Drôle de titre que celui du quatrième long-métrage de la
réalisatrice et scénariste française Jennifer Devoldère pour un
film qui manque justement de... panache ! L'on n'ira pas jusqu'à
dire que celui-ci est aussi mensonger que la purge signée de Michèle
Laroque en 2018, Brillantissime,
mais Le panache
n'est absolument pas le film attendu. S'inscrivant d'ailleurs dans
une mode consistant à introduire ses personnages dans un milieu
social et professionnel comme beaucoup d'autres avant lui, le film a
nettement plus d'intérêt sur le papier qu'une fois transposé à
l'écran. Première grosse surprise teintée d'une certaine déception
pour quiconque ne connaissait pas jusque là le jeune acteur Joachim
Arseguel. Et ce, parce que le film fut sa première opportunité
d'interpréter un rôle au cinéma, on se demande dans quelles
proportions il fut choisi pour la particularité qui est la sienne.
En effet, alors que l'on pouvait louer le talent de l'interprète de
Colin, jeune bègue vivant désormais seul avec sa mère Giulia (Aure
Atika), l'on apprend que l'acteur lui aussi est atteint du même
trouble de la parole. Ce qui hypothétiquement signifiait de réelles
capacités d'interprétation et d'adaptation de la part de Joachim
Arseguel ne s'avère être rien de plus que l'utilisation d'un
handicap léger au profit d'un récit supposé s'intéresser en
partie à ce même trouble. Ce qui, bien entendu, ne remet absolument
pas en cause le talent du jeune interprète dont le personnage
souffre en outre d'être le fils d'une mère de famille parfois un
peu trop étouffante et d'un père qu'il n'a pas l'occasion de voir
tous les jours (Maxime de Toledo dans le rôle de Stéphane). Colin
intègre un nouveau collège privé où enseigne le professeur
Devarseau. Alors que ce dernier attend sa titularisation, ses
méthodes d'enseignement sont relativement mal perçues de la part de
ses nouveaux collègues. Professeur de français, Devarseau va
pousser l'adolescent de quatorze ans à surmonter ses craintes en
l'inscrivant au cours de théâtre qu'il va dispenser afin de le
soumettre aux autres élèves de sa classe parmi lesquels, la jeune
Adélaïde (Eva-Rose Pacaud) ne laisse pas Colin indifférent. Dans
ce récit qui confronte un adolescent atteint de bégaiement et
amoureux de l'une de ses camarades mais aussi surtout confronté à
une mère qui le surprotège (l'on apprendra d'ailleurs plus tard les
raisons qui poussent Giulia à couver son fils), le scénario de
Cécile Sellam et Jennifer Devoldère dispense une vision parfois
idéaliste de son jeune et principal personnage.
Inscrit
dans une école publique catholique, la réalisatrice évite souvent
les poncifs liés au handicap de Colin. Après une ou deux remarques
déplacées de la part de certains individus, le cadre dans lequel
évolue le jeune garçon mise moins sur la relation hypothétiquement
précaire d'un tel handicap vis à vis de ses camarades que de former
autour du personnage de Colin, tout un système noyant son
incarnation par des sous-entendus liés principalement aux méthodes
employées par le professeur de français. Viennent donc s'inscrire
des personnages secondaires certes intéressants mais dispensables
(Maxence, adolescent homosexuel et ami de Colin interprété par Tom
Meusnier) et des conduites rétrogrades de la part de la hiérarchie
et des collègues de Devarseau. Donnant ainsi une image peu flatteuse
et démagogue de l'enseignement catholique, où par exemple, la prof
de catéchisme Delphine Quentin (l'actrice Claire Dumas) est on ne
peut plus caricaturale ! Adaptation de la pièce de théâtre
Dans la Peau de
Cyrano
de Nicolas Devort, le long-métrage de Jennifer Devoldère peut
compter sur le soutien de José Garcia dont l'usage est ici fait de
manière parfois éthérée. Le principal soucis étant moins de
préciser quelle est la place réelle de Joachim Arseguel au sein du
récit puisqu'il en est le véritable héros que celle des
interprètes qui lui donnent la réplique. Traité avec moins de
gravité que ne le laissait présager le synopsis, Le
panache
et parfois d'une légèreté confondante qui intègre en outre
l'usage de personnages secondaires prévisibles (l'adversaire
amoureux lui aussi de la belle Adélaïde). À dire vrai, l'on a
l'impression que Jennifer Devoldère préfère prendre des pincettes
avec son personnages principal plutôt que de trop l'abîmer !
Le film déroule ainsi son intrigue dans les eaux presque trop calmes
d'un corps enseignant aux valeurs éculées. En mode Pause
café,
série française dans laquelle l'assistante sociale Joëlle Mazart
était contrainte à l'issue des six épisodes de la première saison
de démissionner en raison de ses méthodes pourtant pédagogiques,
José Garcia sacrifiera à son tour sa très attendue titularisation
au profit de valeurs intrinsèquement liées à sa personnalité. Au
final, Le panache
s'avère un peu trop académique pour emporter tous les suffrages. Ce
qui n'empêchera pas le film d'obtenir deux prix du public. Au
Festival du film de Demain
de Vierzon et au trentième
Festival Jean Carmet de
Moulins...
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