La collaboration entre
les acteurs français Gérard Depardieu et Christian Clavier n'est
pas de première jeunesse. S'il est largement connu qu'ils ont
partagé ensemble les rôles vedettes de deux volets de la franchise
Astérix (Astérix
et Obélix contre César de
Claude Zidi en 1999 et Astérix et Obélix : mission
Cléopâtre d'Alain Chabat
en 2002) et de la comédie Les Anges gardiens de
Jean-Marie Poiré en 1995, il est sans doute moins familier que de
savoir que deux décennies auparavant, ils se sont frottés l'un à
l'autre dans le très beau et véritablement tragique Dîtes
lui que je l'aime de Claude
Miller en 1977. Ça n'est donc qu'une demi-surprise que de les
retrouver une fois encore réunis sur grand écran. Une demi-surprise
car c'est par contre la première fois qu'ils sont ensemble sur le
tournage d'un long-métrage réalisé par le cinéaste, écrivain et
dialoguiste Bertrand Blier. Convoi Exceptionnel
l'est, d'exceptionnel, à plus d'un titre. Tout d'abord parce que le
dernier film du cinéaste remontait à 2009 (l'excellent Le
Bruit des Glaçons),
soit presque dix ans, et que l'on ne peut rester indifférent à tout
ce que touche l'auteur des cultissimes Les
Valseuses,
Calmos,
Préparez vos Mouchoirs,
Buffet Froid,
ou encore Tenue de Soirée
et Merci la Vie.
Bien
que les années 2000 aient été parfois désastreuses en terme de
critiques (Combien tu m'aimes ?
méritait sans aucun doute un meilleur sort quand l'adaptation
cinématographique de sa propre pièce de théâtre Les
Côtelettes
se révélait, elle, ponctuellement, mais trop rarement, exaltante),
en ce début d'année 2019, on espérait le retour en grâce du fils
spirituel de Michel Audiard. Alors, qu'en est-il ? Et bien,
mieux vaut ne pas s'attendre à ressentir les mêmes émotions qui
nous étreignirent à l'époque des burlesques et surréalistes
chefs-d’œuvre du cinéaste français sous peine d'éprouver un
curieux ressentiment envers ce qui semble être une œuvre
testamentaire aussi grave qu'ennuyeuse. Les fans du génie des mots
et des maux retrouveront certainement quelques références à son
Buffet Froid
lors de la rencontre entre nos deux héros, le clochard Taupin, le
bourgeois Foster et ce flic incarné par Philippe Magnan ou plus loin
encore à son anti-féministe révolutionnaire Calmos
lors du repas qui clôt l'aventure. Parmi les invités de cette farce
moribonde, les actrices Sylvie Testud, Alexandra lamy, Audrey Dana,
Isabelle de Hertogh et pour la quatrième fois sous la houlette de
son mari de réalisateur, Farida Rahouadj. Côté gente masculine, on
a droit aux participations d'Alex Lutz (auteur et principal
interprète du remarquable Guy),
Bouli Lanners, Louis-Do de Lencquesaing, Jean Dell ou encore Guy
Marchand qui semble ici, et dans la peau d'un producteur, figurer
Bertrand Blier lui-même.
Il
est parfois des impressions difficiles à retranscrire. Pourquoi,
d'un côté, sommes nous en mesure de crier au génie d'un Quentin
Dupieux rythmant ses œuvres à la vitesse d'un escargot atteint de
polyarthrite et écrites sur un minuscule bout de papier tandis qu'il
peut devenir très vite insupportable de suivre jusqu'au bout les
aventures rarement réjouissantes des héros de ce Convoi
Exceptionnel ?
Peut-être parce qu'à sa façon, Bertrand Blier aura-t-il façonner
une filmographie si exceptionnelle (pour le coup), si pertinente et
si personnelle qu'il devient alors impossible de lui pardonner la
moindre faiblesse ? Son dernier long ne comble absolument pas
les attentes. Presque dix ans de patience pour un résultat en demi-teinte. En
quart de teinte, même, oserai-je dire. Et pourtant, malgré tout, et
c'est sans doute ce qui fait de ce Convoi
Exceptionnel
une immense déception, le film possède quelques rares moments d'intense émotion
et de poésie qui émaillent un récit anémique. Le dernier film de
Bertrand Blier aurait sans doute trôné en bonne place aux côtés de
ses meilleures œuvres si chacune des scènes avaient ressemblé à
celle qui oppose durant quelques instants Christian Clavier à
Alexandra Lamy qui pour le coup, efface la présence de n'importe
quel autre personnage. Aussi vite vu, aussi vite oublié...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire