Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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mardi 31 octobre 2017

Un Profil pour Deux de Stéphane Robelin (2017) - ★★★★★★★★☆☆



Nous avons, chaque année en France, l'occasion de découvrir une légion de comédies françaises. Si une grande majorité d'entre elles ont le malheur de manquer d'originalité et de se faire très vite oublier, il en demeure fort heureusement quelques-unes qui sortent du lot. Un Profil pour Deux fait partie de ces comédies qui nagent entre plusieurs eaux. Le triangle amoureux autour duquel tourne l'intrigue n'est pourtant pas lui non plus un sujet tout neuf. Pourtant, la générosité de ses interprètes et les différents changements de ton lui confèrent une aura toute particulière. Car le film de Stéphane Robelin qui réalise ici son troisième long-métrage après Real Movie et Et si on Vivait tous Ensemble ? est un petit bijou. Le réalisateur étant parti d'un scénario dont il a lui-même assuré l'écriture, le film met en scène Pierre, un septuagénaire vivant seul depuis la mort de son épouse. Sa fille, désespérée, demande au compagnon de Juliette de donner des cours d'informatique au vieil homme afin de lui permettre de découvrir les possibilités offertes par Internet.
C'est ainsi qu'Alex lui apprend comment manipuler son nouvel ordinateur et utiliser les sites de rencontres. Pierre use de ses talents de conteur pour séduire une certaine Flora63, laquelle tombe sous le charme du vieil homme dont elle ignore tout de la véritable apparence. En effet, Pierre lui a envoyé une photo d'Alex prise quelques jours auparavant et le jour où Flora et lui décident de se rencontrer pour la première fois à Bruxelles, le vieil homme supplie Alex d'approcher la jeune femme à sa place. Malgré sa réticence, le jeune homme accepte de se rendre en Belgique aux côtés de Pierre, d'autant plus qu'entre Juliette et lui, le torchon brûle. Sa rencontre avec Flora va bouleverser son existence, ainsi que celle de la jeune femme et celle de Pierre...

 
Première impression positive : la présence de l'immense Pierre Richard. Celui qui nous faisait rire grâce aux pitreries et à la distraction de ses personnages a depuis quelques années mûri. Même si sa façon d'aborder la comédie est bien différente que par le passé, le retrouver sur grand écran demeure toujours un réel plaisir. Ici, on le retrouve dans la peau d'un homme vieillissant. Étouffé par la présence de proches relativement antipathiques. Une existence finalement assez morne qui va changer du jour au lendemain grâce à Alex, personnage incarné par l'acteur Yaniss Lespert qui pour l'instant n'a joué que dans très peu de longs-métrages pour le cinéma et est surtout apparu à la télévision dans une petite dizaine de téléfilms et de séries. Aux côtés des deux hommes, la ravissante et talentueuse Fanny Valette. La jeune arlésienne apporte au long-métrage de Stéphane Robelin une véritable fraîcheur. L'actrice incarne une Flora sensible, touchante, rêvant du prince charmant tout en espérant trouver celui auquel elle pourra redonner le goût de vivre à nouveau une histoire d'amour. Car contre attente, de ce petit jeu malsain auquel s'adonnent les personnages interprétés par Pierre Richard et Yaniss Lespert va éclore une très belle romance.

Stéphane Robelin table sur un imbroglio compliqué à mettre en place. A la:manière d'une pièce de théâtre où les portes claquent, s'ouvrent et se referment, épargnant les uns après les autres des personnages qui ne sont jamais censés se croiser, le cinéaste maîtrise sur le bout des doigts son propre récit. On sent l'amour du réalisateur pour ses interprètes. Battant le froid et le chaud, sa mise en scène surprend. Un Profil pour Deux passe allégrement de la comédie douce-amère au drame. L’œuvre de Stéphane Robelin ne fera généralement pas hurler de rire. On s'éloigne très largement des poncifs du genre, et pourtant, cela fonctionne à merveille. Cependant, le film évite toute forme d’apitoiement. Le cinéaste n'oublie pas d'y injecter quelques moments savoureusement loufoque comme la scène du petit-déjeuner, et d'autres, beaucoup plus émouvant, comme la merveilleuse scène située dans l'appartement de Flora.

Même si les intrigues n'ont que très peu de rapports, Un Profil pour Deux nous chavire le cœur comme avait pu le faire en son temps, une œuvre aussi forte que Le Tout Nouveau Testament de Jaco van Dormael dont certaines critiques assassines demeurent encore aujourd'hui incompréhensibles. Alors que le film de Stéphane Robelin démarrait assez tristement, la suite allait se révéler fort réjouissante. Sans doute l'une des meilleures surprises de cette année 2017...

lundi 30 octobre 2017

Tremblement de Terre de Mark Robson (1974)



A Los Angeles, les habitants de la ville sont encore loin d'imaginer le drame terrible qui va se jouer dans quelques heures. Pourtant, des signes avant-coureurs e sont manifestés plus tôt dans la matinée. Pour l'ingénieur en chef d'une entreprise de construction Stewart Graff, c'est la crise. Alors que son patron et beau-père lui offre le plus important poste de celle-ci, son couple bat de l'aile au point qu'il prend la décision de quitter son épouse. A l'autre bout de la ville, le sergent Lew Blade est mis au placard après avoir frappé un policier d'une autre juridiction. Quand au motard Miles Quade, il prépare un sow à moto qui devrait les mettre lui, son assistant Sal et la sœur de ce dernier Rosa à l'abri du besoin.
Mais alors que les heures défilent, les prémices d'une catastrophe à venir se font sentir. Un séisme se fait ressentir dans toute la région et le plus important barrage de la région commence à montrer des signes de faiblesse. Les Scientifique Willis Stockle et Walter Russel, après études, confirment le pire à venir : un tremblement de terre d'ampleur jamais égalé risque de plonger la ville de Los Angeles dans le chaos...

