Pour son premier
long-métrage en tant que réalisateur et cinéaste, l'américain
Carlo Mirabella-Davis jusqu'ici auteur d'une poignée de courts signe
une œuvre puissante sur les conséquences d'un passé traumatique et
obsessionnel qui se révèlent à l'héroïne merveilleusement
interprétée par l'actrice Haley Bennett le jour où elle apprend
qu'elle est enceinte. Swallow
qui dans notre langue se traduit par le terme avaler décrit la
révélation d'un traumatisme enfoui dans l'esprit d'une femme mariée
à un homme d'affaire depuis sa plus tendre enfance. Fruit d'un viol,
Hunter Conrad cherche à trouver sa place au sein d'un couple et
d'une belle-famille dont elle ne semble être qu'une part
négligeable. Alors que son époux Richie est populaire, entouré de
nombreux amis et directeur d'une grande entreprise familiale
transmise par son père Michael (David Rasche), Hunter tourne en rond
dans leur luxueuse demeure, joue sur son téléphone portable et se
sent, au fond, inutile. Apparemment heureuse de vivre ainsi, la jeune
femme va cependant développer un étrange trouble du comportement
alimentaire connu sous le nom de maladie de Pica. En effet, Hunter
avale de petits objets qu'une échographie va bientôt révéler.
Mais ce que va aussi mettre à jour ce mal se situera dans le
comportement de son entourage. Celui de ses beau-parents mais aussi
et surtout de l'homme qu'elle aime. Hunter plonge alors peu à peu
dans ce qui s'apparente à la folie, mettant en jeu sa propre
existence et celle de son futur enfant...
Avec
un tel synopsis, Carlo Mirabella-Davis avait le choix entre deux
options : soit tourner un film d'horreur psychologique, soit un
drame. Et pour notre plus grand bonheur, le réalisateur a choisi la
seconde option et évite donc à Swallow
de tomber dans les travers habituels qu'impose en général ce genre
de production. Porté par une Haley Bennett absolument bouleversante
et magnifique, le long-métrage est d'une sobriété aussi dépouillée
dans la description du mal qui ronge l'héroïne que peuvent être
glaçants certains aspects de second ordre. À commencer par Austin
Stowell, l'époux en question, qui interprète un Richie souvent
absent, pris par ses responsabilités professionnelles, ainsi que par
David Rasche et Elizabeth Marvel qui interprètent respectivement
Michael et Katherine Conrad, les parents du jeune homme. Dès le
départ, Carlo Mirabella-Davis instaure un climat relativement
dérangeant lorsqu'il oppose Hunter à ceux qui sont censés prendre
soin d'elle. À commencer par une séquence située dans un
restaurant, début d'une longue dérive psychologique pour Hunter qui
ne cessera alors de se comporter de manière étrange et parfois
même, assez choquante. Si la consommation de petits objets est
traité de manière plutôt délicate, ce qui n'est qu'un drame
aurait très bien pu rapidement verser dans le thriller...
Mais
cet aspect lointain qu'aurait pu revêtir Swallow
n'intéressant
apparemment pas Carlo Mirabella-Davis, le réalisateur s'attarde
avant tout sur le personnage de Hunter, sur sa relation avec les
autres, ses sentiments, ses doutes et sur une rencontre future qui
devrait potentiellement la libérer du poids immense qu'elle porte
sur la conscience. C'est aussi la raison pour laquelle l'entourage de
l'héroïne fait souvent figure de matière négligeable, aussi peu
soient caractérisés les uns et les autres. Tout ce qui importe à
Carlo Mirabella-Davis semble tenir en six lettres : H.u.n.t.e.r.
Cette jeune femme à laquelle il accorde toute son attention,
fragile, d'abord. Puis déterminée par la suite. Swallow
pourrait
presque faire figure d'anachronisme à une époque où le
comportement de certains seconds rôles dénote totalement avec les
valeurs actuelles. Si Carlo
Mirabella-Davis aurait pu, au choix, définir le traumatisme de son
héroïne à travers l'un des nombreux autres troubles psychologiques
qui existent, la maladie de Pica (nom latin donné à la pie, oiseau
connu pour avoir ce genre de comportement) et le titre même du
long-métrage renvoient comme un signe cruel aux tous derniers
instants d'une œuvre bouleversante, réalisée de manière pudique,
accompagnée par la superbe partition du compositeur Nathan Halpern
et interprétée avec force une très grande forcé par son
interprète féminine principale... Remarquable...
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