Un
soir d'orage, Chris Smith débarque devant le taudis où vit son père
Ansel, sa sœur Dottie, et leur belle-mère Sharla. Alors qu'il
gueule à gorge déployée pour que son géniteur lui ouvre la porte,
c'est Sharla qui l'accueille, la toison pubienne au grand jour. Chris
a des soucis d'argent. Il doit la somme de six mille dollars à
Digger Macaulay et s'il ne le rembourse pas dans les plus brefs
délais, il risque la mort. Problème : son père n'a pas un sou
et ne peut donc lui venir en aide.
Vient
alors une idée fumeuse dont Chris fait part à Ansel. Le jeune homme
a entendu de la bouche d'un certain Rex que sa mère aurait contracté
une assurance-vie dont l'unique bénéficiaire serait Dottie. Le père
et le fils imaginent donc un plan machiavélique pour se débarrasser
de la mère afin de récupérer l'argent de l'assurance. Les deux
hommes n'ayant pas l'âme de meurtriers, Chris fait appel à un
certain Killer Joe. Flic véreux, il lui arrive parfois de remplir
des contrats moyennant une certaine somme d'argent. Cependant, il
exige d'être payé d'avance, mais, comme Ansel et Chris n'ont pas
les vingt-cinq mille dollar qu'il demande, il acceptent la curieuse
proposition de Killer Joe qui leur impose de mettre Dottie, qu'il a
rencontrée un peu plus tôt, en caution. Même si l'idée rebute le
père et le fils, pris à la gorge, ils finissent par accepter...
Un
cas que ce William Friedkin. Alors qu'il approche les quatre-vingt
ans (il en aura soixante-dix sept le vingt-neuf août), le cinéaste
éprouve encore la ténacité des spectateurs les plus exigeants avec
une histoire inspirée par la pièce de théâtre éponyme écrite
par Tracy Letts. Friedkin nous a souvent habitués à des œuvres
chocs et non dénuées d'intérêt. Après l'éprouvant cauchemar
vécu par une jeune adolescente possédée par le Diable dans
L'Exorciste en 1973, la difficile incursion d'un jeune flic dans
le monde des homosexuels dans Cruising en 1980, ou encore dans
l'esprit sévèrement tordu d'un type persuadé que des insectes ont
la capacité de s'introduire sous la peau dans Bug en 2006, le
cinéaste revient en 2011 avec un film frappé du sceau de la folie
et de la machination.
L'impact
est assuré par une générale et brillante interprétation. Matthew
McConaughey est à peine reconnaissable dans le rôle titre. William
Friedkin lui offre un personnage en or et l'acteur se saisit de
l'occasion pour exploser à l'écran. Au même titre que la toute
jeune Juno Temple qui interprète la fragile Dottie. Emile Hirsch,
Thomas Haden Church et Gina Gershon complètent le tableau d'une
famille déjantée qui n'hésitera pas un seul instant à accepter
l'idée de se débarrasser de la mère de Chris et Dottie afin de
récolter une somme d'argent importante. Au dela du thriller
qu'annonce le sujet, on est saisit par la noirceur qu'arborent
certains aspect de Killer Joe. Il persiste encore une fois des
référence assez troubles qui viennent justifier les pensées et les
actes de certains personnages (Dottie se souvenant que sa mère a
tenté de la tuer lorsqu'elle n'était qu'une enfant) mais qui
barbouillent l'estomac des téléspectateurs.
Se
dessinent alors les contours d'un récit qui va au delà de
l'intrigue principale. Un sujet, lui-même, qui réserve des
surprises dont on devinera tout de même l'aboutissement bien avant
la fin. Graduellement, Killer Joe prend de l'ampleur. La
folie sous-jacente et l'urgence du propos s'intensifient jusqu'au
point culminant durant lequel tout s'éclaire, et où tout devient
limpide, déclenchant alors une conclusion dont la folie rappelle
quelque peu celle rencontrée dans le Texas Chainsaw Massacre
de Tobe Hooper. Une chute finale que certains ont jugée de
grotesque. Une farce, oui, mais visiblement parfaitement maitrisée
(il suffit de voir de quelle manière se clôt le film, sur les
dernière paroles de Killer Joe). A nous donc d'imaginer les quelques
secondes que le générique de fin fait disparaître...
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