Tourné durant cinq mois au début de l'année 1974, Tremblement de Terre fait partie de ces quelques mastodontes du cinéma américain de l'époque qui demeurent encore aujourd'hui d'une redoutable efficacité. Les films catastrophes, s'ils sont légions, ne comptent dans leurs rangs que très peu de grands classiques. Ceux-ci étant majoritairement daté des années soixante-dix. La même année fut tourné un autre classique du genre, La Tour Infernale de John Guillermin. Mais ce n'est pas tout. L'aube des années soixante-dix vit fleurir une série consacrée aux avions avec le premier d'entre eux : Airport, en, 1970. Puis vint deux ans plus tard L'Aventure du Poseïdon. Autre grand classique tourné à la toute fin de cette décennie, l'excellent Meteor, en 1979. mais il ne faut pas oublier que le film catastrophe est un genre qui existe depuis plus de cent ans, le premier essai remontant en 1908 avec le court-métrage Les Derniers Jours de Pompeï de Luigi Maggi. Un sujet qui d'ailleurs sera repris durant plusieurs décennies.

En ce qui concerne ce Tremblement de Terre réalisé par Mark Robson, on ne peut pas dire qu'il lésine sur les moyens puisqu'après l'habituelle présentation des personnages, le récit gravitant autour des actrices et acteurs Charlton Heston, Ava Gardner, George Kennedy (un habitué des films catastrophes), Victoria Principal ou encore Geneviève Bujold, se précipite sur le thème qui nous intéresse ici. Celui de la catastrophe imminente que le cinéaste a tout d'abord la bonne idée d'aborder d'un point de vue scientifique avant de laisser le scénario mettre en évidence le pire à venir à travers des événement demeurant encore minimes à ce moment très précis. Mettant en place un scénario beaucoup plus complexe que la simple vague de catastrophes détruisant une ville toute entière, le récit jongle entre les histoires personnelles de plusieurs personnages, tous très intéressants.

Puis c'est alors que les premières secousses se font ressentir. Suivies de la plus importante sans qu'aucun détail narratif ne nous ait averti de son arrivée si soudaine. L'ampleur du travail sur les décors explose les rétines. La durée de la scène, ainsi que la chorégraphie (s'entend le placement des acteurs et figurants) et les remarquables effets-spéciaux en mettent plein la vue. Décors réels et maquettes se confondent tant et si bien qu'il est parfois impossible de distinguer le vrai du faux.

La présence des principaux interprètes au capital sympathie est une valeur sûre qui apporte beaucoup à cette œuvre qui dépasse les deux heures. Sans l'ombre d'une image de synthèse qui à l'époque n'était encore qu'un rêve, Tremblement de Terre surpasse tout ce qui a été entreprit auparavant dans le domaine et n'a été qu'en de très rares occasions surpassé. Le cinéaste Roland Emmerich lui-même n'aura retenu la leçon qu'à moyen terme puisque après un excellent Jour D'Après, il allait commettre le pire en réalisant le nullissime 2012. plus de quarante ans après, l'oeuvre de Mark Robson a évidemment pris quelques rides mais n'a pas à rougir devant les blockbusters souvent surestimés d'aujourd'hui...



dimanche 29 octobre 2017

Starship Invasions de Ed Hunt (1977) - ★★☆☆☆☆☆☆☆☆



Il existe de nombreuses manières de perdre son temps. Faire la queue au guichet d'un bureau de poste ou à la caisse d'un supermarché. Attendre l'arrivée d'un train en retard. Passer des heures devant des programmes télé débilitants. Et puis, il demeure des cas un peu plus rares et déconcertants rencontrés et ressentis différemment selon que l'on apprécie ou pas un certain type de cinéma. L'Invasion des Soucoupes Volantes (Starship Invasions) fait incontestablement partie de la catégorie « nanars ». Mais malheureusement, pas des plus réjouissants. Involontairement drôle sous certains aspects, ce petit film canadien sorti la même année que Star Wars ou Rencontres du 3ème Type demeure sans doute comme l'une des plus infectes productions de science-fiction qui aient vu le jour durant les florissantes années soixante-dix.
L'Invasion des Soucoupes Volantes est une minuscule production canadienne réalisée par le cinéaste américain Ed Hunt auquel on doit notamment Les Tueurs de L'éclipse, une sympathique petite production horrifique sortie en 1981. L'auteur y met en scène des extraterrestres belliqueux ayant l'intention de conquérir notre planète en éliminant toute trace de vie humaine à la surface de la Terre. Pour cela, ils emploient une technique assez particulière. Un vaisseau placé en orbite autour de la planète projette un faisceau électrique provoquant des troubles mentaux chez les humains qui se mettent alors à se suicider. Cette idée qui sera vaguement reprise par le cinéaste américain d'origine indienne M. Night Shyamalan trente et un ans plus tard avec Phénomènes aurait pu être une excellente idée si à l'écran, le résultat n'était pas si désastreux.

On se demande alors ce que sont venus foutre dans cette galère l'américain Robert Vaughn et le britannique Christopher Lee. Ed Hunt y évoque à son tour une rencontre du troisième type encore plus rapprochée que celle de Steven Spielberg puisque en parallèle à l'invasion des extraterrestres, une autre race, beaucoup plus pacifiste fait appel au professeur Allan Duncan et son ami informaticien Malcom afin de les aider à contrer les projets d'un certain Capitaine Ramses (!!!).

