Baptiste
Lachaud est un oisif. Un contemplatif. Il n'exerce pas d'activités,
passe son temps allongé sur les bancs ou dans les champs pendant que
les hommes du village travaillent. Bref, c'est un fainéant. Un
propre à rien, comme le surnomment certaines des habitantes de
Clochemerle qui voient d'un mauvais œil le fait qu'il attire leur
mari au "Cabaret", le bistrot du village. Parce
qu'il se croie lésé, Baptiste se rend à la mairie afin d'obtenir
une carte de chômeur. Lors d'une réunion avec ses administrés, le
maire, Monsieur Piechut, décide d'accepter la demande de Baptiste
malgré l'avis divergent de certains des hommes présents dans la
salle. Et le voilà donc qui se pavane avec en main sa carte de
chômeur. Désormais, Baptiste touche des indemnités. Un "salaire"
qui n'est pas au goût de tout le monde, et surtout pas à celui des
femmes du village qui acceptent mal l'idée de cotiser pour ce
fainéant.
Mais
le nouveau curé du village, Patard, s'est fait un ami de Baptiste.
C'est l'un des rares personnages du village avec Zozotte, fille aux
mœurs légères, à s'entendre avec le chômeur. Sur les conseils du
prêtre, et après qu'il ait fait scandale lors de la fête du
village au bras de Zozotte, Baptiste accepte de faire des efforts
afin de s'attirer la sympathie des femmes de Clochemerle. C'est ainsi
qu’inconsciemment, Baptiste leur rend de menus services. Il répare
la gazinière de l'une. Porte le linge au lavoir d'une seconde et
fait un peu de plomberie pour une troisième. Il va même jusqu'à
aider le père Patard en réparant le micro de l'église.
Malheureusement pour le pauvre homme, les troncs de la maison de Dieu
sont pillés. Les femmes du village accusent Baptiste qui, justement,
détient une somme d'argent importante...
Entre
le cinéaste Jean Boyer et Fernandel, ce fut grande histoire d'amour.
Ils tournèrent ensemble une dizaine d’œuvres (L'Acrobate,
Les
Vignes Du Seigneur,
Relaxe-Toi
Chérie,
Coiffeur Pour Dames).
Le
Chômeur De Clochemerle
fut leur sixième collaboration. Le film de Jean Boyer est une ode à
la flânerie où pointe un intérêt certain pour l'anarchie et le
"je-m'en-foutisme".
Fernandel, trè à l'aise dans son rôle de sympathique parasite
s'amuse à virevolter au beau milieu d'un parterre de villageoises
mécontentes.
Au
delà de la légèreté même du propos surnagent des implications
politiques et religieuses sous-jacentes. L'autorité y est malmenée
à travers le portrait du garde-champêtre Beausoleil. A croire que
l'astre solaire est tombé sous le képi de cet homme jugé
indirectement d'imbécile par un Baptiste braconnier qui supporte mal
qu'on lui mette des bâtons dans les roues. Certains visages qui
apparaissent au premier abord sympathiques (le sacristain Coiffenave
et la très légère Zozotte) révèlent à la première contrariété
une âme beaucoup plus sombre. La présomption d'innocence n'a pas
droit de cité dans un petit village comme celui de Clochemerle pour
un chômeur puisque Baptiste est jeté en prison sans ménagement. Le
statut d'un homme est donc déjà à l'époque d'une importance
fondamentale et dessine les contours de la réputation qu'en font ses
concitoyens. La trahison est elle aussi au centre de cette histoire.
Elle est liée à l'amour inassouvi d'un homme qui trahira celui en
qui il croit pour l'amour d'une femme à la réputation sulfureuse.
Jean
Boyer développe autant de thèmes qu'il en faut pour assurer le
spectacle. Mais le show, c'est Fernandel qui l'assure avec tout le
talent qu'on lui connaît.
Le Chômeur De Clochemerle
est aussi l'histoire d'une rédemption. Celle d'un homme que l'on
aurait pu croire à jamais perdu, tellement engoncé dans sa
flemmardise. Le film est donc une petite merveille. Un régal pour
les yeux et les oreilles. Rafraichissant, vivifiant, Le
Chômeur De Clochemerle est
une excellente œuvre. Parmi les meilleurs interprétées par
l'immense Fernandel...
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