Connu pour être l'un des
romans de science-fiction les plus célèbres mais sans doute
également parmi les plus ardus à lire et à adapter sur grand
écran, Dune est
à l'origine un roman de l'écrivain américain Frank Herbert. À
vrai dire, l’œuvre ne se contente pas d'être un ouvrage unique
mais un véritable cycle en six volumes poursuivit ensuite à partir
de 1999 par le propre fils de l'écrivain ainsi que par Kevin J.
Anderson. Au début des années soixante-dix, le réalisateur chilien
Alejandro Jodorowsky, le réalisateur des films cultes El
Top,
La montagne sacrée
ou Santa Sangre
envisage d'adapter le roman de Frank Herbert. Un projet si ambitieux
qu'il ne parviendra pas à le mener à terme. En résultat quarante
ans plus tard, un passionnant documentaire intitulé Jodorowsky's
Dune.
En 1984 sort sur les écrans la première véritable adaptation du
roman. Réalisé par l'immense David Lynch, le film se prend une
volée de châtaignes de la part du public et des critiques. Un film
de commande dans lequel on retrouve quelques gimmicks de l'auteur de
Eraserhead,
de Lost Highway
ou de Inland Empire
mais qui s'éloigne tout de même en grande partie de son style si
personnel. Depuis, une partie du public semble ressentir un certain
regain d'intérêt pour ce film dont certaines versions occultent
volontairement le nom de son réalisateur au ''profit'' de Alan
Smithee, pseudonyme bien connu utilisé par les réalisateurs qui ne
désirent plus voir leur nom s'afficher au générique d'un projet
qu'ils ont mis eux-même en scène. Depuis qu'est sortie en salle la
version de Denis Villeneuve il y a quelques semaines, on n'a jamais
autant évoqué la version de David Lynch. Si certains évoquent les
prouesses de la version 2021, d'autres en revanche assurent que celle
de 1984 lui est bien supérieure...
N'ayant
pas lu le roman ni ses prolongements et n'ayant conservé qu'un très
vague souvenir du long-métrage de David Lynch, c'est l'esprit vierge
de toute référence (ou presque) et donc avec toute l'objectivité
qui je l'espère me caractérise que j'ai décidé d'évoquer le Dune
de Denis Villeneuve. Soit dit en passant, du réalisateur canadien,
j'ai pu me forger une solide idée sur son travail puisque je n'ai
jamais été déçu par aucun de ses longs-métrages que j'ai vu
jusque là. Il y a a quatre ans, je doutais de son Blade
Runner 2049
pour au final sortir de la salle totalement conquis. Au point même
d'avoir eu envie de redécouvrir l'original de Ridley Scott, film
pour lequel je n'avais jusque là conservé que très peu d'intérêt.
Alors que la question se pose de savoir si la séquelle de Dune
que
devrait réaliser lui-même Denis Villeneuve verra bien le jour dans
les années à venir, évoquons cette première partie. Nous sommes
en l'an 10191. Le Duc Leto Atréides de la maison du même nom reçoit
la visite d'un représentant de l’empereur Padishah Shaddam IV qui
lui enjoint de prendre en charge l'extraction de l’Épice sur
Arrakis en lieu et place du précédent intendant, le Baron Vladimir
Harkonnen de la maison Harkonnen. Arrakis est une planète-désert
sans eau mais à l'atmosphère respirable. L’Épice y est la seule
ressource disponible sur place. D'une valeur inestimable, elle est
sécrétée par des vers gigantesques et permet aux humains qui la
consomment de prolonger leur existence. Cette précieuse richesse qui
a fait la fortune des Harkonnen possède en outre d'autres
formidables facultés. Après avoir promis au chef de la tribu Fremen
Stilgar de ne pas empiéter sur son territoire du
Sietch Tabr,
Leto Atréides est victime d'une trahison. Sa concubine Dame Jessica
ainsi que leur fils Paul, héritier de la Maison Atréides, partent
cependant rejoindre le peuple des Fremens malgré les promesses du
Duc...
Avec
Dune,
c'est forcément tout ou rien. Surtout pour les fans sans doute
avides de trouver là une adaptation digne de leur épopée de
science-fiction préférée. L'action se situe donc sur une planète
balayée par des vents extrêmement violents sous les dunes de
laquelle vivent d'immenses vers. Si Kenneth McMillan incarnait en
1984 un Baron Harkonnen adipeux, pustuleux, sadique et aussi
effrayant que repoussant, l'acteur suédois Stellan Skarsgård n'a
rien à lui envier. Méconnaissable sous son maquillage, par la magie
des effets-spéciaux le voilà obèse, dénué de toute pilosité et
nanti d'un goitre qui fait le tour entier de son cou et de sa nuque.
Un vrai boogeyman de film d'horreur à la tête d'une bande de
''cénobites'' cruels et meurtriers. Le héros Paul Atréides est
quant à lui interprété par le jeune acteur franco-américain
Timothée Chalamet dont la carrière ne se résume pas qu'à une peau
de chagrin puisque sa carrière semble s'être accélérée depuis le
milieu des années 2010. Parfois théâtral mais plus généralement
sobre, il convainc plutôt bien dans la peau de l'héritier de la
Maison Atreides. Dans le rôle de sa mère, nous retrouvons l'actrice
Rebecca Ferguson qui deux ans en arrière interpréta le rôle de la
méchante Rose O'Hara dans le Doctor Sleep
de Mike Flanagan. Production américano-américaine, Dune
n'en devient pas moins le berceau d'un casting international
puisqu'outre la présence du suédois Stellan Skarsgård, on retrouve
l'acteur espagnol Javier Bardem dans le rôle de Stilgar ou l'actrice
britannique Charlotte Rampling dans celui de la Révérende mère
Gaius Helen Mohiam...
Celles
et ceux qui espéraient retrouver la flamboyance visuelle de Blade
Runner 2049
pourront être plus ou moins déçus puisqu'ici, tout ou presque est
couleur de sable. Des teintes sobrement perturbées par quelques
nuances de gris, de vert ou de bleu désaturés. Si cette première
partie passe tout d'abord forcément par l'apprentissage de son jeune
héros, le film n'en est pas moins doté de séquences épiques
sublimées par la dantesque partition musicale de Hans Zimmer. Bien
que l'aventure soit de prime abord plutôt complexe, les néophytes
auront le plaisir de constater que le récit est parfaitement lisible
et que Denis Villeneuve ne perd jamais ses spectateurs dans les
limbes d'un récit par trop encombré de personnages primaires et
secondaires. Dune
est fluide, beau, violent, parfois homérique et pourvu de
formidables effets-spéciaux dont une attaque assez remarquable des
Harkonnen contre le camp des Atreides où sont stockées les réserves
d’Épice. Malgré tout, le long-métrage de Denis Villeneuve semble
dénué d'émotion. Un sentiment qui parcours le film de son
ouverture jusqu'à son terme. Mais au delà de ce détail qui pourra
avoir plus ou moins d'importance, le spectacle est là...
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