Parce
que Pierre Richard et Michel Bouquet sont irremplaçables, parce Francis
Veber l'est également, parce que Jamel Debbouze me file en général des
boutons, il faudrait que je déteste d'emblée et sans réfléchir le
nouveau long-métrage de James Huth, Le nouveau jouet
? Je ne pensais pas le dire, ni même le ressentir secrètement un jour,
mais le petit franco-marocain de Trappes est finalement parvenu à me
convaincre que derrière le sempiternel bouffon bafouilleur des cités se
cachait un vrai talent d'interprète. Et pas simplement dans le registre
de la comédie mais également dans celui de l'émotion. Oui mais voilà, le
voir endosser en 2022 le costume de l'alter ego maghrébin du François
Perrin de 1976 a généré un certain nombre d'avis négatifs avant même que
le film ne sorte sur les écrans de cinéma. Vôtre serviteur y allant
lui-même de sa verve assassine. C'est pourquoi, aujourd'hui, il est
temps de remettre les pendules à l'heure et de reconnaître que oui, ce
pari insensé d'offrir à Jamel Debbouze le rôle du jouet dans le nouveau
film de James Huth fut finalement une très bonne idée. Tout comme le fut
celle de lui opposer un Daniel Auteuil qui loin d'être ridicule en
comparaison avec Michel Bouquet est parvenu à incarner un homme rigide,
froid, insensible mais aussi étonnamment émouvant. C'est ainsi que dans Le nouveau jouet,
deux univers se télescopent. Celui du monde des affaires à la tête
duquel se positionne donc Philippe Étienne, l'une des plus grosses
fortunes de France. Et celui des quartiers populaires incarnés par Samy
Chérif. Et entre les deux, un enfant prénommé Alexandre et qui n'est
autre que le fils de Philippe Étienne et dont la mère est décédée depuis
peu. Les relations entre le père et le fils étant extrêmement tendues,
Philippe Étienne passe tous ses caprices à Alexandre qui un jour croise
la route de Samy dans l'un des magasins appartenant à son père. Le jeune
garçon auquel a été offert l'opportunité de choisir un cadeau parmi les
nombreux articles présents dans les rayons jette alors son dévolu sur
cet agent de sécurité qui en dépit du bon sens va accepter de jouer le
rôle de... Jouet afin de subvenir aux besoins financiers du couple qu'il
forme auprès d'Alice (l'actrice Alice Belaïdi), laquelle s'apprête à
accoucher de leur premier enfant...
Que
dire si ce n'est que '' Le nouveau jouet '' a bouleversé toutes nos
convictions. Celle qui s'ancrent en général pour longtemps et nous
transforment en indécrottables imbéciles dépourvus d'objectivité. Enfin,
je parle là de la mienne, pas celle de ma compagne qui elle est plus
ouverte que je ne le suis. Dans un univers partagé entre le château du
richissime homme d'affaire, la chambre d'Alexandre (interprété par le
jeune Simon Faliu que l'on a pu notamment voir dans la franchise Le petit Nicolas ou dans la purge Les blagues de Toto)et
les innombrables trésors qu'elle recèle mais qui ne parviennent
cependant pas à combler le vide laissé par la mort de la mère et la cité
où vit Samy, Le nouveau jouet ne
déroge pas à la règle en s'inspirant évidemment de l'œuvre de Francis
Veber tout en actualisant son sujet dans un contexte social très actuel.
Si certains remarqueront l'emploi d'un ''arabe de service'' au bénéfice d'un jeune ''blanc-bec''
parfaitement imbitable, il faudra d'abord demander à Jamel Debbouze ce
qu'il en pense avant de prononcer l'éternel pamphlet sur le racisme.
Sujet qui d'ailleurs n'est heureusement pas évoqué contrairement au
''délit d'origine afro-américaine'' dont le héros du lénifiant remake
américain signé en 1982 par Richard Donner, Le joujou, ne
cessait de servir d'argument fallacieux au récit ! Ici, le social
s'établit à travers la vie d'une cité, avec ses codes, souvent amusants
d'ailleurs, les difficultés financières de Samy et de son épouse Alice
ou à travers la fermeture prochaine d'une usine qui fait vivre une
grande partie des habitants du quartier. Alors que l'on pouvait redouter
que le scénario de James Huth et Sonja Shillito, la réalisation et
l'interprétation ne s'appesantissent sur ces sujets ou que le film ne
fasse qu'adapter maladroitement l'œuvre de 1976, James Huth réinvente le
concept et nous offre un long-métrage qui n'a absolument rien à envier à
l'original. La relation entre Samy et Alexandre, les rapports entre
l'enfant et son père ou entre ce dernier et le ''jouet'' de son fils
sont souvent très touchants. Et contrairement à ce que j'avais pu lire
ça et là, Jamel Debbouze n'en fait pas des caisses. Les pitreries
auxquelles s'adonne son personnage afin de s'accorder les faveurs
financières du père et l'amitié du fils sont finalement moins nombreuses
que prévu et le spectacle devient nettement plus intimiste et touchant.
Bref, Le nouveau jouet est une
excellente surprise, inattendue, parfois très drôle (le frère d'Alice,
Nono, interprété par Redouanne Harjane ou Atmen Kélif dans celui du
pleutre, Moussa) et les deux heures filent à toute allure. Comme quoi...
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