Avant d'entrer dans le
vif du sujet, quelques anecdotes croisées. En 1980, l'actrice
Melissa Gilbert remportait le Primetime Emmy Awards de la
meilleure actrice dans une mini-série ou un téléfilm pour son
interprétation de la jeune Helen Keller dans The Miracle
Worker,
remake du long-métrage réalisé par Arthur Penn en 1962. Melissa
Gilbert qui fut avant tout, l'héroïne principale de la série
télévisée américaine La petite maison dans la
prairie.
Statut qu'elle partagea avec bon nombre d'interprètes formant la
communauté de Walnut Grove et parmi lesquels nous retrouvions
notamment l'actrice Melissa Sue Anderson dans le rôle de sa sœur
Mary Ingalls. Laquelle allait connaître un triste sort en perdant la
vue à l'âge de quatorze ans. Un sujet grave, qui ne fut pas sans
rappeler le fond de The Miracle Worker
qui en 1962 traitait déjà à peu de chose près du même sujet...
Second long-métrage d'Arthur Penn après Le
gaucher en
1958 et tout un ensemble d'épisodes de séries télévisées, The
Miracle Worker (Miracle
en Alabama)
fait partie des grands chefs-d’œuvre du cinéma. De ceux qui
justifient que l'on puisse se passionner pour le septième art et qui
dans une certaine mesure réapprennent à celles et ceux qui
l'auraient oublié, que pleurer peut aller de paire avec les éclat
de rire. L'une des deux principales héroïnes de ce film absolument
bouleversant est interprétée par la jeune actrice Patty Duke qui
dans le rôle de Helen Keller donne vie à une authentique
personnalité, auteur et militante politique américaine qui à l'âge
de deux ans devint sourde, muette et aveugle. Face à elle, l'actrice
Anne Bancroft qui de son côté, interprète celui d'Anne Sullivan
qui elle-même vécu jusqu'à sa mort survenant le 20 octobre 1936 à
Forest Hill...
The Miracle Worker
bouscule
certaines idées reçues qui persistent à l'image. Entre un
demi-frère qui considère l'affection de sa demi-sœur comme une
maladie mentale, un père qui a baissé les bras et une mère qui la
surprotège, rien ne semble plus pouvoir sauver Helen de sa condition
et qui désormais est âgée de douze ans. Autant d'années à passer
murée dans le silence et le noir après avoir été victime d'une
congestion cérébrale alors qu'elle n'avait que quelques mois. C'est
alors qu'arrive dans son existence Anne Sullivan, qui après avoir
été élève d'une école pour aveugles et avoir surtout
partiellement retrouvé la vue après une dizaines d'interventions
chirurgicales, va accepter de venir en aide à Helen et ses parents.
Un apprentissage qui sera de longue haleine, avec plus de bas que de
hauts, mais avec cette force de conviction comparable à un combat
pour la vie. Si Inga Swenson, Victor Jory et Andrew Prine incarnent
formidablement bien les membres de la famille Keller, c'est bien
évidemment le duo que forment Anne Bancroft et Patty Duke qui
retient avant tout l'attention. Une relation difficile, houleuse,
cathartique mais surtout, d'une justesse et d'une humanité infinies.
Bouleversant, oui, parce que partager son expérience personnelle
(les cauchemars tétanisants d'Anne Sullivan renvoyant directement à
sa propre expérience) quitte à affronter ses démons intérieurs a
de quoi sublimer un propos où l'amour, plutôt que d'être
salvateur, cultive l'enfermement de l'être aimé. Anne Bancroft est
absolument éblouissante dans le rôle du professeur tandis que Patty
Duke trouve les gestes et les quelques borborygmes adéquats. Un
combat permanent entre une gamine souffrant de son infirmité mais
sachant comment l'utiliser pour faire passer tous ses caprices auprès
de ses proches (seul le demi-frère ayant semble-t-il rapidement
compris que s'apitoyer sur le sort de Helen n'était pas la solution)
et une femme remarquable non seulement dans sa connaissance du sujet
mais aussi et surtout dans son approche lucide du comportement à
avoir vis à vis de la jeune fille...
Arthur
Penn ne ménage absolument pas ses effets et certaines séquences
resteront à tout jamais gravées dans l'esprit du chanceux
spectateur qui découvrira The Miracle Worker.
On pense notamment à cette longue et pénible (pour la jeune fille
et son professeur) séquence du repas. Incroyable mise en scène et
extraordinaire interprétation des deux interprètes. Bien entendu,
le long-métrage d'Arthur Penn n'est pas que le simple étalage d'un
combat entre une gamine murée dans le silence et celle qui tente de
l'en sortir. Le film est également ponctué de moments de grâce
lors desquels est contraint le silence et où seuls les gestes de
tendresse et les regards s'imposent. Du miracle promis par le titre,
il ne faudra sans doute s'attendre à rien de commun avec ce que
prévoient certains prédicateurs. Juste l'issue bienheureuse d'un
travail harassant mais ô combien admirable d'une femme pour une
autre en devenir. Il y a des œuvres qui se rangent dans des tops
cent, des tops cinquante ou bien même, des tops dix. The
Miracle Worker
n'est pas loin de mériter une place dans le trio de tête des plus
grands films de l'histoire du cinéma. Dès son second long-métrage,
Arthur Penn aboutissait déjà à la quintessence de son art. Inutile
de préciser que la version originale s'impose ici plus que n'importe
où ailleurs. On s'en doute, le film remporta en 1963 l'Oscar de la
meilleure actrice ainsi que celui du meilleur second rôle pour Anne
Bancroft et Patty Duke. À noter également la superbe partition
musicale du compositeur Laurence Rosenthal...
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