Tout dans L'Invasion des Soucoupes Volantes demeure raté. Même l'interprétation dont on ne sait si l’effarante médiocrité est réellement due au jeu des interprètes où à la mise en scène de Ed Hunt qui ose tout de même fournir en cette année 1977, parmi les pires effets-spéciaux. Du moins, indignes d'un tel projet pour lequel deux grandes vedettes du cinéma ont été convoquées. Il est d'autant plus dommage que le scénario faisait au départ preuve de bonnes intentions en évoquant certains aspects relativement convainquant : Des hommes et des femmes sont abductés. Le suicide de centaines d'humains. L'aide inespérée d'êtres venus d'ailleurs. Ou encore la communication par télépathie employée par les extraterrestres.
Mais d'entrée de jeu, quelque chose ne va pas. La première victime, un paysan évoquant davantage l'idiot du village, manque de crédibilité. La soucoupe volante est d'une confondante laideur et nous renvoie aux pires productions du genre des années cinquante. La recherche de perspective entre le gigantisme du vaisseau et les repères visuels servant à lui offrir sa grandeur apparente est puérile. On n'y croit pas un seul instant. La première rencontre avec les extraterrestres est un véritable choc. Nos sentiments oscillent entre rires contenus et désespoir. Preuve que de grands noms n'évoquent pas systématiquement de bons films. Les E.T d'Ed Hunt s'habillent très près du corps, dans des tenues relativement moulantes, et les recouvrant de la tête aux pieds et expriment leurs sentiments en fronçant les sourcils.

L'Invasion des Soucoupes Volantes manque totalement d'ampleur et d'enjeux. C'est mou, répétitif, et les combats dans l'espace sont terriblement laids. Et représentés par des lumières censées signifier la présence de vaisseaux combattant soit pour l'appropriation de la Terre, soit pour la sauvegarde de ses habitants. Les extraterrestres sont ridicules et sont servis par des dialogues insipides. La seule véritable sensation d'invasion se ressent au travers d'une musique fort envahissante et parfois hors de propos. Si quelques airs électroniques justifient leur présence par leur bizarrerie, d'autres demeurent par contre en total décalage avec les images et le récit. L'ensemble est kitch et grotesque. Impossible de faire l'impasse sur la ridicule base sous-marine en forme de pyramide et sur l'intérieur des vaisseaux dramatiquement minimalistes. Navrant...

Isolation de Billy O'Brien (2005) - ★★★★★★★☆☆☆



En vingt-trois ans de carrière, le cinéaste irlandais Billy O'Brien a réalisé toute une série de courts-métrages avant de tourner trois longs-métrages entre 2005 et 2016, dont un I am not a Serial Killer plutôt convaincant. Tout comme son premier, Isolation, dont il est question ici. C'est sans doute parce qu'avant d'être cinéaste, Billy O'Brien a travaillé dans le milieu agricole qu'il a choisi le cadre d'une ferme isolée en pleine campagne pour planter le décor de ce très curieux film d'épouvante qui semble également chercher ses racines dans l'un des grands classiques de la science-fiction, le The Thing de John Carpenter. En effet. Remplacez la station de recherche américaine basée en Antarctique par une exploitation agricole, et ses membres victimes d'une créature venue d'ailleurs par un animal génétiquement modifié utilisant ses hôtes pour croître, et l'histoire ne fait que recommencer. L'une des seules différences étant que désormais, on connaît d'avance celui ou celle qui deviendra bientôt un danger pour les autres.
Billy O'Brien joue avec la peur de l'inconnu, du noir et des manipulations génétiques. Ici, tout part en vrille parce que fermier Dan Reilly (l'acteur John Lynch) veut sauver son exploitation agricole. C'est ainsi qu'il accepte de collaborer avec un laboratoire de biotechnologies auquel contribue Orla (l'actrice Essie Davis), l'ancienne compagne de John, sous les ordres de John, un chercheur qui soumet des tests de fécondations à plusieurs vaches de John. Si les résultats promettent d'être concluants, il en est en réalité, tout autrement. L'une des vaches met bas et donne naissance à un veau difforme qui est immédiatement abattu. John effectue alors des tests sur l'animal et constate qu'il est porteur lui-même de six embryons. Alors qu'ils paraissent être morts, l'un d'eux, qui a survécu, s'échappe et cherche à se reproduire en s'attaquant d'abord à une autre vache. Entre temps, les autorités apprennent à Dan que Orla a disparue. Aidé par un jeune couple qui se cache à l'intérieur d'une caravane sur sa propriété, le fermier traque la créature afin de l'éliminer. Mais bientôt, des symptômes apparaissent chez Dan et Jamie (l'acteur Sean Harris), le compagnon de Mary (l'actrice Ruth Negga) qu'il héberge dans sa ferme. En effet, en essayant plus tôt d'aider la vache à mettre bas, ils ont tous les deux été mordus par le veau...

Avec Isolation, le cinéaste Billy O'Brien réalise un premier long-métrage plutôt réussi qui se démarque de la majorité des productions du genre avec un certain brio. Déjà, en abordant l'épineux sujet des organismes génétiquement modifiés, il s'attaque à un propos particulièrement brûlant et très ancré dans l'air du temps. L’œuvre de l'irlandais forme un huis-clos angoissant et étouffant exclusivement situé dans une ferme à l'apparence étonnamment glauque qui rappelle partiellement les univers sinistres rencontrés dans les différents chapitres de la saga Massacre à la tronçonneuse. Sauf qu'ici, on ne rencontre pas de tueurs dégénérés cannibales, ni tronçonneuses, mais une créature, produit de manipulations génétiques contre-nature. Une bestiole difforme qui, là encore, rappelle la première forme que choisi de prendre celle de The Thing au contact des chiens de la station de recherche américaine. Son exosquelette laisse entrevoir l'hypothèse d'une confrontation avec l'homme plutôt rude. Une impression fortement renforcée lorsque John (l'acteur Marcel Lures) étudie les cellules de l'une des créatures mortes et constate alors qu'elles sont toujours en activité et se reproduisent à une vitesse déconcertante.

