Rédiger un article sur
Blood Freak,
c'est un peu comme se retrouver dans la peau d'un agent d'assurance
chargé d'enquêter sur l'incendie d'une entreprise totalement
détruite par les flammes : on ne sait par où commencer !
Chaque séquence, chaque minute ou chaque seconde qui
la constitue semble avoir été mûrement réfléchie afin que le
spectateur n'ait d'autre choix que de penser qu'elle est la pire de
tout ce à quoi il a pu être exposé sur petit ou grand écran
durant toute son existence passée, présente et même à venir.
Blood Freak
est une minutieuse entreprise de destruction artistique. Un emblème
de non-cinéma. De sous-culture cinématographique qui s'abreuve de
quelques références pour n'en régurgiter qu'une substantifique
effluve de fosse septique. Comme un met délicat se muant en de
malodorants étrons une fois la digestion complétée. Cette chose,
on la doit à deux types. Tout d'abord au scénariste, acteur et
réalisateur Brad F. Grinter, mais aussi et surtout à Steve Hawkes
dont Blood Freak
fut le second et avant-dernier long-métrage en tant que réalisateur
après le thriller The Walls have Eyes
en 1969 et avant le film d'aventures familiales Stevie,
Samson and Delilah en
1975. une œuvre réalisée en collaboration entre les deux hommes,
donc, et mettant en scène Steve Hawkes dans le rôle principal.
Physiquement proche de Michael ''Charles Ingalls'' Landon de la
célèbre série télévisée des années 70/80 La
Petite Maison dans la Prairie,
cet ancien nageur qui tourna notamment dans deux Tarzan réalisés
par Manuel Caño en 1969 et 1972 (respectivement, Tarzán
en la Gruta del Oro
et Tarzán y el Arco Iris)
finance Blood Freak
pour une raison inhabituelle. Gravement brûlé lors d'un accident,
l'acteur et réalisateur compte alors payer ses frais médicaux grâce
aux recettes qu'engendrera la commercialisation de ce long-métrage
vendu comme un film d'horreur...
Ce
qu'est Blood Freak
par ailleurs, même s'il faudra attendre très longtemps avant de
comprendre les enjeux d'une œuvre qui s'ouvre sur toute une série
de séquences mettant en scène des individus consommant diverses
drogues et buvant autant d'alcools tout en psalmodiant des paroles
directement en rapport avec Dieu et la religion. Dans cette première
partie du film, le thème oscille entre le film de propagande
pro-drogues et une certaine forme de prosélytisme à l'attention des
brebis que se seraient quelque peu égarées. Un curieux mélange à
vrai dire, qui ne sent malheureusement pas le souffre tant
l'interprétation et la réalisation semblent à mille lieues des
aspirations des auteurs de cette véritable catastrophe artistique.
On songe parfois au désastreux Savage Waters que
réalisa six ans plus tard Paul W. Kener, lequel demeure l'une des
bobines les plus infâmes de toute l'histoire du cinéma. L’œuvre
(ce qui reste un bien grand mot) de Brad F. Grinter et Steve Hawkes
rejoint sans mal ce courant du Nanar
qui accumule tant de tares que le résultat s'avère finalement
fonctionner à contre-courant du rejet dans lequel il devrait
cependant être censé s'inscrire. Si Blood Freak
est mauvais, il mérite cependant toute l'attention des amateurs du
genre qui verront sans doute là, le parangon dans lequel ne
s'inscrivent finalement pas tant de longs-métrages que cela.
Partageant ce même goût pour l'improbable que le Devil
Story de
Bernard Launois, autre monument du nanar cette fois-ci, ''à la
française'', Blood Freak
est
d'abord un film qui se déguste chez nous dans sa version doublée en
français. Et si l'on conseille en général aux néophytes de
découvrir une oeuvre cinématographique quelle qu'elle soit dans sa
langue d'origine, le film de Brad F. Grinter et Steve Hawke y gagne
en intensité burlesque à être découvert d'abord en langue
française...
Et
ce, pour une raison simple: dans le genre, on aura rarement eu
l'occasion d'entendre des doublages aussi mauvais. C'est à croire
que deux ou trois acteurs seulement ont pris le relais les uns
derrières les autres afin de doubler les acteurs américains. Et
lorsque je dis doubler, je veux bien entendu parler des séquences
sur lesquelles les dits doubleurs se sont donnés la peine
d'intervenir. Il suffit tout d'abord de voir les lèvres des
interprètes bouger pour comprendre que le doublage en français
n'est réduit qu'au strict minimum. La liberté prise avec leur
fonction de doubleurs est telle que certaines séquences sont même
carrément muettes. Vu la léthargie avec laquelle le casting de
rednecks enfumés, les personnages féminins au Q.I d'huîtres
d'élevage et le héros tout sauf charismatique incarnent leur
personnage respectif, on ne peut que se féliciter qu'une version
doublée en français puisse exister. Et je ne vous ai pas parlé du
sujet. Herschel (qu'interprète Steve Hawke) participe à une soirée
enfumée lorsque l'une des convives lui propose un emploi: s'il
l'accepte, il devra servir de cobaye à deux scientifiques (dont l'un
ressemble au tueur en série John Wayne Gacy) et gouter de la viande
de dindons génétiquement modifiés. Les conséquences seront pour
lui et son entourage, particulièrement terribles. Quelques séquences
gore viennent émailler une oeuvre tellement faible dans toutes les
matières qu'elles ne suffiront certainement pas à contenterbon
nombre de spectateur venus se risquer à la projection du film. Parmi
les plus mauvais longs-métrages de toute l'histoire du cinéma,
Blood Freak mérite
sans aucun doute de trôner dans le top 5...
Bravo! je l'ai revu hier et la vf vaut vraiment des points (ou des poings!)
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