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dimanche 5 mars 2017

Lorna, l'Incarnation du Désir de Russ Meyer (1964) - ★★★★★★☆☆☆☆



Pour ce second article consacré au cinéaste Russ Meyer, j'ai choisi d'aborder son dixième long-métrage. Un dixième film qui n'est séparé du premier que de cinq années puisque durant les années soixante, le pape du trash fut particulièrement prolifique et tournait en général entre deux et trois longs-métrages par an. Alors que The Immoral Mr. Teas était relativement médiocre, Russ Meyer a fait du chemin depuis, et il faut reconnaître à Lorna, l'Incarnation du Désir, un certain nombre de qualités. Cette fois-ci, on a droit à un véritable scénario qui, s'il n'a rien d'extraordinaire, propose enfin une véritable histoire, avec un début, un milieu, et une fin.
Lorna, l'Incarnation du Désir, c'est l'histoire d'une jeune épouse, mariée à un homme depuis un an (ils vont fêter leur premier anniversaire de mariage dès le lendemain), mais qui auprès de celui-ci, n'a pas réussi à s'épanouir dans sa vie de femme. Lorna rêve de changer d'air, de quitter ce bled paumé, cette maison où elle reste enfermée. Jim lui promet de l'emmener en ville, mais la jeune femme attend, encore et encore, sans jamais voir ce jour béni où elle pourra enfin vivre heureuse et épanouie. Concernant leur intimité, Jim est comme un certain nombre d'hommes et ne pense qu'à son plaisir sans même écouter les besoins de Lorna. Celle-ci n'a jamais connu d'autre homme que lui et n'a jamais vraiment ressenti de plaisir entre ses bras.

Alors, lorsqu'elle croise la route d'un fugitif qui la viole, elle ressent lors de cet acte forcé des sensations qu'elle n'a jamais connues auprès de Jim. Lorna tombe follement amoureuse de cet étranger. Comme elle tomba amoureuse de Jim un an en arrière. Elle emmène l'évadé chez elle, persuadé que Jim rentrera tard. Mais le patron de celui-ci lui offre, ainsi qu'à ses deux compagnons, leur après-midi, afin qu'ils fêtent tous ensemble, l'anniversaire de leur mariage à Lorna et lui...
Russ Meyer explore plusieurs faces sombres de l'âme humaine. Surtout celle de l'homme puisque Lorna, seule représentante de la gente féminine à part l'intervention au début du film d'une jeune femme ivre, les individus qui parcourent son œuvre son soit des violeurs, soit des voyeurs (Jonah, le compagnon idiot de Luther prend un malin plaisir à regarder son compagnon violer une jeune femme), soit des fugitifs. Et lorsqu'ils ne sont pas tant mauvais que cela, ils demeurent d'un égoïsme saisissant. Pour preuve, le comportement très personnel d'un Jim que l'on sent amoureux et pourtant terriblement insensible aux desiderata de Lorna.
Le cinéaste joue également sur les pulsions de jalousie générées par un Luther (excellent Hal Hopper) qui pousse Jim à penser que Lorna le trompe lorsqu'il part au travail. Enfin, il y a Lorna, ce personnage pur et innocent naviguant dans un monde de mécréants. La très jolie et plantureuse Lorna Maitland incarne cette jeune femme à l'innocence presque intemporelle dans un bled paumé où ne surgit presque aucun valeur morale du côté du mâle. La légère pointe d'érotisme que Russ Meyer injecte obligatoirement à son œuvre ne souffre d'aucune forme de vulgarité. Juste un clin d'oeil à son obsession pour les fortes poitrines mais qui, ici, ne génère aucune pulsion sexuelle de la part du spectateur. Étonnamment, on se surprend à ressentir à brève échéance mais à plusieurs reprises, une grande sympathie pour Lorna et cette vie gâchée au bras de son époux.

On en regretterait presque d'avoir osé poursuivre notre route malgré les avertissements de ce curieux prêcheur devant cette fin tragique sur laquelle Russ Meyer propose de clore son œuvre. Lorna, l'Incarnation du Désir est une assez bonne surprise qui pourtant a été poursuivi pour obscénité dans le Maryland, la Pennsylvanie et la Floride à l'époque de sa sortie...

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