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dimanche 4 août 2024

White Room de Patricia Rozema (1990) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Tout n'est toujours que question de subjectivité et de sensibilité lorsqu'il s'agit d'exprimer ses émotions devant un chant, un air de musique, un poème ou un long-métrage. Pourquoi la bande musicale signée de Pino Donaggio pour le chef-d’œuvre de Brian De Palma Body Double me hante-t-elle depuis ces quarante dernières années ? Pourquoi Miracle Mile de Steve De Jarnatt a-t-il créé chez moi un phénomène de persistance rétinienne qui ne s'est depuis jamais relâché ? Et pourquoi désormais devrais-je vivre avec la sensation d'avoir découvert bien trop tard le second long-métrage de la réalisatrice américaine Patricia Rozema... ? Parce que White Room demeurera sans doute comme l'une des plus étonnantes, fascinantes et séduisantes expériences de cinéma, de cela, je suis persuadé. Le genre de long-métrage qui nous tombe entre les mains sans que nous n'ayons jamais tenté un seul instant de l'attraper au vol lorsque l'occasion se manifesta. C'est pourtant dans ce cas de figure là que s'est présentée l'occasion de découvrir ce joyau de romantisme, ce conte de fée où amour, névrose, ambition et musique se conjuguent pour nous offrir un authentique et pur moment d'humanité. Aussi déchirant que la perte de l'être le plus aimé au monde, aussi beau et intense qu'une ''première fois'' avec celui ou celle que l'on désire ardemment, derrière son énigmatique titre, White Room cache une œuvre troublante, parfois même déconcertante. Surtout lorsque la réalisatrice, également aux commandes de l'écriture monte son film en y intégrant des images iconiques et représentatives de l'esprit du personnage de Norme interprété par Maurice Godin. Un jeune homme qui après avoir quitté le cocon familial part s'installer seul, lequel a pour étrange habitude d'épier les gens chez eux lorsque tombe la nuit. C'est ainsi qu'un soir il assiste à la mort d'une chanteuse populaire connue sous le nom de Madelaine X (l'actrice (Margot ''Soeurs de sang'' Kidder), assassiné par un inconnu tandis que Norm demeure tétanisé devant l'acte. Empli de remords, il assiste aux obsèques de la chanteuse et y croise de manière brève une certaine Jane (interprétée par la magnifique Kate Nelligan) qu'il rencontrera de nouveau avant de lui proposer ses services de jardinier.


Jusque là, le jeune homme a trouvé un boulot de vendeur de journaux auprès de Zelda (Sheila McCarthy), une artiste plutôt ''originale'' qui lui propose de tenir son kiosque de manière intermittente. Fasciné par Jane à laquelle il avait tendu un mouchoir lors des obsèques de Madelaine X, la belle inconnue débarque un jour devant le kiosque afin de le lui rendre. Dès lors va naître une relation étrange entre cette très belle femme vivant à l'écart du monde et ce jeune garçon se rêvant d'écrire mais qui souffre d'être incapable de noircir la moindre page blanche... White Room démontre non seulement les qualités d'écriture et de mise en scène de Patricia Rozema mais également sa grande sensibilité. Œuvre qui sous cette forme n'aurait sans doute pas été en mesure d'être conçue par un homme, c'est bien donc toute de féminité que s'habillent le scénario et la mise en scène, dégageant une certaine poésie, une magie parfois déconcertante il est vrai, mais qui ne dénature jamais le propos et au contraire, l'enrichi. La relation entre les deux principaux protagonistes dénote une sincère complicité entre Kate Nelligan et Maurice Godin. Séduisant le spectateur à travers cette timide relation intime qui se dessine autour de leurs deux personnages et des soucis comportementaux que l'un et l'autre ont cultivé à leurs dépends tout au long de leur existence. D'un côté, un Norm pour qui parler ou même faire l'amour est une chose relativement délicate. De l'autre, le handicap de Jane face à son impossibilité de vivre au sein de ses concitoyens. Naît de ce mélange entre drame et romantisme une alchimie qui dispense chez le spectateur un réel sentiment de chaleur et de passion pour ces deux personnages hors du commun. Où le réel se confond avec l'imaginaire débridé de Norm. Et où la conclusion ne peut souffrir d'une telle noirceur que le jeune homme lui-même préférera la nier en recourant aux subterfuges qui lui ont toujours permis d'avancer dans la vie. Bref, White Room est un régal. Original, émouvant, poignant, Patricia Rozema signe là un très beau film...

 

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