Mon état d'esprit
aurait-il pris un virage porno ? Je me pose cette question parce
que de la poignée de longs-métrages que je me suis efforcé de
regarder ces derniers jours malgré un important besoin de dormir,
deux semblent avoir très clairement dépassé la frontière entre ce
qu'il est moral de montrer à l'écran et ce qui mérite d'être
encore protégé du regard de la plupart d'entre nous. Au programme,
donc, X
de Ti West, dont le titre ne cache rien de ses intentions. Alors même
que Pleasure
de Ninja Thyberg convoque moins dans le fond et la forme ce que
souligne le titre qu'une réelle envie de la part de son héroïne de
devenir une star du porno. Et lorsque l'on évoque le genre, on
serait d'abord tenté de souligner que le plaisir est d'abord celui
qu'éprouvera le spectateur, les interprètes de tel ou tel acte
sexuel plus ou moins hardcore semblant faire acte d'abattage comme
dans n'importe quel abattoir ! Bien que ces deux titres
paraissent avoir comme point commun l'industrie du sexe, leur
approche n'a pas d'autre point d'attache que l'acte lui-même puisque
l'américain choisit un contexte que l'on rapprochera immédiatement
d'un certain Texas Chainsaw Massacre
(certains plans se révélant de flagrants hommages à l’œuvre de
Tobe Hooper) tandis que la réalisatrice suédoise plongera son
héroïne Bella (l'actrice Sofia Kappel) directement au cœur de
l'industrie du sexe. Une industrie qui, nous l'apprenons, semble
prendre fait et cause pour ses actrices puisque l'on y apprend
notamment qu'un contrat les lie désormais aux producteurs et aux
réalisateurs. De quoi les protéger même si nous aurons l'occasion
de le découvrir, ces jeunes beautés demeurent ni plus ni moins que
de la viande fraîche souvent méprisées une fois l'acte consommé.
Ti West constitue un casting fait de jeunes adultes qu'il plonge à
la toute fin des années soixante-dix. On y consomme donc logiquement
de l'herbe et l'on s'y pavane sans la moindre gène à poils sous des
salopettes. Si chez Ninja Thyberg, Bella apparaît nettement moins
délurée à l'écran que le sera Bobby-Lynne (l'actrice Britanny
Snow) chez Ti West, l'objectif pour ces deux jeunes femmes est
pourtant le même. Devenir un star du X. Mais alors que la suédoise
s'intéresse davantage à montrer comment se développe la carrière
de son héroïne, Ti West semble davantage préoccupé par le conflit
d'intérêt qui bientôt va opposer nos six jeunes adultes à un
couple de rednecks relativement glauques dont l'épouse, une vieille
femme terriblement fanée, ne semble pas avoir perdu de ses appétits
sexuels...
Un
sujet glauque s'opposant à un second tout aussi dérangeant, X
et Pleasure
s'avèrent pourtant en fâcheuse posture. Le premier est d'un ennui
sidéral constitué de deux premiers tiers bavards et où la
sexualité est indigne de la promesse faite par le titre tandis que
le second transgresse finalement assez peu les limites entre
l'érotisme cinématographique de tous les jours à la pornographie
mise à disposition sur le net. Non pas que l'on s'attende à être
sidéré par des plans si crus que l'on détournera le regard, mais
tout de même, l'un et l'autre sentent parfois le réchauffé. X
n'est qu'un vulgaire ersatz de survival
concentrant toutes ses horreurs lors du dernier tiers. Des séquences
qui malheureusement, ne secouent l'âme que dans de minuscules
proportions (le meurtre du plus ''innocent'' des six protagonistes
par une vieille nymphomane en mode hystérique) et laissent un
sentiment d'inachevé. Scénarisé par Ti West lui-même, X
fait preuve d'une flemme se caractérisant par une surexposition
plutôt timide de chairs fraîches pas vraiment revigorantes. Vu
l'état d'esprit et de développement des personnages, on aura bien
du mal à prendre fait et cause pour la mort des uns et des autres.
Pleasure
souffre des mêmes maux que le long-métrage de Ti West. La
réalisatrice suédoise semble vouloir repousser quelques limites
histoire de bien marquer les esprits (vulves rasées et pénis en
érection, tous filmés en gros plans), tout ceci paraît bien futile
puisque le reste n'est que simulation. De plus, Ninja Thyberg n'est
pas la première à tenter l'expérience du film de Q grand public
puisque le franco-argentin Gaspar Noé aura notamment goûté de la
chose en 2015 avec son très ennuyeux Love.
Quant à l'industrie du cinéma en général portant un regard noir
sur les ambitions d'une starlette en devenir, là encore, la suédoise
est loin d'innover ! Tout au plus apprécierons-nous la
performance de l'actrice Sofia Kappel qui pour son premier film, en
forme d'exorcisme (la jeune femme est en effet atteinte de
dysmorphophobie), ose s'aventurer sur un terrain particulièrement
dangereux. Au final ni X ni
Pleasure
ne parviennent à convaincre vraiment. Mais à choisir entre l'un et
l'autre, sans doute la proposition de la réalisatrice suédoise
est-elle la plus ambitieuse...
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