''C'est fort, tendre,
poétique, parfois poignant, ça mérite l'envergure du grand
écran...'' Je vous avoue que lorsque j'ai découvert cette
critique d'un(e) scribouillard(e) de l'hebdomadaire féminin Femme
Actuelle, je suis tombé des
nues. Poétique ? Poignant ? On imagine mal une comédie
mettant en scène l'acteur Alban Ivanov mériter autant d'éloges.
Surtout depuis qu'on l'a découvert, allez, au hasard dans Le
médecin imaginaire
de Ahmed Hamidi ou Le Dernier Mercenaire
de David Charhon. Deux purges de compétition. Le genre à vous
écœurer de payer votre place de cinéma pour aller y assister à
des spectacles aussi navrants. En perdition le Alban ! Dix films
rien qu'en 2021 dont les trois-quart sont du même tonneau. Le
dernier d'entre eux est sorti le 29 juin 2022. Oui, aujourd'hui. Et
devinez quoi, comme on ne change pas un objectif voué de toute
manière à l'échec, on a encore droit à une comédie. Il y a autre
chose que l'on ne change pas : c'est l'équipe. Qu'elle soit
gagnante ou non. Après s'être fait la main à la télévision à
partir de 2001 et jusqu'en 2019, le réalisateur français Varante
Soudjian est passé à la vitesse supérieure en réalisant son
premier long-métrage Walter et
le second Inséparables en
2019. Quant au troisième intitulé La traversée,
il vient tout juste de débarquer dans les meilleures crémeries. La
traversée ?
Tiens, tiens... Ne serait-ce pas également le titre d'un film
d'animation qui fin 2021 semble avoir fait l'unanimité auprès
des critiques ? Tout à fait... Et d'ailleurs, la citation qui sert
ici de préambule à l'article consacré à la comédie concerne
justement le film de la réalisatrice Florence Miailhe et non pas
celui qui nous intéresse ici. C'est donc presque à regrets que l'on
va peut-être devoir refermer la page des éloges qui s'étendaient
bien au delà de cette simple citation pour parler d'une œuvre dont
les portées émotionnelles et poétiques risquent d'avoir un peu
plus de mal à s'imposer dans le cas du long-métrage de Varante
Soudjian. La banlieue au cinéma s'est imposée il y a déjà fort
longtemps. Des blocs de cités témoignant de la vie imposée par le
chômage ou la drogue et où les principaux signes de richesse
semblent avoir été pendant longtemps le pantalon de survêtement et
la casquette. Aujourd'hui ? J'en sais rien et très franchement,
je m'en tape ! Loin des duels entre cow-boys et indiens de mon
enfance, les ''quartiers'' se sont mués en usines produisant de
l'ignorance et de l'inculture à la chaîne. C'est donc avec une
certaine positivé que l'on prendra le synopsis de La
traversée
pour ce qu'il paraît être : un message bienveillant à
l'encontre de toutes et tous situé non pas dans l'une des nombreuses
barres de cités qui défigurent nos banlieues mais sur un voilier où
le réalisateur retrouve son acteur fétiche pour la troisième fois
sur grand écran : Alban Ivanov...
Mais
pas que puisque à la barre d'un très beau voilier, l'acteur
accompagnera les éducateurs Stéphanie et Alex (Audrey Pirault et
Lucien Jean-Baptiste) ainsi que cinq ''Kassos''
prénommés Rayane, Léa, Mahdi, Sam et Polo. Autant dire que les
quinze prochains jours ne vont pas vraiment être une promenade de
santé pour Riton, le skipper, l'ancien flic de la BAC, divorcé,
sans enfants, mais bourru et... bourré de préjugés envers les
jeunes des cités. Stéphanie en a autant pour le compte de l'ancien
policier qu'elle envisage sans même le connaître comme étant
raciste ! Un séjour qui va s'avérer totalement désorganisé,
avec un Alex et une Stéphanie qui ont mal préparé l'expédition en
mer. L'indifférence totale et le mépris avec lesquels Riton juge
ses hôtes indésirables ne va pas arranger les choses. Si Alex se
donne à fond dans cette démarche apparemment vouée à l'échec
(les ados ne veulent participer à rien, critiquent tout et passent
leur temps à se balancer des punchlines en pleine gueule avec leur
accent des quartiers), son but ultime est de mettre Stéphanie dans
son lit... Constitué essentiellement d'interprètes débutants sans
doute choisis sur la base d'un bagou des quartiers qui continuera à
rebuter ceux qui préfèrent nier leur existence, La
traversée démarre
forcément de manière très caricaturale... mais réaliste !
Appelons un chat, un chat et ne tournons pas autour du pot. Nos cinq
jeunes interprètes ont surtout l'air d'échanger des lignes de
dialogue comme n'importe quelle bande de potes coincés entre les
entrées A et B de leur cité. Tout ou partie des échanges semble
être le fruit d'une improvisation que tempère heureusement
l'interprétation des trois adultes et notamment celle d'Alban
Ivanov, justement. Celui que l'on redoutait de voir réitérer une
fois de plus l'exploit d'incarner le personnage central des pires
comédies françaises sortie l'année dernière. C'est pourtant avec
une certaine sobriété qu'il interprète Riton. Un bonhomme peu
bavard qui restera en retrait une bonne partie du récit tout en
offrant aux spectateurs et à son petit groupe de passagers, quelques
punchlines parfois bien senties. En tout cas, les spectateurs
semblent avoir été réceptifs. Surtout les jeunes qui se sont
agglutinés au centre de la salle laissant vacants les sièges
alentours restés désespérément vides ! Se déroulant en
grande partie sur la Méditerranée, le cadre n'est jamais vraiment
exploité puisque ni les fond marins ni les côtes ne semblent avoir
intéressé Varante Soudjian. La traversée
semble
vouloir
souligner
la volonté de son auteur de réconcilier deux franges de notre
société qui de nos jours se détestent sans la moindre cordialité
(l'ancien flic ? Les jeunes des banlieues ? On sent le
message à des kilomètres à la ronde). C'est léger, parfois drôle,
assez peu innovant (qui oserait prétendre le contraire ?) mais
permet de passer un sympathique moment au soleil et sur la mer...
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