La faute ou pas à un manque de maîtrise dû à la réalisation de son premier long-métrage, Billy O'Brien fout tout en l'air après plus d'une heure et dix minutes, le reste du film est gâché par une mise en scène qui semble pressée d'en finir avec le sujet. Les effets gore sont assez pitoyables, la créature est agitée de soubresauts ridicules et l'action est désormais assez mal mise en scène. L’œuvre se transforme en un sous-Alien navrant aussi désolant qu'incompréhensible. Le cinéaste semble ainsi abandonner son bébé bien avant le générique de fin alors que jusqu'à maintenant, il avait fait preuve d'une grande ingéniosité en instaurant un climat particulièrement angoissant. Mais, même si la fin déçoit quelque peu, avec une conclusion attendue, le résultat demeure tout de même honnête...

samedi 28 octobre 2017

The Warriors de Walter Hill (1979) - ★★★★★★★☆☆☆



Les Guerriers de la Nuit, c'est l'un des grands films cultes de la fin des années soixante-dix. Une œuvre qui à l'époque pouvait s'envisager comme d'anticipation mais qui à l'heure actuelle ressemble davantage au monde tel que nous le connaissons. La violence règne dans nos rues et si celle du film de Walter Hill ressemble à un immense terrain de chasse investit par des dizaines de gangs affublés de costumes de parade, nulle doute qu'elle fait écho des faits-divers qui encombrent la presse papier ainsi que les médias télévisés et radiophoniques d'aujourd'hui.
Bienvenue à New York. Loin de ses immenses buildings, là où une centaine de gangs de partagent les quartiers les plus pauvres. Noirs et blancs se côtoient dans une toute relative tranquilité dans un univers où le nombre, la force et la violence dominent sur tout le reste. Face à ces milliers d'adeptes, les autorités veillent à maintenir l'ordre. C'est ainsi que Cyrus, leader du plus important gang de la ville, les Gramercy Riffs, décide d'organiser une réunion entre bandes rivales. Des milliers d'individus se massent autour du leader, lequel propose alors un marché aux autres gangs : faire la paix, s'unir, et combattre les autorités ainsi que la mafia locale. Si un grand nombre de gangs adhèrent à cette idée, un homme dans la foule semble avoir décidé du contraire. Armé d'une arme à feu, il tire sur Cyrus qui s'écroule au sol, mort ! Ce même homme qui vient d'abattre le chef des Gramercy Riffs accuse à tort l'un des membres de l'un des plus puissants gangs de New York, les Warriors. Très vite, la rumeur circule dans la foule et Swan et les autres membres du gang n'ont d'autre choix que de prendre la fuite avant même d'avoir pu se défendre de ces accusations. Dès, lors, et alors qu'ils cherchent par tous les moyens à rejoindre leur quartier général, les Warriors vont être traqués durant une nuit entière par les autres qui réclament vengeance...

Voici donc à peu de chose près l'intrigue de ces cultissimes Guerriers de la Nuit dont l'intérêt n'a pas diminué même presque après quarante ans d'existence. Le cinéaste américain Walter Hill, spécialiste du film d'action musclé qui proposera une alternative un peu plus commerciale cinq ans plus tard avec l'excellent Les Rues de Feu, signe une œuvre plutôt violente et presque intégralement filmée de nuit. D'où cette tension permanente que sécrètent les environnements dans lesquels sont plongés les membres des Warriors notamment constitués de Swan donc, mais également d'Ajax, de Cleon, de Fox ou encore de Cochise. L'un des aspects notables des Guerriers de la Nuit est l'indifférence culturelle et raciale de certains gangs qui acceptent dans leurs rangs des individus de tous horizons. Le cinéaste réalise une œuvre à partir du scénario qu'il a lui-même écrit en compagnie de David Shaber, lesquels ont adapté le roman éponyme de Sol Yurick. Contrairement au format littéraire qui impose naturellement une grande part au descriptif, le long-métrage demeure relative dénué d'intrigue.

Le récit tourne en effet essentiellement autour du personnage de Swan (acteur Michael Beck) et de ses sbires tentant d'atteindre leur quartier général. Les rencontres brutales sont légions et façonnent le plus gros de ce film décomplexé. L'un des aspects les plus ludiques dirons-nous, est l'apparence de certains gangs, ceux-là mêmes qui se frotteront aux Warriors. Maquillages, salopettes, patins à roulettes, et autres accessoires façonnent la personnalité des gangs. Les plus démunis, ou du moins, les ceux dont la réputation est la moins importante, arborent des tenues beaucoup moins étonnantes, voire classiques. Comme le demeurent d'ailleurs les Warriors qui restent cependant comme l'un des groupes les plus célèbres du lot. D'où cette forme de maturité et de modestie qui marque un niveau d'intelligence éminemment supérieure à celle de certains autres gangs, et notamment celui formé autour de Luther (l'acteur David Patrick Kelly), le taré qui tuas plus tôt Cyrus et ce, sans aucune raison apparente.
Walter Hill ne se contente pas de proposer un spectacle où la violence domine et propose une relecture du romantisme un peu particulière entre Swan et la paumée Mercy (l'actrice Deborah Van Valkenburgh). Les Guerriers de la Nuit s'inscrit également comme une relecture fictive des nombreux événements qui opposèrent les différents gangs de New York dans le courant des années soixante-dix. S'il a un peu vieilli, Les Guerriers de la Nuit a par contre conservé un certain charme. Une œuvre qui trente-huit ans après est toujours aussi culte...

