Héros de la révolution
cubaine, le camarade Fábián Elvtárs organise une collecte de sang
à l'attention du peuple vietnamien. Il a pour escorte la jeune et
séduisante Magyar Mária qui durant les trois semaines à venir va
l'accompagner dans une tournée ayant donc pour but de récolter la
précieuse sève. Mais alors que Fábián Elvtárs est censé avoir
soixante ans, il n'en paraît que trente. Le flair aiguisé et un
goût prononcé pour le précieux liquide qu'il récolte auprès de
la population hongroise, c'est peut-être grâce à cette ''boisson''
dont il s'abreuve qu'il parvient à conserver sa jeunesse. Magyar
Mária, elle, est chargée de mettre en confiance l'ancien héros
tandis que son compagnon Kun László veille en retrait à ce que
tout se déroule dans les meilleures conditions. Mais le temps presse
car pour le camarade Kádár János et son épouse, c'est le goulag
qui leur pend au nez s'ils ne découvrent pas très rapidement le
secret de la vie éternelle que leur exige le camarade Brejnev...
Comme l'indiquent le script et l'univers dans lequel sont plongés
nos protagonistes, nous sommes au tout début des années
soixante-dix. Pulls en acrylique et à col roulé pour les hommes,
chignons pour les femmes, à l'époque de l'Union Soviétique, bien
avant sa dissolution...
À l'esthétique austère,
le réalisateur hongrois originaire de Budapest Márk Bodzsár
oppose un ton humoristique très noir et sarcastique. Avec son
intrigue tournant autour d'un vampire dont l'identité et la
particularité ne demeurent à aucun moment une inconnue (voir le
titre qui même dans sa version originale laisse transparaître sa
filiation avec un célèbre suceur de sang originaire des Carpates),
Drakulics elvtárs tente
avec plus ou moins de bonheur de mêler tout ou partie des poncifs
relatifs à l'ère de l'Union Soviétique, allant même jusqu'à se
lancer dans une allégorie particulièrement saignante de l'Amérique
avec ce breuvage plasmatique qui versé dans des bouteilles de soda
fera illusion pour quiconque y verra un allusion au plus célèbre
des sodas vendus dans le monde. En 2020, le long-métrage de Márk
Bodzsár remportera le prix du meilleur scénario au Festival du film
de Sitges. Si Drakulics elvtárs est
effectivement original, c'est sans doute davantage parce que son
auteur inclus cet élément fantastique au cœur d'une intrigue
certes humoristique mais entrant cependant dans un cadre historique.
L'absurdité se mêle au thriller tandis que l'apparent sérieux des
événements est contrecarré par une succession d'épiphénomènes
qui tendent à faire du film un pastiche des longs-métrages de
(contre)-espionnage...
Drakulics elvtárs
est donc farfelu, inspiré (même si l'idée de la Mustang apparaît
comme un emprunt grossier au véhicule que conduit Ivan, l'un des
personnages charismatiques du chef-d’œuvre de l'américain Brad
Anderson The Machinist),
qui d'un point de vue cinématographique se veut référentiel (y
sont notamment évoqués Buster Keaton ou Bela Lugosi), cynique,
historique (évidemment, la référence à l'Union Soviétique y est
parfaitement claire). Les interprètes sont particulièrement bien
campés, à commencer par l'acteur Zsolt Nagy, charismatique et qui
interprète le vampire, la charmante Lili Walters qui joue la
délicieuse Magyar Mária ou celui qui tient de compagnon à la jeune
femme, l'acteur Ervin Nagy dans le rôle de Kun László. Le vampire
du second long-métrage de Márk Bodzsár après Isteni
müszak semble
avoir retenu la leçon et accumule là aussi, quelques-uns des
poncifs relatifs au genre. Cela n''étonnera donc personne de
retrouver un Fábián elvtárs craignant le soleil, l'ail, les
crucifix ou l'eau bénite. Déjà plus amusant, notre suceur de sang
semble avoir une aversion pour les saucisses et n'est pas affublé
des fameux crocs dont tout vampire qui se respecte se doit d'être
doté. Au final, Isteni müszak
est une œuvre sympathique et originale qui souffre peut-être
cependant d'un manque d'inspiration sur la durée...
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