Si morts-vivants,
vampires, démons et loups-garous sont régulièrement mis en scène
au cinéma, la momie, elle, n'a malheureusement pas autant les
faveurs des cinéastes. Pourtant mise en scène dans un certain
nombre de longs-métrage, elle ne sera en réalité l'héroïne que
d'une quinzaine d'entre eux, majoritairement horrifiques, et parmi
lesquels l'un des plus importants demeure The Mummy
que tourna en 1932 le réalisateur allemand Karl Freund. La créature
y était interprétée par l'immense Boris Karloff et fut la première
incartade dans l'univers de cette créature du bestiaire fantastique
de la part de la société de production et de distribution
américaine Universal
Pictures !
Celle-ci produisit cinq autres longs-métrages entre 1940 et 1955
dont trois furent interprétés par l'acteur Lon Chaney Jr., tandis
que le dernier intitulé Abbott and Costello Meet
the Mummy
sera une comédie horrifique réalisée par Charles Lamont et
interprétée par le célèbre duo de comiques les
''Deux Nigauds''
composé de Bud Abbott et Lou Costello. Quatre ans plus tard, ce sera
au tour de la société britannique Hammer
Film Productions
de s'approprier le mythe avec une série de quatre longs-métrages
qui mettra douze années pour se clore avec Blood
from the Mummy's Tomb
de Seth Holt. À noter que ce dernier sera l'adaptation du roman de
Bram Stocker (Dracula),
The Jewel of Seven
Stars datant
de l'année 1903. Mais le premier des quatre films consacrés à la
momie auxquel la Hammer
accorda
son intérêt fut réalisé en 1959 par Terence Fisher et n'est autre
qu'un remake de l'original datant de 1932. Le réalisateur prend
alors un très gros risque sachant que The Mummy
est un classique du fantastique américain. Ce qui ne semble guère
le gêner puisque le britannique ira jusqu'à reprendre le titre tel
quel alors que dans notre pays, si l'original fut simplement traduit
sous le titre de La momie,
son remake vit le jour chez nous sous celui de La
malédiction des pharaons.
Pas d'amalgames possibles, donc...
Dans
cette nouvelle version, pas de Boris Karloff mais un Christopher Lee,
forcément méconnaissable dans la peau de la créature mais
également dans celle de Kharis, condamné à être momifié pour
l'éternité après avoir tenté de ressusciter la femme qu'il
aimait, la princesse Ananka (l'actrice Yvonne Furneaux, qui incarne
également l'épouse du héros John Banning, Isobel). Kharis, qui
n'est pas une personnalité historique de l’Égypte antique mais un
personnage de fiction non pas créé à l'occasion du film mais à
celle de The Mummy's Hand,
le second long-métrage de la période Universal
Pictures,
lequel réapparaîtra d'ailleurs dans les films à venir, The
Mummy
version Hammer
le voyant intervenir pour la dernière fois. Aux côtés de
Christopher Lee, nous retrouvons l'irremplaçable Peter Cushing,
fidèle collaborateur du cinéaste britannique qui incarne ici
l'archéologue John Banning, mais également Eddie Byrne dans le rôle
de l'inspecteur Mulrooney ou Felix Aylmer dans celui du père de
l'archéologue, Stephen. Le récit situe son action à la fin du
dix-neuvième siècle en Égypte. Là-bas, John Banning, son père et
son oncle Joseph Whemple (Raymond Huntley) mettent à jour le tombeau
de la princesse Ananka, une prêtresse du temple de Karnak morte
depuis quatre millénaires. Malheureusement pour les trois hommes, un
individu malveillant (l'acteur George Pastell) va jeter sur eux une
malédiction en réveillant la momie Kharis, laquelle aura désormais
pour but de tuer ceux qui dérangèrent la Princesse dans son sommeil
éternel...
Il
y a les pros et les anti. Ceux qui préfèrent l'original (dont votre
serviteur fait partie) et ceux qui préfèrent la mise en scène de
Terence Fisher à celle de Karl Freund. En réalité, les deux
œuvres n'ont rien de vraiment comparables et il faut surtout les
traiter avec tout le respect qui leur est dû et prendre compte des
époques durant lesquelles l'un et l'autre des deux films furent
tournés. Si Chirstopher Lee, affublé de ses bandelettes dont le
principal atout visuel est qu'elles sont imprégnées de boue, fut un
immense interprète de l'âge d'or du cinéma d'épouvante et de la
Hammer en
particulier, il semble moins convainquant dans la peau de cette
créature (il est d'ailleurs impossible de l’identifier autrement
que par son regard) en raison d'une démarche un peu... ridicule...
mais fort heureusement rattrapée par quelques irruptions à travers
quelques fenêtres plutôt convaincantes. La
malédiction des pharaons a
le culot d'avoir moins bien vieilli que l'original alors qu'il lui
est postérieur de plus d'un quart de siècle ! Le plus
significatif demeure ces longues, trop longues séquences situées en
Égypte à l'époque où Karhis régnait. Décors qui sonnent faux et
ne rendent pas le même faste absolument remarquable que le sublime
Cleopatre de
Joseph L. Mankiewicz et ses quarante-quatre millions de dollars de
budget. En même temps, avec ses cent vingt-cinq mille livres
sterling de budget (qui à l'époque équivalaient à environ
cent-cinquante mille dollars), le film de Terence Fisher avait peu de
chance de nous offrir autre chose que les affreux décors de
carton-pâte égyptiens. Une somme cependant plus importante que
celle allouée à The Curse of Frankenstein
en 1957 (65 000 livres sterling) ou à Horror Of
Dracula
en 1958 (81 000), deux films réalisés quelques années en arrière
par Terence Fisher lui-même. Preuve que la Hammer
comptait bien sur ce nouveau personnage du bestiaire fantastique
désormais intégré parmi nombre d'autres d'entre elles dans le
paysage cinématographique horrifique britannique. Malgré la
présence d'illustres interprètes, d'un réalisateur réputé, d'une
Yvonne Furnaux au regard envoûtant (sœur de Catherine Deneuve dans
l'angoissant Repulsion
de Roman Polansi en 1965), du compositeur et pianiste britannique
Franz Reizenstein ou des fidèles Bernard Robinson aux décors et
Jack Asher à la photographie, The Mummy version
1959 est malheureusement une déception...
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