Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

Labels


mercredi 8 août 2018

Madame Hyde de Serge Bozon (2018) - ★★★★★★★☆☆☆



Certains cinéastes possèdent un univers bien à eux. En France également. Il suffit d'évoquer Quentin Dupieux pour que les passions se déchaînent. Et encore, lui, a la chance d'être majoritairement apprécié. Du moins par la presse car le public se partage la part du lion entre engouement et assassinat sur la place publique. Le cinéma de Guillaume Nicloux contient également cette part d'incongruité qui continue à indisposer une partie des spectateurs. Celui qui n'échappe pas à cette règle en raison d'une filmographie que l'on jugera en dents de scie, c'est Serge Bozon. Surtout depuis le mal aimé Tip Top. Une œuvre, avouons-le, dont le choix de la mise en scène est plutôt curieux mais qui au final intrigue pour les bonnes raisons. Déjà, le réalisateur y convoquait notre plus grande actrice féminine Isabelle Huppert, laquelle accepte de remonter six ans plus tard dans l'étrange manège d'un cinéaste qui ne souffre d'aucune forme de concession. Ou bien si peu. Car la seule à laquelle il accorde une exception est de reprendre à son compte le roman de Robert Louis Stevenson L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde et d'en proposer la relecture la plus étonnante qui soit.

Lui offrant une version toute féminine, c'est donc Isabelle Huppert qui incarne le célèbre docteur. Mais ici, point de médecin. Pas d'alambiques, de tubes à essais ou de substances liquides, mais un curieux laboratoire servant aux expériences d'une professeur de biologie en mauvais termes avec ses élèves. L'actrice française n'aura jamais paru aussi frêle. Isabelle Huppert n'aura jamais été aussi évanescente sur grand écran. Blafarde, menue, et confronté à la classe d'un lycée technique chargée en loups venus dévorer jour à près jours la pauvre brebis égarée dans un monde où la violence verbale cause autant de tort que la violence physique, généralement beaucoup plus directe. Glissant peu à peu vers une pente dangereuse, c'est pourtant un phénomène relevant du fantastique qui va littéralement transformer Madame Géquil en madame Hyde le soir venu. Et là encore, Serge Bozon propose une relecture du mythe assez curieuse puisque le pendant sombre de son héroïne n'a aucun penchant pour le vice. Tout juste ce personnage effacé devient-il l'arme contre laquelle la jeunesse actuelle ne pourra pas grand chose. Prenant peu à peu confiance, Madame Géquil prend sous sa coupe le jeune Malik, handicapé depuis la naissance, rejeté par ses camarades, qu'elle tentera de convaincre des bienfaits de l'éducation...

Madame Hyde est une œuvre étrange. Qui ne remportera pas l'adhésion générale mais qui provoquera sans doute quelques remous. Bénéficiant de la personnalité de son auteur et de quelques grands interprètes français tels que José Garcia (dont le rôle duquel fut à l'origine pressenti Gérard Depardieu) ou Romain Duris, le long-métrage de Serge Bozon est une œuvre bicéphale entre réalisme et fantastique.
Le réalisme est évoqué à travers ces longues scènes d'enseignement patiemment inculquées à des élèves d'abord réfractaires montrant les difficiles conditions dans lesquelles sont désormais contraints de travailler les enseignants. Le fantastique, lui, intervient de manière ponctuelle, à travers quelques effets visuels qui, s'il ne sont pas totalement bluffants, permettent une bonne compréhension des événements. Le film est porté par l'interprétation de son héroïne, ainsi que par le jeune Adda Senani qui dans le rôle de Malik incarne à merveille c'est frange de l'adolescence apparaissant au départ irrécupérable mais que la passion d'une enseignante pour son métier parviendra à faire pencher du bon côté de la balance. Si le film apparaît parfois rigide, il recèle également  quelques jolis moments tranchant radicalement avec la torpeur dont semble parfois être la victime le scénario. José Garcia, si peu sollicité soit-il, est un compagnon touchant. Romain Duris, sous ses airs de proviseur 'perché' reflète cette nouvelle forme de démagogie qui pourrit tout sur son passage tout en demeurant juste à quelques occasions envers une Madame Géquil ne renonçant jamais à ce pour quoi elle a choisit d'enseigner. Mais ce qui marque avant tout, c'est la relation élève-professeur que vont entretenir l'enseignante et Malik. Si le contexte est parfois étrange, Serge Bozon dresse finalement le bilan relativement classique des conditions pénibles dans lesquelles sont contraints de travailler les enseignants. Mais avec cette forme extraordinaire qui empêche toute appréciation subjective. Une très bonne surprise...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...