vendredi 27 octobre 2017

Noyade Interdite de Pierre Granier-deferre (1987) - ★★★★★★☆☆☆☆



Trois années de suite, le cinéaste Pierre Granier-Deferre confiera à l'actrice Elizabeth Bourgine l'un des principaux rôles. Dans Cours Privé, La Couleur du Vent, et entre les deux, celui d’Elizabeth pour Noyade Interdite. Un titre revendiquant un certain cynisme. Comme certains des personnages d'ailleurs. Au même titre que l'inspecteur Paul Molinat qu'incarne l'immense Philippe Noiret, ou que l'inspecteur Leroyer, qu'interprète l'excellent Guy Marchand. Deux flics qui se détestent (presque) cordialement. Contraints par leurs supérieurs de faire équipe sur une bien étrange série de meurtres. Un cadavre, puis deux, trois, et enfin quatre se retrouvent échoués sur la plage d'une station estivale juste avant la période des grandes vacances en été. De quoi inquiéter le maire et les habitants de la communauté qui vivent en partie grâce aux recettes effectuées lors de cette période estivale qui accueille généralement de nombreux touristes.
Comme le souligne judicieusement et avec un certain sens de l'ironie un Molinat pressé par le maire de la ville (le tournage a eu lieu à Saint-Palais-sur-Mer ainsi que dans les environs de Royan, deux communes du Sud-Ouest de la France, situées dans le département de la Charente-Maritime), la plage est noire de monde. Un « monde » presque exclusivement constitué de journalistes et d'habitants attirés par l'odeur du sang.

« - Un joli corps, c'est drôlement beau.Vous vous retournez tous les combien ?
- Toutes les douze minutes.
- Ah ! Comme le gigot ? »

A cette occasion, Pierre Granier-Deferre a su s'entourer de très belles interprètes et d'un nombre assez important de vedettes. Au nombres desquelles, les deux principaux acteurs cités plus haut, la chanteuse et actrice italienne Laura Betti qui interprète ici un rôle assez troublant, Dominique Zardi, très grand habitué du cinéma de Granier-Deferre puisqu'il joua dans dix-neuf des vingt-six longs-métrages du cinéaste et joue ici le rôle du vendeur de beignets. La géniale Catherine Hiegel dans celui du Dr. Chauveau, Andréa Ferréol dans celui de Cora ou encore Suzanne Flon dans celui de Hazelle. Mais Pierre Granier-deferre va, avec Noyade Interdite, mettre surtout en avant trois superbes interprètes féminines. Elizabeth Bourgine, donc, mais également Gabrielle Lazure, ainsi que Marie Trintignant, laquelle fut surtout révélée au public grâce à son interprétation du personnage de Mona dans l'hyper-pessimiste Série Noire d'Alain Corneau.
L'enquête est relativement molle. Presque aussi lente que les jours qui passent et attendent avec impatience que la vie reprenne dans cette ville comptant sur la migration de milliers de vacanciers. A la place, des morts. Tous tués d'une balle dans l'oreille. L'enquête s'avère difficile d'autant plus que les rapports entre les deux inspecteurs sont particulièrement houleux. D'un côté Noiret, dont le personnage, habitant direct de cette ville concernée par les cadavres qui échouent sur la plage revendique un certain respect dans la mise en œuvre de l'enquête. Tandis que fraîchement débarqué sur place, l'inspecteur Leroyer, imposé par leurs supérieur hiérarchique s'incruste. Fouille. Sans l'autorisation de celui qui confirme sa supériorité en précisant qu'il est inspecteur, oui, mais en chef !

Pierre Granier-Deferre ménage une ambiance chargée d'électricité. L'humour y est noir. Presque dérangeant. Un policier qui sort des sentiers battus, se mouvant au rythme du ressac de l'océan. Un érotisme soft porté par des actrices qui n'hésitent pas à se dévêtir devant l'objectif du cinéaste pour contenter le regard voyeur de certains personnages comme des spectateurs masculins en général. On pourrait lui reprocher son manque de rythme mais connaissant l’œuvre de ce cinéaste auquel il arrive de prendre son temps Noyade Interdite, en terme de vélocité, demeure dans la continuité...

jeudi 26 octobre 2017

La Cage de Pierre Granier-Deferre (1975) - ★★★★★★★☆☆☆



Lino Ventura, ce grand, cet immense acteur au physique de brute épaisse. Comment avant La Cage aurait-on pu l'imaginer enfermé derrière les barreaux d'une prison. Comme un fauve. Comme un singe pour le seul plaisirs des yeux de son ancienne épouse ? L'actrice suédoise Ingrid Thulin. Une interprète qui, mine de rien, avait déjà tourné sous la houlette d'Ingmar Bergman, Vincente Minnelli, Alain Resnais et Luchino Visconti, et toucher à l'érotisme auprès de Tinto Brass avec Salon Kitty et l'épouvante avec La Corta Notte delle Bambole di Vetro d'Aldo Lado. Fragile, Ingrid Thulin ? Pas tant que cela. Son personnage, oui. D'une intense fragilité psychologique dirons-nous. Une peu folle, mais en pleine maîtrise de ses moyens lorsque son personnage invente un prétexte pour attirer, et enfermer son ancien mari dans une cage située dans la cave de sa maison de campagne. Hélène est en effet très perturbée depuis l'abandon de Julien il y a de cela plusieurs années déjà. Des années qui n'ont pas effacé le chagrin, et ce sentiment d'avoir été jetée comme un kleenex. Lino Ventura, en monstre ? Là encore, difficile d'y croire. Surtout lorsque le cinéaste Pierre Granier-Deferre nous explique que si Julien a divorcé, ça n'est pas par dédain, ni parce qu'il en a trouvé une mieux qu'elle, mais parce qu'à force d'étouffer auprès d'une Hélène jalouse, méfiance, il a pris la fuite.
Quatre années après le désespéré Le Chat, avec Simone Signoret et Jean Gabin, Pierre Granier-Deferre nous propose une nouvelle lecture des rapports qu'entretiennent un homme et une femme dont la relation est arrivée en bout de course. Et toujours chez lui, c'est la femme qui trinque. Sauf qu'ici, tout y demeure beaucoup plus nuancé. Moins sombre, moins déprimant, La Cage aurait pourtant enfoncer le clou de l'atmosphère étouffante de son prédécesseur avec ce huis-clos se déroulant presque exclusivement dans la cave d'une maison à peine éclairée, mais aménagée sommairement de manière à ce que Julien puisse y rester aussi longtemps que le jugera son ancienne femme. La belle et mature Ingrid Thulin. Un brin dérangée tout de même, mais assez forte pour parvenir à ses fins.

