Alors là, attention.
Voici l'un de ces monuments du cinéma hexagonal qu'aucun amateur de
nanars n'a le droit, ni d'ignorer l'existence, ni même d'être passé
à côté. Comme l'indique si bien l'affiche, Drôles de zèbres
fut le tout premier long-métrage a être réalisé par le célèbre
animateur et créateur d'émissions de divertissement télévisées,
Guy Lux. Vu que l'humoriste et actrice Michèle Laroque a récemment
(et pour le moment) infligé au public trois longs-métrages de sa
création, il n'y a pas de raison pour que celui qui fut notamment à
l'origine de l'émission Intervilles
n'ait en son temps pas eu le droit de se lancer dans une carrière de
cinéaste! Aussi brève fut-elle puisque comme ne le mentionne par
contre pas du tout l'affiche, s'il s'agissait bien là de son premier
film, rien n'indique qu'il allait également s'agir de son dernier.
Notons que dans la longue liste des interprètes secondaires parmi
lesquels nous allions retrouver les acteurs Mario David, André
Pousse, Katia Tchenko, les humoristes Coluche et Michel Leeb,
l'animateur Léon Zitrone (fidèle ami de Guy Lux), deux manquent à
l'appel. Et oui, alors qu'Eddy Mitchell et Johnny Hallyday furent
conviés à participer à l'aventure Drôles de
zèbres,
l'un et l'autre refusèrent. Une décision qui reste encore
incompréhensible (inutile de préciser que j'ironise). Mais
HEUREUSEMENT pour
lui, Guy Lux a pu compter sur la généreuse participation de Claude
François qui passait par là (véridique) ainsi que celle de Patrick
Topaloff dont les plus érudits connaissent déjà le sort tragique
que lui a accordé le destin ! Mais les véritables vedettes de
ce classique de la comédie pour public décérébré demeurent bien
entendu l'actrice Alice Sapritch et les ''acteurs'' Patrick Préjean,
Jean-Paul Tribout et Sim ! Pour celles et ceux qui ne
connaissent ni l'une ni les autres, le doux frisson de l'incrédulité
ne risque pas de glacer leur échine. Tandis que les autres sont
d'emblée prévenus que le spectacle sera à la hauteur de l'affiche,
de son auteur, du scénario et de son trio d'interprètes
principaux : Bref, pathétique !
Au
scénario, Guy Lux lui-même. Histoire de compléter le tableau et de
ne surtout pas voir en un autre personnage que lui, le responsable du
désastre artistique auquel nous nous apprêtons à assister. Pour
commencer, la bande originale... Composée par Jean-Pierre Doering,
elle demeure d'entrée de jeu dans le contexte et ne contraste pas
vraiment dans la carrière d'un compositeur qui pour le cinéma fut
notamment chargé d'écrire les partitions musicales de Comment
se faire réformer,
Ces flics étranges venus d'ailleurs
ou Rodriguez au pays des merguez respectivement
réalisés par Philippe Clair, Philippe Clair et Philippe Clair. ZE
King of the FranchouillarDZe Comedy ! Et pourtant, parmi une
filmo/discographie presque exemplaire dans sa constance, Jean-Pierre
Doering composera celle de Les égouts du paradis
de José Giovanni... Mon dieu, quelle écart de conduite. Quelle
faute de goût ! Plus sérieusement, Drôles
de zèbres
met en scène deux parieurs/chômeurs ayant perdu tout leur argent
aux courses. Un univers que connaît bien Guy Lux puisque durant sa
carrière nous le découvrirons en pronostiqueur hippique (tout comme
son ami Léon Zitrone, lequel ouvre d'ailleurs ici les hostilités en
voix off) pour divers journaux télévisés français. Vous sentez
déjà cette odeur de Z qui se dégage des images et de la bande
musicale ? Pas encore ? Attendez quelque minutes. Deux tout
au plus, et ce court moment d'extase que ne pourront comprendre que
les fans absolus de séries Z. Trois flics affublés d'une échelle
dansant en rythme sur une musique ''pompier''. Rien que l'idée de sa
conception donne une idée assez précise de l'ambiance et des
motivations de Guy Lux. Sur un plan strictement chauviniste, le
réalisateur et scénariste n'est ici très clairement pas venu
prendre les places de Michel Audiard ou de Bertand Blier...
Embauchés
par un industriel du nom de Napoléon Simfrid (Sim), époux de Gilda
Simfrid (Alice Sapritch), Pierre et Jean prennent l'identité de deux
espions auxquels est confiée la tâche de foutre un bordel monstre
dans un hôtel que leur employeur aimerait racheter à bas prix. Ce
que Simfrid ne sait pas encore, c'est que le directeur du dit hôtel,
un certain Jardine (Jacques Legras), a inventé une formule chimique
permettant d'augmenter les performances des chevaux et ainsi de les
faire gagner lors des courses hippiques. De la comédie pas
franchement amusante qu'aurait dû se contenter d'être Drôles
de zèbres,
le film se mue en une expérience de cinéma absolument indigeste et
proche du calvaire. Des idées par dizaines, voire par centaines se
bousculent au portillon de l'imaginaire d'un Guy Lux qui ne sait pas
comment gérer un tel flux. Les personnages prennent le relais les
uns après les autres lors d'un récit sans cohésion, souvent
incompréhensible, voire même indescriptible. Bref, du grand
n'importe quoi convoquant une Katia Tchenko en cliente d'hôtel
nymphomane, un Coluche en chef de cuisine, un Claude François et des
Claudettes dans leur propre rôle, Pierre Olaf en émir du Chokoweit,
Michel Leeb en laveur de carreaux ou Annie Cordy dans la peau de la
Baronne Jacinthe de la Tronchembiais, personnage créé dans les
années soixante par Sim, que ce dernier interprète également à
l'écran. Un lion, une antilope, un zèbre et même un chien doté de
la parole... Drôles de zèbres,
c'est en moyenne cinq à dix idées par minutes, jetée en pâture
sans le moindre soucis de cohésion ou de réalisme. Le film donne le
sentiment d'avoir surtout permis à Guy Lux d'y faire interpréter
tout ce que le cinéma français de l'époque comptait d'indigence.
La seule chose véritablement amusante n'est visible à l'écran
qu'en supposant la réaction que purent avoir chacun et chacune au
moment d'interpréter ce qui leur venait de droit. Ouais, vraiment un
monument. En un film, Guy Lux semble avoir digéré tout le cinéma
de Philippe Clair. Un film à réserver aux fans purs et durs de
nanars, voire même de séries ultra Z. Une expérience à ne pas
mettre devant tous les yeux sous peine de faire un AVC !
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