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samedi 23 avril 2022

X de Ti West et Pleasure de Ninja Thyberg

 


 

Mon état d'esprit aurait-il pris un virage porno ? Je me pose cette question parce que de la poignée de longs-métrages que je me suis efforcé de regarder ces derniers jours malgré un important besoin de dormir, deux semblent avoir très clairement dépassé la frontière entre ce qu'il est moral de montrer à l'écran et ce qui mérite d'être encore protégé du regard de la plupart d'entre nous. Au programme, donc, X de Ti West, dont le titre ne cache rien de ses intentions. Alors même que Pleasure de Ninja Thyberg convoque moins dans le fond et la forme ce que souligne le titre qu'une réelle envie de la part de son héroïne de devenir une star du porno. Et lorsque l'on évoque le genre, on serait d'abord tenté de souligner que le plaisir est d'abord celui qu'éprouvera le spectateur, les interprètes de tel ou tel acte sexuel plus ou moins hardcore semblant faire acte d'abattage comme dans n'importe quel abattoir ! Bien que ces deux titres paraissent avoir comme point commun l'industrie du sexe, leur approche n'a pas d'autre point d'attache que l'acte lui-même puisque l'américain choisit un contexte que l'on rapprochera immédiatement d'un certain Texas Chainsaw Massacre (certains plans se révélant de flagrants hommages à l’œuvre de Tobe Hooper) tandis que la réalisatrice suédoise plongera son héroïne Bella (l'actrice Sofia Kappel) directement au cœur de l'industrie du sexe. Une industrie qui, nous l'apprenons, semble prendre fait et cause pour ses actrices puisque l'on y apprend notamment qu'un contrat les lie désormais aux producteurs et aux réalisateurs. De quoi les protéger même si nous aurons l'occasion de le découvrir, ces jeunes beautés demeurent ni plus ni moins que de la viande fraîche souvent méprisées une fois l'acte consommé. Ti West constitue un casting fait de jeunes adultes qu'il plonge à la toute fin des années soixante-dix. On y consomme donc logiquement de l'herbe et l'on s'y pavane sans la moindre gène à poils sous des salopettes. Si chez Ninja Thyberg, Bella apparaît nettement moins délurée à l'écran que le sera Bobby-Lynne (l'actrice Britanny Snow) chez Ti West, l'objectif pour ces deux jeunes femmes est pourtant le même. Devenir un star du X. Mais alors que la suédoise s'intéresse davantage à montrer comment se développe la carrière de son héroïne, Ti West semble davantage préoccupé par le conflit d'intérêt qui bientôt va opposer nos six jeunes adultes à un couple de rednecks relativement glauques dont l'épouse, une vieille femme terriblement fanée, ne semble pas avoir perdu de ses appétits sexuels...


Un sujet glauque s'opposant à un second tout aussi dérangeant, X et Pleasure s'avèrent pourtant en fâcheuse posture. Le premier est d'un ennui sidéral constitué de deux premiers tiers bavards et où la sexualité est indigne de la promesse faite par le titre tandis que le second transgresse finalement assez peu les limites entre l'érotisme cinématographique de tous les jours à la pornographie mise à disposition sur le net. Non pas que l'on s'attende à être sidéré par des plans si crus que l'on détournera le regard, mais tout de même, l'un et l'autre sentent parfois le réchauffé. X n'est qu'un vulgaire ersatz de survival concentrant toutes ses horreurs lors du dernier tiers. Des séquences qui malheureusement, ne secouent l'âme que dans de minuscules proportions (le meurtre du plus ''innocent'' des six protagonistes par une vieille nymphomane en mode hystérique) et laissent un sentiment d'inachevé. Scénarisé par Ti West lui-même, X fait preuve d'une flemme se caractérisant par une surexposition plutôt timide de chairs fraîches pas vraiment revigorantes. Vu l'état d'esprit et de développement des personnages, on aura bien du mal à prendre fait et cause pour la mort des uns et des autres. Pleasure souffre des mêmes maux que le long-métrage de Ti West. La réalisatrice suédoise semble vouloir repousser quelques limites histoire de bien marquer les esprits (vulves rasées et pénis en érection, tous filmés en gros plans), tout ceci paraît bien futile puisque le reste n'est que simulation. De plus, Ninja Thyberg n'est pas la première à tenter l'expérience du film de Q grand public puisque le franco-argentin Gaspar Noé aura notamment goûté de la chose en 2015 avec son très ennuyeux Love. Quant à l'industrie du cinéma en général portant un regard noir sur les ambitions d'une starlette en devenir, là encore, la suédoise est loin d'innover ! Tout au plus apprécierons-nous la performance de l'actrice Sofia Kappel qui pour son premier film, en forme d'exorcisme (la jeune femme est en effet atteinte de dysmorphophobie), ose s'aventurer sur un terrain particulièrement dangereux. Au final ni X ni Pleasure ne parviennent à convaincre vraiment. Mais à choisir entre l'un et l'autre, sans doute la proposition de la réalisatrice suédoise est-elle la plus ambitieuse...

 

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