26 décembre 1973. Les
États-Unis découvrent dans les salles obscures le Diable dans sa
plus terrifiante des représentations. Certains critiques
reconnaissent avoir été effrayés tandis que d'autres le décrivent
comme une ânerie aux grotesques effets-spéciaux. Il en sera même
pour qualifier le chef-d’œuvre de William Friedkin de film
pornographique religieux quand d'autres lui reconnaîtront un certain
réalisme. Récompensé par deux Oscars alors qu'il fut nommé à dix
reprises, L'Exorciste devait fort logiquement faire des
émules et influencer des cinéastes de par le monde. A commencer par
son pays d'origine qui ne tarda à donner une suite en 1977 avec
L'Exorciste 2 : l'Hérétique,
inspirant même le cinéaste Richard Donner en 1976 qui signa un
autre classique du genre avec La Malédiction.
Pourtant,
s'il demeure un long-métrage ayant été totalement influencé par
l’œuvre de William Friedkin, c'est bien Seitan
(qui en turc signifie le Diable). Plus qu'un hommage revendiqué, il
s'agit ni plus ni moins que d'un remake produit aux confins de l'Asie
et de l'Europe par un certain Metin
Erksan dont Seytan fut le dernier long-métrage. Tourné un an
seulement après le classique dont il s'inspire, le cinéaste reprend
à son compte la totalité de l'intrigue, filmant presque plan par
plan des scènes entières pillées dans l’œuvre de William
Friedkin.
Tout
commence dans le désert où un archéologue, sosie involontaire du
Jodorowski de El Topo,
découvre une statue représentant un démon. Puis le film nous
emmène jusqu'à Istanbul. Là, dans une belle et grande maison (mais
atrocement décorée), vivent Gul et sa mère. La jeune fille, âgée
de 12 ans seulement, s'est découvert un ami imaginaire avec lequel
elle joue innocemment au Ouija. Alors que des bruits se font entendre
au grenier et que la mère ordonne à l'un des domestiques de
s'occuper des rats qu'elle soupçonne être responsables, Gul tombe
malade. Un mal incurable, que les symptômes laissent les médecins
perplexes. Ces derniers, lors de véritables séances de tortures,
vont se concerter et décider que la jeune fille est victime de
graves troubles mentaux. Ce que semblent contredire certains
événements. Car en effet, le lit de Regan... pardon, Gul, se
soulève seul, et la jeune fille commence à porter les premiers
stigmates d'une possession que la médecine ne parviendra pas à
guérir.
C'est
ainsi que rentre en jeu non pas un prêtre, mais un écrivain. Tugrul
Bilge
est l'auteur d'un ouvrage sur la question du Diable et de ses
différentes manifestations. Un livre que la mère de Gul découvrira
dans le grenier de la maison sans que la signification quant à sa
présence en ces murs ne nous soit justifiée. Incapable de mener le
combat seul face à cette représentation juvénile du Diable,
l'écrivain est soutenu par l'exorciste qui donne son titre au film
original. Un prêtre musulman remplaçant le chrétien originel.
Après une longue, très longue, trop longue séance d'exorcisme, le
film de Metin Erksan se clôt comme celui de William Friedkin,
l'écrivain venant s'écraser au pied d'un immense (ouais, heu...)
escalier, la tête retournée à 180 degrés.
Bien
qu'il s'agisse d'un véritable remake, Seytan
ne vous fera pas peur. Jamais il ne provoque le moindre sentiment de
malaise ni le plus petit frisson. Au contraire, c'est une franche
rigolade qui s'exprime le plus souvent. Entre les séances
d’électrochocs remplaçant les fameuses (et traumatisantes) scènes
d'examens médicaux et la tentative désespérée du cinéaste turc
pour nous immerger dans l'ambiance terrifiante d'une chambre de
petite fille transformée en antre du Diable, l'oeuvre montre
rapidement ses limites budgétaires. Les effets-spéciaux sont
médiocres (le vomi granuleux est à l'image du reste, totalement
foiré), l'exorcisme ne possède pas une once du charisme de
l'extraordinaire Max von Sydow et quant aux scènes plagiées, aucune
n'arrive à la hauteur de celles que tourna l'année précédente le
cinéaste américain. Metin Erksan « oublie »
certains détails importants comme le message de Regan à l'intention
de l'un des invités de sa mère. La jeune Gul urine très
discrètement devant la caméra turque (c'est qu'il ne faut point
trop choquer le futur public), mais omet de prévenir l'un des
convives de sa mort prochaine. A part les coupures au visage et
quelques lévitations plutôt bien senties, quelques effets-spéciaux
font vraiment peine à voir. A l'image des meubles censés traverser
la chambre de la jeune fille mais qui font peine à voir. On devine
derrière leur douloureuse traversée, des machinistes tirant sur des
câbles. Pathétique. On retiendra également l'utilisation éhontée
de la bande originale composée par le multi-instrumentiste Mike
Oldfield dont Metin Erksan reprend le célèbre thème Tubular
Bells.
Bien que pétrit de défauts, Seytan
demeure un vrai bon nanar dans le registre des remakes turcs...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire