S'ouvrant et se terminant
sur deux des plus héroïques et spectaculaires scènes de guerre de
toute l'histoire du septième art, Il faut Sauver le Soldat
Ryan
dresse le portrait plein d'humanité d'une section de soldats
commandés par le Capitaine John H. Miller et dont la mission est de
retrouver et de ramener chez lui le soldat de 2ème classe James
Francis Ryan dont les trois frères sont tombés au combat. Deux
séquences absolument brillantes et dévastatrices d'un point de vue
visuel, sonore et émotionnel. Rares auront été les occasions
d'être plongé à ce point au cœur d'un conflit avec un tel degré
de réalisme. Qu'il s'agisse du sable soulevé dans les airs à
l'impact des obus tirés par l'armée allemande lors du débarquement,
des innombrables soldats perdant au mieux un membre, au pire la vie,
l'eau rougeoyante de la Manche dans laquelle le sang des courageux
militaires américains se déverse ou les quelques villes traversées
et ravagées par d'incessants bombardements, le travail effectué par
les différentes divisions techniques est simplement remarquable.
Qu'il s'agisse également de la partition musicale de John Williams,
des effets-spéciaux de John Evans, de la photographie de Janusz
Kaminski ou du sound-design, le spectateur en prend plein la vue.
Maintenant, il s'agit de savoir si l'intérêt d'Il
faut Sauver le Soldat Ryan
repose uniquement sur son aspect visuel, sonore et divertissant ou si
son principal intérêt se situe au niveau de son scénario reposant
sur un fait authentique auquel le réalisateur Steven Spielberg tente
de rendre hommage.
D'un
point de vue historique, le film semble fidèle aux faits ayant eu
lieu. Si le nom de Ryan a été préféré à ceux des frères
Niland, les quelques erreurs qui émaillent le récit semblent
appartenir au registre ''technique''. Des invraisemblances mineures
que le spectateur ''lambda'' ne relèvera heureusement pas pour se
consacrer sur l'essentiel : le spectacle ! Car oui, Il
faut Sauver le Soldat Ryan,
avant d'être un témoignage troublant, voire parfois choquant (la
séquence du débarquement dépassant allégrement la vingtaine de
minutes est un véritable carnage peu avare en morts) est avant tout un divertissement
absolument réjouissant. Bien que durant presque trois heures à une
poignée de minutes près, l’œuvre de Steven Spielberg est non
seulement un voyage au cœur de l'horreur de la guerre, mais
également un formidable message d'humanité et de fraternité. On
imagine aisément un Rolland Emmerich qui aux commandes du projet en
aurait fait un film de propagande pro-américain. Steven Spielberg
nous épargne fort heureusement ce type de message pour nous plonger
dans une aventure pleine de scènes d'anthologie. Outre les deux
séquences d'ouverture et de fermeture (en dehors de celles situées
et tournées dans le cimetière américain de Colleville-sur-Mer),
cette dernière situant son action aux abords des ponts de la rivière
du Merderet, le spectateur a notamment droit à une séquence
opposant le capitaine John H. Miller et ses hommes à un sniper (une
scène qui évoque sensiblement celle de l'excellent Full
Metal Jacket
de Stanley Kubrick), ou la prise d'une antenne-radio.
Entre
ces différentes séquences d'anthologie, Steven Spielberg ne se
repose pas sur ses brillants lauriers et profite des quelques moments
de calme pour nous présenter un peu plus en profondeur ses
personnages. L'un des points forts de Il faut
Sauver le Soldat Ryan
reste l'impeccable casting constitué autour de Tom Hanks, Tom Sizemore, Edward
Burns, Barry pepper, Adam Goldberg, Vin Diesel (oui, oui), Giovanni
Ribisi et Jeremy davies, tous bientôt rejoints par Matt Damon (le soldat Ryan en question), mais
aussi ses personnages. Du sniper priant auprès du Seigneur avant
chaque tir, en passant par le médecin soignant comme il peut les
soldats blessés lors des différents combats, jusqu'au capitaine ici
tenu par un Tom Hanks magnifique d'émotion. Une émotion que
partagent d'ailleurs ces soldats loin des productions qui n'en font
généralement que des gros bras bas du front et incapables de
s'émouvoir de la mort de l'un de leurs compagnons. Ici tout est fait
pour que l'expérience soit immersive. Caméras à l'épaule,
champ-contrechamp, première et troisième personne, image tremblant
à chaque explosion, poussière, gravas, gerbes de sang, hurlements,
balles sifflant près des oreilles du spectateur. Dire que la
sensation d'y être soit-même est un euphémisme. De ce côté là,
c'est presque un sans faute. Presque ? Oui, car à côté de
l'ampleur du travail effectué par Steven Spielberg, son équipe
technique et ses interprètes, il manque peut-être quelques longs
plans-séquence qui auraient sans doute accentué encore davantage
l'impression d'immersion. À part ce menu détail qui, si le film
avait été réalisé ces dernières années et non pas il y a vingt
et un ans, deviendrait alors impardonnable, Il
faut Sauver le Soldat Ryan
touche au but. Une œuvre remarquable, l'un des meilleurs films de
guerre ''contemporains'' à ranger aux côtés de Requiem pour un
Massacre
d'Elem Klimov.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire