Pendant de très longues
années, on ne peut pas dire que le cinéma français ait
systématiquement entretenu des atomes crochus avec le cinéma
fantastique et d'épouvante. À titre d'exemple, le zombie fut traité
avec tant de mépris, d'indifférence ou si peu de soucis qu'il
n'aura longtemps été visible que dans quelques péloches devenues
cultes par l'entremise des aficionados de bandes Z ou nanardesques.
Jean Rollin délaissa un temps ses vampires pour des créatures
décharnées peu convaincantes avec Les raisins de la mort
en 1978 ou Le lac des morts vivants
en 1981. il faudra attendre longtemps avant de voir émerger quelques
films plutôt valables dans le genre mais il faudra finalement
patienter jusqu'en 2022 pour que notre pays explore le genre et signe
un authentique chef-d’œuvre du genre. Et aussi incroyable que cela
puisse paraître, c'est un réalisateur en partie spécialisé dans
la comédie qui en fut l'auteur : Michel Hazanavicius. L'homme
derrière La classe américaine,
OSS 117 - Le Caire, nid d'espions
ou bien The Artist...
Avec Coupez !,
le bonhomme a signé un excellent remake du film sud-coréen Ne
coupez pas ! de
Shin'ichirô Ueda. Pourtant antérieur, Super Z
de Julien de Volte et Arnaud Tabarly joue plus ou moins dans la même
catégorie puisque s'y mêlent horreur, fantastique et comédie.
Aussi étonnant que cela puisse paraître et selon leur propre aveu,
les influences des deux français ne s'inscrivent pas uniquement dans
ces genres mais vont fouiller dans les univers parfois déjantés de
l'italien Federico Fellini, de l'espagnol Pedro Almodovar et du
franco-serbe Emir Kusturica. Ce qui, à priori, ne saute pas
immédiatement aux yeux. Par contre, l'hommage au Zombie
de George Romero paraît déjà plus évident ne serait-ce qu'à
travers le teint des créatures. Les zombies de Super
Z
évoquant d'ailleurs lointainement le personnage de Bub que l'on
pouvait remarquer en 1986 dans Le jour des
morts-vivants...
Jouissant
d'un budget relativement étriqué, Super Z
n'en bénéficie pas moins d'une énergie salvatrice qui pourra
cependant en décontenancer certains. Le ton volontairement
burlesque, voire même cartoonesque demeure effectivement perturbant.
D'autant qu'à aucun moment, ni les protagonistes, ni la réalisation
ne prend le temps de souffler. Dès que notre petite famille de
zombies s'est échappée d'un laboratoire où ses membres servaient
de cobayes aux expériences d'un scientifique fou (comparable au
Docteur Matthew Logan du Jour des morts-vivants),
la chasse est déclarée. Tandis que nos cinq morts-vivants verdâtres
se lancent à la poursuite de proies à dévorer lors de repas très
saignants, un commando leur colle aux basques afin de le exterminer.
De ce point de vue là, Julien de Volte et Arnaud Tabarly foirent un
peu le coche puisqu'il réduisent cette poursuite menée entre autre
par l'acteur Jo Prestia, à la partie congrue ! L'une des
particularités de Super Z
provient du fait qu'il ne ressemble à aucun autre film de zombies.
Ici, les véritables vedettes, ce sont eux. D'ailleurs, les deux
français offrent à leurs personnages la possibilité de s'exprimer
dans un langage qui malheureusement demeurera inaudible. À bien
tendre l'oreille, on saisit quelques bribes de phrases tandis que la
majeure partie des dialogues semble avoir été enregistrée à
l'envers. Ce qui rend alors compliqué la pleine compréhension de ce
qui se déroule au sein même de cette famille de zombies !
En
contrepartie, leurs interprètes font preuve d'une énergie qui
épuisera même jusqu'aux spectateurs, peu habitués à voir des
acteurs s'agiter de la sorte et avec autant de persévérance. De
plus, Super Z
bénéficie de la présence inattendue de Julien Courbey dans le rôle
de Stéphana, la ''mère'' de cette famille de zombies à l'appétit
vorace. Très attachée à ses différents membres, on ne sait tout
d'abord pas trop où se situe ce personnage même si on l'envisage
ensuite très rapidement comme un individu de sexe féminin dans un
corps d'homme qui se rêve avec les atouts d'une femme. Et c'est sans
doute parce que Julien Courbey interprète lui-même ce personnage
que ses apparitions s'avèrent savoureuses. Avec ses perruques
oranges ou blondes et son attitude survoltée, il n'est pas rare que
l'on sourit devant ses nombreuses facéties. Généreux en séquences
gore, le film fréquente également d'autres courants. La comédie,
bien entendu, mais également le trash cher à un certain John
Waters. Les deux gamines Marcelline (Audrey Giacomini) et Georgette
(Florence Bebic-Veruni) se battant même avec le pénis de l'une des
victimes de leurs parents, séquence qui rappelle quelque peu le
''match de rugby'' du film culte de Jim Muro, Street
Trash.
Super Z
est le premier long-métrage de Julien de Volte et Arnaud Tabarly qui
jusque là n'avaient collaboré que sur le court Les
fines bouches
en 2014. Inédit dans son approche, délirant mais aussi parfois
soûlant (les dialogues incompréhensibles échangés entre les
membres de la famille), Super Z
porte très bien son titre. Un Z qui veut tout aussi bien se référer
aux zombies de son contenu que du style propre au pires productions
horrifiques. Notons que le film se rapproche également
dangereusement de la frontière qui le sépare de la comédie
franchouillarde des années soixante-dix/quatre-vingt avec son
portrait du paysan. D'Augustine qu'interprète Marion Mezdorian et
son accent à couper au couteau et aux dents pourries à Ludovic
Schoendoerffer qui interprète son alcoolique et violent de père !
Maintenant, reste à chacun de se forger sa propre opinion sur ce
véritable OVNI qui séduira les amateurs de soirées
Canapés/Pizzas/Bières/Nanars et fera perdre la tête,
décontenancera ou horripilera les autres. Notons qu'une suite est
déjà prévue...
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