Cela fait trois fois que
je vois L'empire des Ombres
(Vanishing on 7th Street)
et à chacune des projections, j'en ressors presque toujours aussi
décontenancé. Merde, quoi ! C'est quand même Brad Anderson
qui en est l'auteur. Celui de The Machinist,
de Happy Accidents
et de Session 9.
Et à ce titre, j'ai fini par lui interdire d'être mauvais. Quoique
le terme ne semble plus tellement adéquat puisqu'au fil des visions,
je me suis demandé si à l'issue de la cinquième ou de la sixième
projection je ne finirai finalement pas par aimer L'empire
des Ombres !
Le sujet passionnant tenant autour de ces ombres qui dans l'obscurité
totale sont capables de faire disparaître tout être fait de chair
en laissant derrière lui ses oripeaux n'est pas tout neuf. En
suivant déjà la première fois l'histoire de cette poignée de
protagonistes ayant survécu à un fléau expliqué par l'un d'entre
eux sous une forme philosophico-religieuse (pourquoi sommes-nous là,
à cet instant précis, vivants et regroupés en un même endroit
semble se demander Rosemary (l'actrice Thandie Newton)), on observera
d'abord que le film use de certains codes propres à l'univers de
Stephen King où l'enfance est d'une importance si considérable
qu'elle semble devoir survivre dans un monde où toute trace des
adultes paraît avoir disparue. Ensuite, et toujours par comparaison
avec le plus célèbre écrivain contemporain de romans d'épouvante
américain, le scénario d'Anthony Jaswinski semble avoir également
été inspiré par deux ouvrages de ce même auteur. La longue
nouvelle intitulée The
Mist qui
ouvrait le recueil de nouvelles Skeleton
Crew
en 1985 mais aussi et surtout le roman court The
Langoliers
qui lui se trouvait en première position du double recueil Minuit
2/Minuit
4
(sorti en un seul bloc sur le territoire américain sous le titre
Four Past Midnight
en
1990). Les deux ayant été respectivement adaptés pour le grand
écran par Frank Darabont en 2007 avec The Mist
et avant lui par Tom Holland pour la télévision en 1995 avec Les
langoliers.
J'aimerais d'ailleurs, si vous le voulez bien, revenir sur le concept
de ce dernier.
Des
créatures fantastiques au concept absolument remarquables puisque
Stephen King les imaginait comme des gardiens du temps. De
gigantesques créatures relativement repoussantes, aux dents acérées,
dévoreuses du temps passé et dont la première nécessité semblait
de bâtir l'avenir et ainsi préparer l'homme à y être plongé. En
clair, un futur régénéré sur la base d'une matière première
dévorée, digérée pour ensuite être recyclée. Les préoccupations
de Brad Anderson semblent être en revanche beaucoup plus proches des
visions propres à l'adaptation cinématographiques de The
Mist.
Sans prendre totalement le contre-pied du récit à l'origine duquel
se situe donc Stephen King, Brad Anderson oppose à la lumière,
l'obscurité et fait donc du moindre éclairage la source nécessaire
à la survie de ses protagonistes. Deux hommes, une femme et un
enfant. Une action se situant en grande partie dans un bar dont
l'électricité est maintenue grâce à un générateur dont on sait,
pour l'intérêt du suspens, qu'il cessera fatalement de fonctionner.
Quelques sorties à l'extérieur histoire d'éviter la monotonie,
L'empire des Ombres formule
l'habituel message selon lequel toute intervention, qu'elle
apparaisse bienfaisante ou non, entre dans une thématique d'ordre
théologique. Le réalisateur n'empêchera donc pas l'un de ses
protagonistes d'avancer des hypothèses religieuses comme semblent
avoir besoin de le décrire tous ceux qui craignent un jour de
mourir. Sortis de ces quelques considérations qui ne polluent pas
trop l'intrigue, reconnaissons qu'il ne se passe pas grand chose.
Beaucoup de bavardages et très peu d'action finalement.
Heureusement, L'empire des Ombres a
pour qualité de bien retranscrire cette peur ancestrale qui chez
l'homme le pousse généralement à cheminer vers la lumière plutôt
que vers l'obscurité. Encore un lien avec Stephen King puisque l'on
parle bien là d'une peur qui remonte également à l'enfance. Le
concept étant ce qu'il est, les effets-spéciaux, plutôt sobres,
s'avèrent par contre relativement efficaces, bien que très
répétitifs. Heureusement que le film nous assène d'ailleurs ces
quelques séquences parfois bien Creepy
car ce qui pose problème est le scénario. Trop attentiste, trop
lent, le film est à des années-lumières d'un The
Machinist
pour ne citer que l'un des plus brillants longs-métrages de Brad
Anderson. Allez, encore deux ou trois projections et je finirai bien
par idolâtrer L'empire des Ombres...
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