En avant propos, je
voudrais rendre un vibrant hommage à tous ces hommes et toutes ces
femmes qui par passion, par vocation, et peut-être pour certains,
pour les ressources financières que cela occasionne, donnent de leur
personne, de la voix, pour doubler dans la langue de Molière, tous
ces longs-métrages venus de l'étranger. Bon, en fait de Molière,
il arrive parfois qu'il s'agisse plutôt du Dany Boon croisé lors de
certains de ses spectacles (nous parlons bien des personnages qu'il
incarne, ok?). On excusera alors la maladresse dont font preuve
certains doubleurs en arguant qu'ils œuvrent bénévolement. Du
moins, serions-nous en droit de l'exiger au vu de certains travaux
qui dans la discipline évoquée ici, n'atteignent pas tous les
espoirs mis en eux. Pour autant, il ne faudra pas chercher à leur en
vouloir, à ces doubleurs du dimanche lobotomisés, sous l'influence
d'opiacés particulièrement efficaces. Car involontairement,ils
façonnent à leur manière certains aspects du genre dont il est
question dans cet article. Ces nanars qui font le bonheur des
amateurs de bis et de séries Z et continuent de désespérer les
intellectuels du septième art qui n'aimeraient se mettre en bouche
que les mets les plus raffinés. Nous pourrions alors affirmer à ces
derniers que rien ne les oblige à contempler le désastre artistique
qui pour une grande partie, fait le charme de ces bandes (ici,
horrifique) qui séduisent les amateurs de bière fraîche.
Malheureusement, certains
signes ne trompent pas et révèlent la descente aux enfers, toujours
artistique, de certains anciens génies ayant
malencontreusement choisi (ou ayant été contraints) une voie de
garage que les fans de la première heure ne leur pardonneront pas
toujours.
Lucio Fulci, ce maître
transalpin incontesté (osez donc le nier!) du gore sérieux,
morbide, crépusculaire, qui nous offrit quelques doux (et malsains)
frissons durant les années soixante-dix et quatre vingt. Quelques
gialli plutôt bien sentis (au hasard, Una
lucertola con la pelle di donna)
suivant une tripotée de comédies sur lesquelles il est parfois
compliqué de mettre la main chez nous, mais surtout, dans le cœur
des adolescents de l'époque que nous étions, pierre angulaire d'une œuvre temporellement vouée à la noirceur la plus crue, une sublime
tétralogie que l'italien n'arrivera jamais à égaler par la suite
(L'Enfer des Zombies,
Frayeurs,
L'Au-Delà
et La Maison Près du
Cimetière).
Des visions cathartiques. Comme si l'immense Lucio avait réveillé
des souvenirs personnels enfouis au plus profond de son âme et dont
la plus symbolique, la plus désespérée, la plus touchante des
visions demeurait cette dantesque peinture au cœur de laquelle
allaient vivre éternellement les personnage de L'Au-delà.
La
tétralogie achevée, le reste de ce qui allait suivre n'aurait plus
jamais la même force. La même saveur. Du serial killer de L’Éventreur de New York
que votre serviteur a toujours trouvé beaucoup trop surestimé
jusqu'à cette tentative désespérée de remonter aux sources du mal
à travers ce Zombi 3
dont le titre lui-même semble vicié. On se laissera pourtant
séduire. Surtout lorsque l'on apprendra la participation d'un autre
génie,
issu d'une catégorie finalement pas si éloignée de celle qui
allait pervertir la suite des travaux de Lucio Fulci, j'ai nommé le
Grand Bruno Matteï. Apparemment, le bonhomme, qui en cette année
1988 enchaîna plusieurs longs-métrages personnels, trouva le temps
et le moyen d'épauler un Lucio Fulci déclinant physiquement.
J'hésite
encore à dire si Zombi 3
s'ouvre sur des augures plutôt rassurants. Lumière criarde digne
des pires exactions de Lamberto Bava. Musique affligeante, mais
ambiance malsaine. Un cadavre revenu à la vie se décomposant de
manière fort peu ragoutante. Et puis, un peu plus tard, un infecté
se coupant le bras dans sa chambre d'hôtel dans des conditions plus
que sordides. Fulci pas mort! Vraiment ? Pas sûr, en fait. Car la
suite démentira toute impression de renaissance. On tombe dans
l'indigent. L'ombre de Bava fils plane plus que jamais sur une
oeuvre qui se déconfit au fil d'une intrigue tellement con que l'on
se demande qui de ce projet tricéphale (il ne faudra pas oublier la
participation du cinéaste Claudio Fragasso en tant que scénariste)
à réellement tenu les rennes. The
Toxic Avenger,
The Crazies
(et même Dawn of the Dead
tant qu'on y est) et surtout The
Return of the Living Dead semblent
avoir servi de source d'inspiration. Du long-métrage de Lloyd
Kaufman et Michael Herz, Fulci et compagnie ont repris la scène
durant laquelle le superhéros de Tromaville se mue en une créature
monstrueuse dans sa salle de bain, des deux films de George A.
Romero, ils ont repris les tenues anti-radiations (The
Crazies)
et l'assaut d'un immeuble (Dawn
of the Dead)
et du petit chef-d'oeuvre de Dan O'Bannon, les trois hommes ont
carrément repris l'idée du cadavre incinéré et dont les
conséquences sur la population sont (pratiquement) les mêmes.
L'une des grandes forces de cet incroyable nanar qui pourtant se
révèle navrant au regard des travaux passés de Lucio Fulci demeure
dans les dialogues incroyablement abscons. À croire qu'il existe une
école formant de futurs auteurs de perles aussi jouissives que celle
qui nous est présentée dans ce cas précis. D'un ridicule hors
norme, le film vaut son pesant d'or (ou de cacahuètes, c'est selon)
en langue française. Outre la pauvreté des dialogues, le doublage
est dans le genre, remarquable. Apparemment, tous s'en foutent
royalement. En même temps, lorsque l'on nous sert du caviar de
Polyodon alors qu'on désire en gouter du vrai, on n'a pas forcément
envie d'en vanter les qualités (pas très clair tout ça, hum ?).
Les acteurs sont mauvais, mais ça, ça n'est plus vraiment une
surprise. Avec une armée constituée de soldats de l'acabit de ceux
présents ici, l'Italie a de quoi se faire du mouron en cas
d'attaque. Les jeunes sont beaux, pas très futés, extravertis, et
gémissent de douleur comme lors d'une séance de “in-out,
in-out” (référence volée à l'Orange Mécanique
de Stanley Kubrick). L'image est bien dégueu, ce qui ne sous-entend
pas forcément que l'on parle ici des effets gore éparpillés durant
le film. Des effets bien crades pourtant, et qui relativisent quelque
peu la torture que peut revêtir la vision de ce nanar qui sent le
rance... A voir comme une bonne blague...
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