Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

Labels


vendredi 29 mai 2020

Les Eblouis de Sarah Suco (2019) - ★★★★★★★★☆☆



On voit sa trogne partout depuis quelques années. Ces derniers temps, l'actrice Sarah Suco a notamment trimbalé son regard pénétrant sur les tournages de Guy d'Alex Lutz, le formidable Les Invisibles de Louis-Julien Petit, ou très récemment dans Lucky d'Olivier Van Hoofstadt. Une dizaine d'années seulement qui pourtant, en comparaison de sa carrière de réalisatrice paraissent une éternité. Car en dehors d'un court-métrage en 2017 (Nos Enfants), Sarah Suco n'a réalisé qu'un seul long-métrage. Et quel long-métrage... de ceux qui comptent parmi les quelques œuvres qui chaque année se détachent très largement du reste de la production cinématographique. La réalisatrice y laisse s'exprimer d'autres interprètes qui pour elle et à travers elle, vont témoigner du drame qu'elle a vécu de ses huit ans jusqu'à sa majorité. Si le thème des sectes n'est pas rare sur grand écran, les films relatant avec vérisme le sujet ne sont par contre pas légion. Dans ce fatras constitué de dizaines de longs-métrages, peu de réalisateurs peuvent s'enorgueillir d'avoir apporté un témoignage aussi glaçant que l’œuvre de la française. On pense notamment à La Secte sans Nom de Jaume Balagueró ou à Guyana, la Secte de l'Enfer de René Cardona Jr...

Les Éblouis suit le parcours d'une jeune adolescente, Camille (formidable Céleste Brunnquell pour qui ce rôle est le tout premier au cinéma), dont les parents ont choisi de suivre la voie du seigneur en intégrant avec leurs quatre enfants une communauté charismatique (mouvement catholique né aux États-Unis dans les années 1960) dirigée par celui que tous nomment le Berger (là encore, formidable est Jean-Pierre Darroussin qui endosse la robe de bure). Si très rapidement Christine (excellente Camille Cottin), la mère de l'adolescente, accepte de donner suite aux exigences du Berger parmi lesquelles la contrainte pour Camille d'abandonner sa passion pour le cirque, la jeune fille vit très mal cette décision et refuse tout net d'y mettre un terme. Son père Frédéric (l'acteur Eric Caravaca), impuissant, lâche, donne tout d'abord raison à sa fille avant de changer de position. Après une forte dispute engageant ses parents et ses grands-parents, ces derniers sont jetés dehors avec ordre de ne plus jamais entrer en contact avec leurs proches. C'est le début d'un cauchemar pour Camille ainsi que ses frères et sœurs. Les liens d'amour qui unissent ces enfants à leurs parents disparaissent peu à peu pour un amour de Dieu sans partage...

Face à une Céleste Brunnquell absolument remarquable et dont le regard renvoie inévitablement à celui de Sarah Suco et à l'enfer qu'elle vécu durant une partie de son enfance et toute son adolescence, une communauté soudée, aveuglée, lavages de cerveaux, exorcismes et punitions à la clé. Plus angoissant que n'importe quel film d'horreur ou d'épouvante porté sur le sujet, plus illustratif que n'importe quel documentaire sur les sectes, Les Éblouis prouve, sinon que Sarah Suco fut effectivement cette jeune fille aux prises avec un gourou charismatique et ses adeptes, du moins qu'elle maîtrise le sujet sur le bout des doigts. La réalisatrice démontre avec quelle facilité un individu à lui seul peut pousser l'autre au détachement de ses biens personnels et affectifs. Ici, le comportement de Camille Cottin résume assez bien l'envoûtement d'un adepte aux prises avec un homme prêchant la belle parole. Mais ce qui différencie la simple communauté de la secte demeure tout ce qui en arrière-plan symbolise la manipulation par la foi en Dieu, et l'appropriation exclusive et entière des biens qui appartiennent au membre de la communauté. Mais ce qui apparaît comme le plus effarant demeure dans le contrôle mental absolu du Berger sur ses brebis et que retranscrit à l'écran avec une justesse terriblement troublante, Sarah Suco. Profitant d'un casting largement à la hauteur du projet, la réalisatrice signe une œuvre puissante sur les arcanes d'un mythe qui tient moins de la fiction que du réel. Une merveille...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...