Le titre sonne comme
celui d'une œuvre de science-fiction et pourtant, Jennifer 8
est
bien un thriller. De cette veine qui fit les beaux jours des serial
killer, enfermé entre deux des plus grands classiques du genre. D'un
côté, Le Silence des Agneaux
de Jonathan Demme sorti en 1991, et de l'autre, Seven
de David Fincher qui lui se présenta sur les écrans de cinéma
quelques années plus tard en 1995. Si d'un point de vue
chronologique Jennifer 8
est plus proche du premier, il a en terme d'ambiance, davantage
d’accointances avec le second. Le réalisateur britannique Bruce
Robinson avait-il la prétention de rivaliser en 1992 avec ce qui
demeure comme l'un des grands classiques du thriller horrifique ?
En tout cas, on ne pourra pas lui reprocher d'avoir pillé l’œuvre
de David Fincher puisque la sienne allait sortir sur les écrans
trois ans auparavant. En terme de concordances, Jennifer
8 n'entretient
en réalité pas grand chose d'autre avec les deux œuvres citées
comme exemple. On pourra même vanter le mérite du scénario de
Bruce Robinson qui n'a rien à envier à ceux de Ted Tally (inspiré
par le célèbre ouvrage de Thomas Harris) et de Andrew Kevin
Walker...
Si
d'aucun pourra d'avance critiquer le fait que l'intrigue mêle la
romance au thriller avec pour conséquence éventuelle de nuire au
récit, le spectateur sera très rapidement rassuré. D'abord, il
faut savoir que le casting est exemplaire. Qu'il s'agisse du couple
vedette formé par Andy Garcia et Uma Thurman ou de la plupart des
seconds rôles parmi lesquels on retrouve notamment Lance Henriksen,
Kathy Baker, Graham Beckel et peut-être encore davantage bien que
tardivement, John Malkovich, impossible de faire l'impasse sur
l'interprétation de chacun. Bruce Robinson accorde aux uns et aux
autres une importance en terme de caractérisation assez
considérable, ce qui peut expliquer la durée du film qui aligne
tout de même les cent-vingt quatre minutes. On verra d'ailleurs plus
loin que le film aurait sans doute mérité une rallonge d'une bonne
dizaine de minutes. Au cœur du récit, le Sergent John Berlin auquel
le scénario offre un passé quelque peu troublé, une Helena
Robertson timide, méfiante et aveugle dans le sens littéral du
terme et des seconds rôles tout aussi bien campés. Andy Garcia et
Uma Thurman incarnent donc ce couple, qui d'un côté veille à la
sécurité de la seconde, ''témoin'' de l’enlèvement par un tueur
en série d'une amie avec laquelle elle partageait une chambre dans
un institut pour aveugles...
L'effet
relativement ''facile'' du type au physique tellement inquiétant
qu'on le soupçonne d'entrée de jeu pour mieux être dirigé dans la
mauvaise direction (Eddie Korbich, dans le rôle de Myopic Janitor,
possède un visage réellement extraordinaire) n'est en soit pas
gênant puisque le spectateur devine assez rapidement que la vérité
est ailleurs. L'absolue puissance de Jennifer 8
demeure dans la multitude de propositions qui font que l'on ne s'y
ennuie jamais. Qu'il s'agisse de la relation tumultueuse
qu'entretient John Berlin avec certains de ses collègues de travail,
de celle, émouvante et charnelle, qu'il partage avec Helena (Uma
Thurman y est troublante de timidité et de sensualité), de l'amitié
qui lie ce couple à celui que forment Lance Henriksen et Kathy Baker
(Freddy et Margie Ross dans le film), de l'interrogatoire qu'il subit
face à un Agent St. Anne incarné par un John Malkovich
époustouflant ou encore de quelques séquences dont une visite
nocturne de l'institut pour aveugle absolument démente (mon dieu,
ces ombres et ces lumières), Jennifer 8
aurait pu, et sans doute même dû devenir un chef-d’œuvre si
seulement,la fin n'apparaissait pas tant si vite expédiée. D'où
ces dix minutes supplémentaires que j'évoquais un peu plus haut. Si
l'approche est maline, voire ingénieuse, une drôle d'ellipse vient
clore un peu trop abruptement le récit de cette lugubre traque
souvent nocturne. N'empêche, l'expérience vaut le détour. Le duo
principal y est magnifique dès lors qu'il se retrouve. On est
séduit, parfois effrayés, voire troublés comme lors de cette
séquence durant laquelle Helena se perd dans la foule des invités
d'une soirée avant d'être retrouvée quelque peu prostrée par un
John forcément émouvant dans sa nouvelle quête de bonheur.
Brillant !!!
Pas exceptionnel mais la belle époque. Je me demande si j'étais jeune aujourd'hui (je veux dire 20-30 ans) si je m'intéresserais au ciné actuel, en connaissant ou pas celui "d'antan".
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