L'histoire des
morts-vivants est un récit qui au cinéma, fêtera dans quelques
années, son centenaire. Parmi les longs-métrages qui ont honoré
cette créature à l'origine issue de la culture haïtienne, on
notera le White Zombie de Victor Halperin qui en 1932
ancrait son intrigue au cœur des rites vaudous. Près de trente-cinq
ans plus tard, un tout jeune cinéaste du nom de George Romero fit de
ses morts-vivants des anthropophages dont l'unique but était de se
repaître de chair humaine. Le film incarnait des valeurs politiques
et sociologiques dont certaines étaient de l'aveu même de son
auteur, le fruit du hasard (le rôle de Ben interprété par un
'black', (l'acteur Duane
Jones), était en effet dû au simple fait qu'il était le plus à
même d'incarner le personnage principal. Le scénario ne prévoyait
pas à l'origine que le celui était un homme de couleur). En 1974,
soit six ans plus tard, le cinéaste américain Bob Clark, auteur
plus tard du premier slasher officiel (Black Christmas)
et de la célèbre
comédie Porky's
allait signer un film qui allait marquer le genre de son empreinte.
Après une première tentative deux ans auparavant (le navrant
Children Shouldn't Play with Dead Things
déjà traité en ces pages), Bob Clark allait revenir avec un
nouveau récit tournant autour du thème du zombie avec son soldat
censé avoir été tué à la guerre mais qui contre toute attente
revient un soir chez papa-maman.
Dès
le départ on est troublé par l'ambiance générale que dégage
l’œuvre de Bob Clark qui assène un climat étrange. Mortifère,
et ce alors-même que le fils adoré n'a pas encore foulé l'entrée
de la chaleureuse demeure où sa sœur, son père, mais aussi et
surtout sa mère, espèrent le voir revenir. Alors qu'un ami et
officiel de l'armée américaine vient annoncer aux Brooks que leur
fils est tombé au combat, le voilà qui réapparaît dès le
lendemain. À ce sujet, Bob Clark traite l'événement comme s'il
s'agissait d'un rêve. Dead of Night
offre une vision macabre de son soldat revenu du front, marqué par
son expérience, dans son âme, mais aussi dans sa chair car comme
nous allons bientôt pouvoir le constater, Andy n'est plus tout à
fait le même homme.
Sa
réapparition sonne comme la conséquence de la fascination
qu'éprouve la mère de famille sur ce fils qu'elle a toujours
préféré à sa fille. La ferveur religieuse de celle-ci ne semble
elle non plus, pas étrangère au miracle de ce fils dont la mort est
tout simplement inenvisageable pour sa génitrice qui tant qu'il n'a
pas réapparu, demeure son seul centre d'intérêt lors des
conversations. Un comportement qui aura tendance à étouffer l'époux
ainsi que leur fille. Alors que Bob Clark envisageait d'offrir le
rôle d'Andy à l'acteur Christopher Walken, c'est finalement au
jeune Richard Backus qu'e l'interprétation est octroyée. Bonne
pioche puisque sans fournir d'efforts particuliers, l'acteur se
montre relativement convaincant. Surtout lorsqu'il s'agit de feindre
le sourire. Ce sourire qui cache dès le départ des intentions qui
déboucheront sur la mort de plusieurs habitants du quartier où
vivent les Brooks.
Revenant ?
Zombie ? Vampire ? Un peu des trois finalement puisque
l'une des particularités de Dead of Night est
d'offrir une vision différente du thème du zombie. Ici, le
mort-vivant ne semble pas attiré par la chair humaine mais doit
impérativement se nourrir du sang de ses victimes s'il ne veut pas
mourir dans les heures qui suivent. En effet, un étrange processus
le voit lentement se décomposer le soir venu, à cette heure tardive
où le moment de faire payer leur monnaie à ceux qui l'ont envoyé
au front est enfin venue. Tuer est donc une nécessité. Mais au delà
du besoin physiologique d'Andy, le jeune homme tue également parce
qu'il s'estime en droit de le faire alors qu'il est lui-même mort
après avoir combattu pour son pays. Si au départ, Bob Clark érige
le personnage d'Andy en héros, rappelant fièrement aux voisins et
amis qu'il est revenu sain et sauf de la guerre, bientôt, le
comportement du père change et la présence du soldat devient alors
gênante. Comme s'il fallait à tout prix le cacher. Comme ces hommes
valeureux, ces anciens combattants qui dès leur retour, ont été
simplement... ignorés.
Si
Dead of Night
se caractérise parfois par son absence de réelles séquences gore,
Bob Clark crée cependant un climat particulièrement oppressant.
Surtout lors des scènes nocturnes. Le film est donc davantage une
œuvre d'épouvante que d'horreur. La partition musicale de Donald
Rubinstein participe grandement à l'ambiance générale (oscillant
entre vieilles compositions largement surannées et pics sonores
effectués au violon), mais c'est surtout l'interprète d'Andy qui
retient l'attention. Lors du final, l'acteur revêt le visage
sinistre du mort-vivant du titre français. Yeux écarquillés et
dents saillantes. De quoi faire des cauchemars longtemps après la
projection. Si Dead of Night n'est
pas un chef-d’œuvre, il avait au moins le mérite d'aventurer son
zombie sur des terres inédites. A voir...
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