
(impressionnante Kelly Piper dans son rôle le plus marquant), la
scène se termine dans des toilettes publiques aux murs 'tatoués'
de
graffitis en tous genres... Puis c'est au tour du mannequin Rita de
faire les frais de la folie de Frank lors d'une séquence qui en
comparaison avec le spectacle sanglant et morbide auquel nous venons
d'assister, paraît relativement sobre. Entre temps, Frank aura eu le
loisir de nous faire découvrir un autre aspect de sa personnalité
en se sociabilisant auprès de la belle photographe Anna d'Antoni,
incarnée par la superbe Caroline Munro. On pourrait croire pendant
un instant que le tueur s'est définitivement effacé au profit d'un
Frank séducteur, mais les apparences sont parfois trompeuses...
Anecdotes
Tourné
à New York et majoritairement de nuit, Maniac a
rencontré quelques difficultés puisque William Lustig ayant décidé
de tourner le film sans autorisations légales adéquates, il
lui a fallut faire vite et ce, notamment lors de la séquence de la
tuerie à bord de la voiture. Le coup de feu ayant attiré
l'attention de passants, il a fallut au réalisateur ainsi qu'à
l'équipe technique et les interprètes, se dépêcher de quitter les
lieux à l'issue du tournage avant que ne débarquent les autorités.
Trente huit ans après sa sortie, Maniac
n'a pas perdu de sa superbe et face à la concurrence actuelle, il
demeure encore très largement au dessus du niveau de référence
actuel. Plusieurs anecdotes entourent le film bien au delà de la
légende qui entoure le décès de Joe Spinell. La plus évidente
demeurant autour de la réception de ce qui restera comme l'un des
quelques longs-métrages horrifiques à avoir connu le (dés)honneur
de la censure en France puisqu'il fut interdit pendant un an (ce qui
en comparaison des cinq années d'interdiction de Massacre
à la Tronçonneuse
de Tobe Hooper peut paraître anecdotique). Le film connaîtra tout
d'abord les honneurs d'une édition au format VHS avec sa parution
dans la cultissime collection 'Les
Classique de l'Horreur et de l’Épouvante' de
René Château Vidéo, à l'arrière des jaquettes desquelles était
mentionnée la fameuse citation :'Les
Films que Vous ne Verrez Jamais à la Télévision !'.
Pire qu'en France, le film connut de sévères coupes selon les pays
où il fut distribué. Notamment en Angleterre et en Australie.
L'anecdote la plus surprenante demeure sans doute celle entourant la
célèbre chanson 'She's
a Maniac' que l'on entend dans la comédie musicale Flashdance
d'Adrian Lyne. Il faut savoir qu'à l'origine, elle fut composée
pour le long-métrage de William Lustig mais n'étant pas de la même
inspiration que le reste de la bande originale, elle fut finalement
rejetée avant de devenir le succès que l'on sait...
Bande annonce Remake 2012
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