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mardi 5 juin 2018

Cannibal Holocaust de Ruggero deodato (1980) - ★★★★★★☆☆☆☆



Je voudrais, le temps de quelques articles, revenir sur quelques-uns des longs-métrages parmi lesquels, certains m'ont laissé un vif souvenir de par leur aspect particulièrement malsain. Chose assez rare s'il en est puisqu'éprouver un réel malaise, je veux dire par là, ressentir PHYSIQUEMENT un mal-être, est relativement rare au cinéma. A moins d'être outrageusement sensible, ce qui peut être terriblement inconfortable à la longue. D'une manière générale, cet incommodant sentiment qui agace au même point qu'une partie du dos que l'on ne peut jamais atteindre mais qui nous gratte inlassablement, l'épreuve ne dure souvent qu'un instant, plus ou moins long. Aussi brève qu'une piqûre de guêpe, ou lancinante qu'un mal de tête tenace. Le premier de ces quelques longs-métrages que j'aimerais évoquer n'a certes, rien d'original. Il suffit de taper le titre sur la toile pour constater combien il fait parler de lui depuis la nuit des temps. Et pourtant, j'ai bien envie d'y apporter mon grain de sel. Ce film, c'est Cannibal Holocaust. J'en entends presque certains me moquer. Dédaignant l'infâme pellicule. Non pour son absence de valeur intellectuelle, mais pour certains aspects qui même après trente-huit ans d'âge, continuent à hanter les esprits. En fais-je partie ? Oui, certes.
Cannibal Holocaust, c'est d'abord l'un des tout premiers (LE premier?) Found-footage. A l'heure ou même le terme n'avait pas encore été inventé, déjà, le film se démarquait de la concurrence par son aspect 'documentaire'. Cette facette de l’œuvre qui allait peser très lourd sur les épaules de Ruggero Deodato, le réalisateur, à cause de rumeurs selon lesquelles, les interprètes auraient réellement périt lors du tournage. Cannibal Holocaust, premier 'snuff movie' de l'histoire du cinéma à être officiellement, et définitivement reconnu en tant que tel ? Oui et non. Oui si vous êtes un fervent défenseur de nos amis les bêtes. Non si vous mangez de la viande en vous désintéressant totalement du sort infligé aux animaux d'abattage lors de leur passage dans les abattoirs. Peut-être alors ne serez-vous pas choqué par les quelques bestioles qui passent ici de vie à trépas, et notamment ce pauvre rongeur, qui sans rien demander, subit une mort particulièrement affreuse  alors même que l'événement n'apporte rien de fondamental au récit !

Tiens, le récit justement. Alan Yates, Fayes Daniels, Jack Anders et mark Tomaso. Le reporter, sa petite amie, et les deux cameramans. Quatre américains partis découvrir les peuples cannibales d'Amazonie. Alors qu'ils ne donnent plus signe de vie, le professeur Harold Monroe est envoyé sur place escorté par Miguel et Chaco Losojos, deux guides expérimentés et par un indien yacumo qu'ils ont pris en otage afin de remonter jusqu'au village où les quatre américains ont semble-t-il disparu. Sur place, il découvrent un village dont tous les habitants sont terrorisés depuis le passage d'Alan et de ses trois compagnons. En chemin, Monroe fait une terrible découverte : dans un sanctuaire érigé par les Yanomamos, il découvre des ossements ainsi que des pellicules de films. Celles des membres de l'expédition disparue. Emportant le matériel vidéo, Monroe retourne aux États-Unis. A New York, il est contacté par les dirigeants de la Pan American Broadcast Company qui veulent exploiter le contenu des vidéos. Mais ils sont loin d'imaginer ce qu'il s vont y découvrir...

Si le principe du récit en deux actes est une idée plutôt habile, Cannibal Holocaust se vautre pourtant malheureusement dans des séquences graphiquement insoutenables, servant un propos dont le seul intérêt est d'abreuver le public d'images sensationnelles d'une gratuité rarissime. Plus haut, j'évoquais le massacre d'animaux. Des actes de barbarie difficilement soutenables qui n'ont malheureusement, aucune valeur artistique puisque n'apportant rien de fondamental à l'action. Il ne s'agit que de voyeurisme, les interprètes s'adonnant à un sadisme des plus abjecte. Car l'on n'est plus là, face à la fiction, mais à des faits réels qui ne peuvent servir le septième art que dans la seule volonté de choquer. Et Ruggero Deodato y parvient très facilement. Singe, Tortue, cochon sauvage, les meurtres y sont perpétrés dans le cadre de ce que l'on pourrait juger de fantasme morbide. Justifiant le besoin de se nourrir des personnages, l'éprouvante scène durant laquelle une tortue est décapitée, puis découpée en morceaux alors qu'elle bouge encore les membres est terriblement malsaine. Ruggero Deodato filme des individus ayant semble-t-il, perdu toute notion de morale, et filmant avec un certain plaisir, la mise à mort de l'animal. Un acte fédérateur puisque dès lors, nos quatre américains ne cesseront plus de s'adonner à des actes répréhensibles sous couvert de donner plus d'impact à leur reportage. Un point de vue fort négligeable si l'on y oppose les meurtres, incendie de village et viol dont ils vont se rendre responsables, parait-il, par soucis de diplomatie. Un terme qui fera hurler de rire le public médusé et confronté à cette morale de pacotille à laquelle le cinéaste oppose la sauvagerie de ses américains prétendument civilisés mais finalement plus sanguinaires encore que les cannibales qu'ils étaient censés rencontrer.

Film en deux actes donc, Cannibal Holocaust, s'intéresse d'abord aux recherches effectuées par le professeur Monroe pour ensuite laisser 'parler' les caméras des quatre américains. S'érigeant en procureur dénonçant les actes d'occidentaux venus saccager les terres des indigènes d'Amazonie, Ruggero Deodato est tout de même sacrément gonflé lorsqu'il décide de condamner ses 'héros' à mort. Lui qui à travers un scénario et une mise en scène douteux s'est cru permis d'outrepasser les limites invoquées par la raison, le voici qui démystifie les actes de barbarie en rendant ensuite, justice à ceux qu'il a lui-même blasphémé (suis-je clair?). Cannibal Holocaust est une œuvre malsaine, qui mérite son statut de film controversé. A vrai dire, si on lui ôte tout ce qui fait le 'sel' des amateurs d'horreur, le film se contente de balader ses personnages au milieu d'une forêt dans laquelle un serpent peu figurer une liane et où la moindre morsure peut se révéler fatale. L'interprétation y est sommaire, l'intrigue grouillante de scènes donnant la nausée (émasculation, dépeçage, décapitations, etc...). Bref, le film rempli parfaitement son contrat. A l'heure d'Internet, certains auront peut-être du mal à cerner ce qui à l'époque avait pu tant choquer, et pourquoi dans certains pays, le film fut interdit. Un conseil : faites abstraction de l'époque dans laquelle vous vivez actuellement. Replongez au cœur de ce temps où tout était permis. Alors, sans doute, ressentirez-vous ce qu'ont perçu les spectateurs en cette année 80 où est sorti ce film, parmi l'un des plus malsains que le cinéma ait produit à l'époque...

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