Après le précédent
article consacré à l'excellent polar français de Gela Babluani,
Money, le suivant est consacré au dernier long-métrage
de l'acteur et réalisateur Olivier Marchal qui jusqu'à maintenant
avait réalisé quatre films d'excellente facture dont le très
sombre et pessimiste MR 73 avec Daniel Auteuil en 2008
et Les Lyonnais en 2011. Cette fois-ci, aux commandes
d'un scénario écrit à quatre mains en compagnie d'Emmanuel
Naccache, le cinéaste s'inspire d'une idée d'Ali Hajdi, elle-même
inspirée d'un fait-divers ayant eu lieu entre septembre 2008 et juin
2009, lequel pris pour cadre la signature du protocole de Kyoto à
l'issu duquel, l'Union Européenne s'engagea à réduire les
émissions de gaz à effet de serre. Un groupe d'escrocs profita
alors de cette législation pour monter un réseau d'arnaques de
grande ampleur. Longtemps après la French Connexion naissait
la Carbone Connexion.
Sobrement intitulé
Carbone, le dernier né d'Olivier Marchal est un
thriller redoutablement efficace, qui ne fait ni dans la dentelle, ni
dans l’œuvre familiale. Ici, tout y transpire la noirceur.
L'intrigue tourne tout d'abord autour du personnage incarné par
l'excellent Benoît Magimel, déjà présent dans le précédent film
chroniqué en ces pages. Antoine Roca, ce PDG d'une entreprise au
bord de la faillite, contraint de déposer le bilan. Marié à Dana
et beau-fils d'Aron Goldstein, riche et impitoyable homme d'affaire
qui le méprise, Antoine doit se refaire s'il veut pouvoir sauver la
trentaine d'employés que la fermeture de son usine va mettre sur le
carreau. C'est ainsi que son ami et avocat Laurent Melki le met sur
une piste qui pourrait lui permettre de se faire beaucoup d'argent :
tenter une fraude à la TVA sur les quotas de carbone de grande
ampleur. Pour cela, il fait appel à ses deux meilleurs amis, les
frères Eric et Simon, les fils de Dolly Wizman, il est aiguillé
vers Kamel Dafri, un très dangereux trafiquant de drogue qui accepte
de lui prêter cinq millions d'euros, en contrepartie desquels,
Antoine et les deux frères devront lui reverser le double dès
qu'ils auront réussi leur coût. Mais en choisissant de faire appel
à « l'arabe », ils vont plonger tous les trois
dans un tourbillon de mort qui fera également des dégâts
collatéraux.
Une véritable gifle.
Voilà ce qui ressort du dernier long-métrage d'Olivier Marchal. Pas
aussi noir que MR 73 mais
sans conteste, aussi désespéré, Carbone ne
souffre que d'un seul gros défaut qui, fort heureusement, se fera
assez vite oublier dès lors que la Broyeuse sera entrée en action.
Ce problème qui aurait pu faire chavirer le navire, c'est
justement ce coup inspiré de la
Carbone Connexion.
Les personnages mettent en effet en place tout un réseau bien huilé
consistant à profiter de la législation citée plus haut afin de
détourner des fonds très importants. Le problème, c'est qu'Olivier
Marchal y va un peu trop rapidement, rendant du coup cette phase du
récit peu crédible. Un peu trop facile en réalité. Mais dès que
la réussite des trois amis intéresse le très gourmand Kamel Dafri
(impressionnant Moussa Maaskri), tout est oublié et l'on assiste
impuissant à la chute d'Antoine, d'Eric, de Simon et de leurs
familles respectives. Gérard Depardieu incarne le monstrueux Aron
Goldstein et prouve une fois encore qu'il est non seulement capable
d'interpréter des types vraiment affreux, mais qu'il a encore
beaucoup de choses à offrir au public.
Le
casting est en la matière, tout à fait remarquable. Grâce à la
mise en scène concise d'Olivier Marchal et au montage de Julien
Perrin et Raphaele Urtin, Laura Smet, Idir Chender, Gringe, la
chanteuse Dani et même Michael Youn (qui décidément prouve de plus
en plus sa valeur d'interprète) incarnent des personnages déchirés
et passionnants. Une fois encore, le paysage cinématographique
français peut s’enorgueillir d'avoir en sa possession un véritable
joyau du thriller français. Benoït Magimel y est aussi sombre que
lumineux. A voir sans modération...
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