Le lion, dans sa cage, tente par tous les moyens de s'en sortir. Des ressources inutiles dans ce genre de cas puisque Hélène a pensé à tout. Barreaux en acier, toilettes sans fenêtre, et porte verrouillée impossible à dégonder. Comme dans Le Chat, et ici plus encore, l'intrigue repose essentiellement sur les dialogues et sur le talent de ses interprètes. Une fois encore, Pierre Granier-Deferre s'occupe lui-même du scénario tout en s'entourant de l'écrivain, dialoguiste et scénariste français Pascal jardin, les deux hommes adaptant pour l'occasion une pièce de théâtre de Jack Jacquine.
L'histoire se répète. Un homme et une femme se rencontrent, s'aiment, se marient, puis se séparent (du moins dans le cas présent). Sauf que dans ce classique déroulement vient s'inscrire un événement qui va tout bouleverser. Dans Le Chat, Simone Signoret,entre le choix du suicide ou de l'homicide préférait tuer le félin. Un acte stupide qui ne résolvait pas les problèmes de son couple et avait tendance même à les rendre plus difficiles encore. Concernant La Cage, c'est la même chose. Car au fond d'elle, Hélène espère, en enfermant Julien, récupérer celui qui lui avait tant manqué durant toutes ces années. C'est malheureusement l'effet inverse qui se produit. Lui d'habitude si calme et si attaché à Hélène devient mauvais, violent, et surtout haineux. Tout le contraire de ce qu'attendait de cette situation Hélène.

Pierre Granier-Deferre est pourtant cette fois-ci beaucoup moins radical. Bien moins expéditif. Il demeure même dans le dernier acte un réel espoir. Pas celui de renouer en amour, mais le retour à une certaine complicité, et ce, malgré la drame qui vient tout juste de survenir. Le point d'orgue d'une œuvre qui se révèle finalement à part dans la carrière de Lino Ventura qui campe pour l'occasion un rôle diamétralement opposé à ceux qu'on lui connaissait jusque là. Une œuvre rare, pas un chef-d’œuvre, loin de là, mais tout de même intéressante à découvrir...

mercredi 25 octobre 2017

Le Chat de Pierre Granier-Deferre (1971) - ★★★★★★★★☆☆




Le Chat de Pierre Granier-Deferre, c'est le reflet de la tristesse absolue. De la solitude du couple. De l'amour qui n'est plus, abandonnant sa place à la haine ordinaire. Au dédain. Au mépris. A l'amertume, au tourment, au désespoir. Ce dernier, c'est celui qu'éprouve Clémence, le personnage interprété par l'immense actrice française Simone Signoret. Cette ancienne trapéziste qui a dû abandonner sa carrière après une chute lors d'une représentation de cirque. Une sortie sur civière définitive pour une jeune femme qui ne se consacrera plus qu'à celui qu'elle aime. Mais qui la dévore de l'intérieur. Lui, c'est Jean Gabin. Incarnant Julien, cet ancien ouvrier typographe. Au fil des années, vingt-cinq ans après leur union, Clémence et Julien ont cessé de cultiver leur passion commune. Ils vivent désormais au beau milieu d'un quartier de la banlieue parisienne. Seuls rescapés d'un lotissement qui s'effondre à coups de grues et de pelleteuses. Sous les gravas, les lieux, bientôt, renaîtront sous un nouveau jour, et, au milieu de ce qui ressemble pour l'instant à un vaste chantier, comme une verrue au milieu d'un visage, les deux héros de cette triste et bouleversante histoire demeurent dans le silence. Dans une même maison, vivent deux être qui se sont aimés mais qui depuis longtemps déjà semble-t-il, s'ignorent royalement. A qui la faute ?
Galant, Pierre Granier-Deferre imagine les sources du mal à travers l'odieux personnage de Julien que campe merveilleusement bien Jean Gabin. Le responsable, c'est donc forcément lui. Un homme qui n'éprouve plus rien pour celle qu'il a aimée. Jalousée. Au point de se satisfaire de l'accident dont elle fut victime par le passé. C'est vrai, qui aurait alors voulu d'une éclopée ? Beau prince, lui l'a épousée. Mais ne lui a jamais fait d'enfants. L'a cloisonnée dans ce petit pavillon de banlieue. Sans doute très joli à l'époque de sa construction, mais qui dans ce quartier qui accueillera bientôt de grands et modernes buildings fait tâche.

Alors, justifié ou pas, le comportement de Clémence peut après tout se comprendre. Ce chat qui vient de s'installer dans le couple, c'est forcément lui le problème. Du moins, celui qui n'aide pas à la réconciliation. D'un côté, Julien qui se trouve un nouveau compagnon, désertant davantage encore ses responsabilités d'époux. De l'autre, Clémence, qui vit l'intrusion du félin comme une nouvelle trahison. Oui, vraiment, on peut comprendre qu'à bout de force, elle aie voulu s'en débarrasser. L'abandonner dans un grand magasin. Pour l'atteindre lui, Julien, lui faire mal comme il la blesse, elle, sans relâche, ignorant ses cris de désespoir. Lorsqu'il acceptait encore de lui adresser la parole. Ce silence qui désormais hante les lieux, c'est lui qui l'a instauré. Et puis, arrive ce qui devait arriver...

« j't'avais dit que j't'aimerais toujours, ben, je m'suis gouré, j'ai vieilli, et puis j't'aime plus... »

Le Chat, c'est la promesse d'une expérience vraiment hors du commun. C'en est même presque trop. Trop de chagrin. Trop de noirceur. Trop pessimiste. Avec ce long-métrage, Pierre Granier-Deferre nous introduit dans l'intimité de ce couple délié avec une force d'évocation étonnante. Simone Signoret joue sur l'expressivité de son visage pour faire passer la foule d'émotions qui traversent son personnage. Jean Gabin, lui, use de son timbre et d'un vocabulaire imprudent. Le Chat n'est clairement pas le film divertissant des familles. C'est surtout la satisfaction de retrouver deux interprètes magnifiques qui du haut de leur talent, n'ont pas besoin d'en faire des tonnes pour qu'un long frisson nous parcoure l'échine. Pierre Granier-Deferre expose ses personnages sans pour autant donner dans le voyeurisme. Curieux comme le film semble faire référence à l'histoire même de Simone Signoret qui selon la légende, vécu une fin de relation avec l'immense Yves Montand, plutôt désagréable. Avec pudeur, mais sans jamais sacrifier son œuvre à la facilité et aux compromis, le cinéaste prenait un risque insensé. Le long-métrage est si désespéré, si profondément ancré dans la noirceur du propos et de ses personnages qu'on pourrait éprouver le besoin de le fuir.
S'il demeure un élément essentiel, pourtant particulièrement discret ici, à la mise en œuvre de ce récit, c'est le thème musical composé par Philippe Sarde. Un thème au piano qui, invariablement fait chavirer le cœur. Vous le transperce comme il incommode l'âme. La tragédie prend alors davantage de sens et certaines scènes y gagnent en émotion. En profondeur. Comme ce ralenti fixant sur la pellicule une Simone Signoret se recoiffant sur le pas de la porte de leur maison. Bouleversant ! La sinistrose nous guette et pourtant, il demeure comme une attirance indéfectible envers Le Chat qu'une alchimie finement dosée parvient à rendre d'une parfaite homogénéité. Si Jean Gabin et Pierre Granier-Deferre ne tourneront plus ensemble, le cinéaste et Simone Signoret se retrouveront par deux fois encore, sur le tournage de La Veuve Couderc, la même année, ainsi que onze ans plus tard en 1982 sur celui de L'Étoile du Nord... A noter la présence d'Annie Cordy dans le rôle de Nelly, la patronne de l'hôtel et ancienne maîtresse de Julien...


mardi 24 octobre 2017

Une Etrange Affaire de Pierre Granier-Deferre (1981) - ★★★★★★★★☆☆



Jusqu'où certains seraient-ils prêts à aller pour conserver leur emploi ? C'est à cette question que tente de répondre le cinéaste français Pierre Granier-Deferre auquel ont doit notamment Le Chat, La CageAdieu Poulet, ou encore Noyade Interdite. Imaginez-vous vous réveiller un matin et réaliser que depuis deux ans, le poste que vous occupez n'est pas essentiel à la bonne marche de l'entreprise pour laquelle vous travaillez. Un emploi qui jusqu'à maintenant n'a pas semblé déranger qui que ce soit dans votre entourage, pas même l'ancien directeur qui vient tout juste de mourir. Alors, quand débarque son successeur, tout est remis en question. On évoque une charrette, avec l'éventualité que vous en fassiez partie. Forcément, cela va jouer sur votre moral ainsi que sur celui de vos collègues de travail. Le risque, c'est que cela dépasse les frontières de votre vie professionnelle pour empiéter sut votre vie privée. La rencontre avec le nouveau directeur est brutale. Vous êtes paralysé. Ne savez que répondre lorsqu'il vous interroge sur votre fonction. Lui, est apparemment décidé à faire un grand nettoyage. Se débarrasser du superflu. Qu'êtes-vous donc prêt à sacrifier pour conserver votre emploi ?

Louis Coline travaille dans le service marketing d'un grand magasin à Paris. Marié avec Nina, il mène une vie simple et demeure très proche de sa grand-mère à laquelle il rend régulièrement visite. Depuis deux ans, il bosse à son rythme. Pas vraiment pressé de se rendre au travail, il boit des coups au bar, passe devant le bureau de tous ses collègues pour leur faire un petit coucou et exécute les ordres du responsable de son département, Gérard Doutre. Lorsqu'arrive Bertrand Malair, le nouveau directeur, l'ambiance est froide. Dès le départ, Louis est comme « examiné » par le nouveau patron. L'objectif de ce dernier est clair : les résultats rencontrés ces derniers temps par le magasin ne sont pas suffisants. Louis est-il prêt à une disponibilité de tous les instants ? La réponse est oui...

Une Étrange Affaire, forcément, glace les sangs. Parce que ce récit, basé sur un scénario écrit à six mains par Christopher Frank, Pierre Granier-Deferre et Jean-Marc Roberts et inspiré par le roman Affaires Étranges de ce dernier, nous relate la lente et pénible dégradation morale, physique et intime d'un homme prêt à tout pour conserver son emploi. Cet homme, c'est l'acteur Gérard Lanvin. Son épouse, l'actrice Nathalie Baye. Un couple qui explose devant la vampirisation dont est victime le publicitaire. La cause ? Michel Piccoli, qui dans le rôle de Bertrand Malair, campe un nouveau directeur froid, cynique, envahissant. Pierre Granier-Deferre joue à nous faire peur. Quelques menues phrases proférées par l'homme en costard-cravate nous plongent dans l'ambiance. Cette atmosphère délétère où l'individu est prêt à s’avilir. Lanvin, ce petit employé presque insignifiant durci le ton. Calque son comportement sur celui des deux plus proches collaborateurs de Malair, eux aussi embarqués dans cette étrange histoire dont l'écho résonne plus que jamais de nos jours. Ces deux chiens de garde au comportement tellement curieux qu'ils en deviennent très vite inquiétants, ce sont Jean-Pierre Kalfon, et Jean-François Balmer. Deux interprètes idéaux. Sous ses allures de petite critique sociale, Une Étrange Affaire est un cauchemar de tous les instants qui nous renvoie à nos propres peurs.

