Après Antichrist,
Lars Von Trier aborde une fois encore la destruction de la cellule
familiale. Déjà, dès l'ouverture en forme de prologue, le cinéaste
danois utilise les même ficelles esthétiques que deux ans en
arrière. Quant à ces quelques secondes très curieuses montrant
Charlotte Gainsbourg portant dans ses bras un enfant
approximativement du même âge que celui qu'elle perd durant le
prologue de Antichrist, cette scène n'est-elle pas le
lien qui unit celui-ci à Melancholia qui d'une manière
encore plus démonstrative et définitive choisit de mettre en
pièces, non plus un homme et une femme, mais l'humanité toute
entière ?
Sur un rythme analogue à
son œuvre précédente, Lars Von Trier explore encore davantage
l'âme humaine, comme si Thomas Vinterberg et son épatant Festen
croisaient la route d'une œuvre consacrant la fin de notre monde
comme seule issue possible.
Sa galerie de portraits
demeure toujours aussi saisissante. Entre une Charlotte Rampling
glaciale, peu disposée à faire la joie de sa fille fraîchement
mariée. Une jeune épouse angoissée, la superbe Kirsten Dunst (prix
d'interprétation au festival de Cannes en2011 pour le rôle de
Justine), doutant à chaque instant. Claire, la sœur,
l'organisatrice des festivités, la chef d'orchestre d'un bal qui à
ses yeux ne doit souffrir d'aucune aspérité. John, l'époux de
celle-ci (Kiefer Sutherland), un être compréhensif, riche à
millions, qui cache la vérité sur le monstre qui lentement mais
sûrement s'apprête à avaler notre planète toute entière.
Le jeune marié (Alexander Skarsgard), gentil mais aussi parfois
puéril, tellement amoureux qu'il accepte un peu trop facilement les
caprices de sa promise.
Et puis il y a le père
de Justine (John Hurt). D'une admirable bonté, d'une gentillesse
profonde, mais aussi d'une folie douce qui sied bien à ces
festivités qui doucement glissent vers le drame. A côtés de lui,
Udo Kier et Stellan Skarsgard apparaissent presque normaux. Même si
le premier se voile littéralement la face chaque fois qu'il croise
le chemin de Justine (ce qui nous quelques micro-scènes franchement
tordantes), et que le second se permet d'être d'une immoralité qui
confine à la cruauté.
Peu ou pas de musique à
part le prélude de Tristan et Iseult de Richard Wagner qui parcourt
l'intégralité d'une œuvre qui confond scènes réalistes tournées
caméra à l'épaule, et visions dantesque d'une catastrophe en
devenir. Visuellement, Melancholia, n'a, comme très
souvent avec Lars Von Trier, rien à se reprocher. C'est un sans
faute esthétique.
On pourrait croire que
j'ai aimé Melancholia. Que je l'ai adoré au delà des
mots. Et pourtant, il s'est révélé être une immense déception.
Bêtement, je croyais y retrouver la même émotion que celle subie
lors du visionnage de son fantastique Breaking The Waves.
En réalité, le film m'a laissé aussi froid et perplexe que devant
son Dancer in the Dark vanté comme de l'émotion à
l'état pur mais qui ne m'a bouleversé que par son profond ennui.
Il y a parfois des choix
qui ne s'expliquent pas. Comment peut-on effectivement juger que
Melancholia est parfois assommant lorsque l'on estime
que dans la carrière de son auteur, des œuvres telles que Element
of Crime et Epidemic demeurent parmi ses plus
flamboyantes réussites ? Je ne sais pas. Peut-être le film
aurait-il mérité d'être nettoyé de quelques dizaines de
minutes ? Toujours est-il que Lars Von Trier conserve le don de
nous conter des histoires d'une manière fort peu coutumière. Et
c'est ce qui fait la force de son œuvre toute entière...
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