Connu pour avoir été
l'auteur de Drôle de drame,
Le quai des brumes,
Hôtel du nord,
Les visiteurs du soir
ou Les enfants du paradis,
le réalisateur français Marcel Carné tourna son antépénultième
long-métrage en 1974 sous le titre La
merveilleuse visite.
Œuvre inspirée du roman de l'écrivain britannique de
science-fiction H.G.Wells The
Wonderful Visit,
ce film atypique échappe quasiment à toute sorte de classification.
Il ne s'agit donc pas de guerre, d'horreur, de comédie ou de
thriller. Au pire, s'il fallait vraiment le catégoriser, l'on
cocherait les cases du fantastique et du drame. Mais comme l'indique
très judicieusement l'un des personnages en tout début de récit,
pourquoi croire en une femme qui donna la vie sans l'aide d'un homme
ou que Jésus aie ressuscité d'entre les morts et ne pas admettre la
présence au sein du récit d'un ange ayant perdu ses ailes. Pas de
stigmates, certes, mais un pouvoir dotant Jean de certaines facultés.
Ce qui marque avant tout les esprits est la douceur avec laquelle
Marcel Carné envisage cette histoire d'ange échoué sur une côte
bretonne qui débarque sans crier gare dans la vie d'une petite
communauté qui verra plus ou moins bien son arrivée. Difficile de
voir en la personne de Jean (rôle que tient l'acteur Gilles Kohler)
un individu autre que bon. Blond, débarquant nu, sans armes et sans
mauvaises intentions, ce personnage fat figure de nouveau messie
avant d'apparaître d'une confondante naïveté. Un être auquel il
reste encore tout à apprendre. Accueilli par des êtres bons et
chaleureux (Roland Lesaffre dans le rôle du bedeau Ménard et Lucien
Barjon dans celui du recteur), celui qui n'a pas du nom mais que l'on
surnomme Jean du fait qu'il ait été découvert le jour où l'on
fête le fils de Zébédée va pourtant être au centre de
polémiques. De discussions et de controverses, certes, mais
également de jalousie...
Car
l'on ne peut revêtir l'apparence d'un beau jeune homme sans séduire
la plus jolie jeune femme du village (l'actrice américaine Debra
Berger dans le rôle de Deliha) et ainsi s'attirer les foudres de son
compagnon (Jean-Pierre Castaldi dans celui de François Mercadier, le
livreur de lait). Sur un tempo qui en indisposera sans doute
certains, La merveilleuse visite marque
par sa volonté de montrer l'humanité dans ce qu'elle recèle de
beau et d’accueillant mais aussi de cruel puisque l'arrivée de
Jean dans ce village va témoigner des craintes d'un peuple et de
voir ses croyances ''discutées'' par l'arrivée d'un jeune homme
détaché de toute contingence émotionnelle. De la peur de l'inconnu
et des mauvais présages qu'il va véhiculer au sein d'individus
rustres qui finiront par le chasser de leurs terres. S'y développe
alors un état d'esprit qui peu à peu noirci le trait de personnages
secondaires que l'on peut, au mieux, comprendre de part la fonction
première de la nature humaine qui veut que l'on se méfie de ce qui
relève de l'inconnu. D'abord méfiants, puis hostiles et voire
carrément malveillants, les villageois s'en prendront à cet être
au contraire bienveillant qui prendra au sens littéral du terme son
envol pour échapper à la curée. Tourné dans de très beaux
paysages bretons et notamment aux alentours de la Pointe du Van à
Pen-Hir, dans la petite commune de Sizun ou dans le village de
Saint-Guénole, La merveilleuse visite
est en outre accompagné par une bande musicale signée du
compositeur originaire de Riom, Alan Stivell. Si le long-métrage de
Marcel Carné a pris un sérieux coup de vieux et que celui-ci fut
déjà à l'époque de sa sortie éreinté par la critique, le film
n'en n'a pas moins gardé un certain charme. Une naïveté et un ton
de sobriété qui en ces temps d'ouragans médiatiques peut s'avérer
être un divertissement de bon aloi. Une ode à la bonté exploitant
malgré tout certaines failles de la nature humaine...
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