Pour l'occasion, le compositeur Philippe Sarde propose une partition musicale sinistre collant parfaitement à l'ambiance de cette œuvre étouffante. Michel Piccoli est comme toujours, magistral. L'acteur dévore littéralement un Gérard Lanvin diminué, mais calquant finalement son comportement sur celui du directeur. Jean-Pierre Kalfon et Jean-François Balmer produisent une interprétation sans faille. D'un côté, le bon copain. De l'autre, l'homme distant, dédaigneux. Un binôme caractérisé par une volonté de se plier à toutes les exigences du boss, quitte à sacrifier jusqu'à leur vie privée et celle des autres.
Le cinéaste ne se contente pas de décrire les changements comportementaux de son héros sur son milieu de travail, mais dans sa vie intime également. L'aliénation d'un individu se sacrifiant sur l'autel de la réussite. Une Étrange Affaire flirte avec l'horreur psychologique. Une œuvre traumatisante qui n'a absolument pas perdu de sa force évocatrice même trente-six ans après sa sortie...

lundi 23 octobre 2017

Tir Groupé de Jean-Claude Missiaen (1982) - ★★★★★★★☆☆☆



Efficacité semble être le mot d'ordre du cinéaste français Jean-Claude Missiaen dont il s'agissait ici du premier long-métrage. Tourné en 1982, il ne ressemble pourtant pas vraiment au film d'un homme qui se dit passionné par les films d'action. Tir Groupé ne ressemble en rien à ces films centrant leur intrigue sur l'auto-défense. Si le héros campé par l'acteur Gérard Lanvin a bien pour objectif de tuer les trois hommes qui ont commis l'irréparable en tuant celle qu'il aimait, le film s'articule en fait autour de quatre éléments. L'enquête criminelle, le désir de vengeance d'Antoine Béranger, compagnon de la victime Carine Ferrand, les flash-back nous donnant la mesure de l'attachement qu'avaient l'un pour l'autre les deux personnages, ainsi que les méfaits perpétrés postérieurement par les trois voyous.
L'enquête criminelle tout d'abord : menée par l'inspecteur Alexandre Gagnon qu'interprète l'acteur Michel Constantin, un homme droit, un peu rude, mais intègre et déterminé. L'enquête est longue, parfois fastidieuse, mais l'inspecteur et les membres de sa section qui sont chargés de retrouver les trois individus qui se sont rendus responsables du meurtre de Carine font tout ce qu'ils peuvent pour mettre la main sur eux. En parallèle, Antoine lui aussi recherche les trois hommes. Mais pas seulement. Ce vendeur de fringues sur les marchés du périphérique se procure une arme et des munitions. Ses investigations le mènent plus rapidement que la police vers la solution. Il précède presque l'inspecteur et ses hommes.
Jean-Claude Missiaen s'attache à nourrir la psychologie de ses deux principaux interprètes à travers de très émouvants flash-back. Gérard Lanvin, bien sûr, mais également Véronique Jannot. Douce, belle, et sensuelle. La victime d'un crime ordinaire sordide. Tuée après avoir été agressée dans le train qui la ramenait chez ses parents. Première rencontre dans un marché où travaille Antoine en compagnie de son ami Félix Péjat (l'acteur Mario david). Puis plus tard, lorsque les amoureux se retrouvent pour la première fois chez Antoine. Enfin, lors d'un repas familial chez les parents de Carine, officialisant ainsi leur relation. Des scènes postérieures au meurtre qui donnent toute l'ampleur de ce gâchis.

Enfin, pour terminer, les trois voyous. De petites frappes qui possèdent tous la gueule de l'emploi. Dominique Pinon, dans le rôle du plus insignifiant des trois, Daniel Verlot. Puis vient ensuite Roland Blanche, dans celui de Michel Poubennec, le réel déclencheur, mais qui cependant n'est pas le chef de ce trio de ratés. De marginaux ne vivant que de vols et d'agressions. Prêts à couper le doigt d'un homme pour lui dérober son alliance. Le chef, lui, c'est Samson Balestra. Une vraie gueule de brute. Le plus dur des trois. Le moins agité. Du moins, en apparence puisqu'au final, c'est lui qui donnera le coup fatal à Carine. L'un des aspects les plus intéressants de Tir Groupé demeure dans la volonté d'Antoine de se faire justice lui-même, même s'il n'y parviendra finalement qu'en partie (les flics se chargeant de tuer deux des coupables). Le petit vendeur de jeans au bagou charmeur se transforme peu à peu en un individu obnubilé à l'idée de venger la mort de sa bien aimée. Sorties nocturne à la recherche des coupables. Entraînement au tir aux abords d'une décharge. Et jusqu'à l'acte libérateur mettant un point final à la traque.

Le titre du film évoque un style de tir cherchant à atteindre un même but. La fin, elle, donne un aperçu des conséquences pour celui qui décide de se faire lui-même justice. Pas vraiment ludique mais très intéressant à suivre, Tir Groupé réserve de bonnes surprises. Les premiers et seconds rôles sont impeccables. Jean-Roger Milo impressionne toujours autant avec cette incroyable gueule qui aurait pu le condamner à n'interpréter que des rôles de méchants. Gérard Lanvin explore différentes facettes de son talent. Entre émotion et rage au ventre. Le film de Jean-Claude Missiaen est sans conteste une belle réussite qui n'a pas trop vieilli malgré ses trente-cinq d'âge...
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