C'est sans appréhension
ni aucun enthousiasme particuliers que nous nous sommes rendus au
MEGA CGR de Narbonne afin d'y découvrir le premier long-métrage de
Frank Dubosc. Juste l'envie de retourner dans une salle obscure, à
la séance de onze heures, sans les portables qui brillent dans le
noir et sans avoir à supporter des spectateurs bavards, loin d'être
attentifs au spectacle qui se déroule devant leurs yeux. C'est dans
une ambiance de fin du monde (quatre spectateurs, pas un de plus)
qu'Anna et moi avons jeté notre dévolu sur Tout le Monde
Debout. Première réalisation sur grand écran de
l'humoriste et acteur Franck Dubosc. Et comme le bonhomme n'a
apparemment pas l'intention de faire les choses à moitié, on le
retrouve au générique à l'écriture du scénario et des dialogues.
Autant dire que capitaine du navire, c'est lui. D'autant plus
(pourquoi faire petit lorsque l'on voit grand), l'auteur s'est
également mis en scène aux côtés de la toujours lumineuse
Alexandra Lamy.
Le récit tournant autour
du handicap, on aurait pu supposer trouver ça et là des critiques
acerbes de journaleux soucieux de donner dans la morale à deux
balles et pourtant, chose exceptionnelle, la presse semble unanime. A
part quelques critiques raclant de vieux fonds de tiroirs en
argumentant que le premier long-métrage de Franck Dubosc manque
d'âme, de mordant ou de personnalité.
Tout le contraire de ce
que le spectateur éprouvera finalement au sortir d'une comédie de
presque deux heures qui nous aura paru n'en durer qu'une seule. Et
oui, car malgré un premier quart d'heure épuisant de légèreté
qui nous laissait présager un film fonçant tout droit (et aussi
sûrement que Brillantissime) dans le mur, on en
ressort avec la certitude que Monsieur Dubosc méritait qu'on lui
accorde deux heures de notre temps pour aller voir son bébé. Humour
et tendresse sont les maîtres-mots d'une comédie qui n'abandonne
rien au misérabilisme ambiant. Le handicap (fictif) de Jocelyn allié
à celui (bien réel) de Florence sert de fil conducteur à une
histoire liant deux interprètes (et donc deux personnages) de
manière fort homogène tandis que l'on percevait jusqu'à maintenant
Franck Dubosc comme l'interprète idéal et exclusif du beauf. Et
même si son rôle de mythomane (dans le sens pathologique du terme)
renvoie forcément aux puérils séducteurs qu'il a l'habitude
d'incarner, l'arrivée d'Alexandra Lamy à l'écran change la donne.
Le petit monde satellisant autour du personnage de Jocelyn (la
géniale Elza Zylberstein et le toujours épatant Gérard Darmon en
première ligne) s'en trouve ainsi métamorphoser, et ce qui devait
apparaître comme l'une des ces myriades de comédies inconsistantes
se généralisant de plus en plus au fil des années, se révèle en
réalité posséder d'énormes qualités. Dans la mise en scène pour
commencer, mais surtout dans l'écriture de Franck Dubosc, lequel ne
s'engage pas avec facilité sur la route déjà tracée par d'autres
cinéastes spécialisés dans la comédie.
Tout le Monde
Debout révèle
un auteur bien plus important que celui qui participa à l'écriture
de la trilogie Camping
ou de Disco.
Son premier long ne prétend jamais refaire le monde mais procure un
enchaînement de sensations dont on ne pouvait présager de l'ampleur
au moment d'entrer dans la salle. On rit beaucoup, oui, mais l'on
s'émeut aussi énormément. La sensibilité de l'écriture se
ressent ensuite dans le jeu des interprètes. Entre un Gérard Darmon
en proctologue homosexuel meilleur ami et conseiller du héros
incarné par Franck Dubosc, et une Elza Zylberstein en secrétaire
d'abord à côté de la plaque, mais s'adaptant ensuite à la
situation tout en révélant finalement une vraie personnalité,
l'acteur-réalisateur semble s'être attaché à ce que chaque
personnage bénéficie d'une écriture pointue. D'où l'importante
caractérisation d'individus se révélant donc forcément
attachants.
Le
contexte de la comédie romantique très en vogue, Franck Dubosc
intègre au phénomène sa tuche personnelle. Si certains clichés
relatifs au genre sont par définition inévitables, l'une des forces
de Tout le Monde Debout est
de nous emmener parfois là où on ne l'attend pas forcément. Pour
un premier long-métrage, l'acteur-réalisateur s'offre le culot de
réaliser l'une des meilleures comédies françaises de ce début
d'année 2018. Un prodige. Et surtout, un Franck Dubosc dont il
devient nécessaire de réévaluer le talent. Le plus dur dans cette
histoire est de se dire que désormais, il va falloir attendre
jusqu'au prochain, en espérant qu'il se remettre très vite à
l'écriture, et surtout à la réalisation...
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